Vu la requête, enregistrée le 4 août 2011, présentée pour M. Georges A, demeurant ..., par Me Lindon ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1111526 du 4 juillet 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 28 juin 2011 décidant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mars 2012 :
- le rapport de Mme Sanson, rapporteur,
- et les observations de Me Lindon, représentant M. A ;
Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire exécutoire prise depuis au moins un an " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité égyptienne et né le 1er novembre 1982, a fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français le 9 février 2010, laquelle lui a été notifiée le 17 février 2010; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application des dispositions précitées ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 7 de la directive n°2008/115/CE du 16 décembre 2008 susvisée relatif au " départ volontaire " : " 1.La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les Etats membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les Etats membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. / Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt. / 2.Si nécessaire, les Etats membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée de séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux. / 3.Certaines obligations visant à éviter le risque de fuite, comme les obligations de se présenter régulièrement aux autorités, de déposer une garantie financière adéquate, de remettre des documents ou de demeurer en un lieu déterminé, peuvent être imposées pendant le délai de départ volontaire. / 4.S'il existe un risque de fuite, ou si une demande de séjour régulier a été rejetée comme étant manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, les Etats membres peuvent s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours " ; que le 7) de l'article 3 de la même directive définit ce " risque de fuite " comme " le fait qu'il existe des raisons, dans un cas particulier et sur la base de critères objectifs définis par la loi, de penser qu'un ressortissant d'un pays tiers faisant l' objet de procédures de retour peut prendre la fuite " ; qu'aux termes de l'article 8 de la même directive, intitulé " éloignement ": " 1.Les Etats membres prennent toutes les mesures nécessaires pour exécuter la décision de retour si aucun délai n'a été accordé pour un départ volontaire conformément à l'article 7, paragraphe 4, ou si l'obligation de retour n'a pas été respectée dans le délai accordé pour le départ volontaire conformément à l'article 7. / 2.Si un Etat membre a accordé un délai de départ volontaire conformément à l'article 7, la décision de retour ne peut être exécutée qu'après expiration de ce délai, à moins que, au cours de celui-ci, un risque visé à l'article 7, paragraphe 4, apparaisse. / 3.Les Etats membres peuvent adopter une décision ou un acte distinct de nature administrative ou judiciaire ordonnant l'éloignement (...) " ; que le délai imparti aux Etats membres pour transposer cette directive expirait, en vertu du paragraphe 1 de son article 20, le 24 décembre 2010 ;
Considérant que les articles 7 et 8 de la directive cités ci-dessus énoncent des obligations en termes non équivoques, qui ne sont assorties d'aucune condition et ne sont subordonnées dans leur exécution ou dans leurs effets à aucun acte des institutions de l'Union européenne ou des Etats membres ; qu'à la date de la décision attaquée elles n'avaient pas été transposées dans l'ordre juridique interne ; que, par suite, le requérant pouvait s'en prévaloir ;
Considérant que si les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans leur rédaction alors en vigueur, en ce qu' elles n'imposent pas qu'une mesure de reconduite à la frontière soit assortie d'un délai approprié pour le départ volontaire d'un ressortissant de pays tiers dans des cas autres que ceux prévus à l'article 7, paragraphe 4, de la directive, sont incompatibles avec les objectifs de ses articles 7 et 8, les dispositions de cette directive ne font toutefois pas obstacle à ce qu'une mesure de reconduite à la frontière soit prise à l'encontre d'un ressortissant de pays tiers dans les cas prévus aux 1°, 2° et 4° du II de l'article L. 511-1, dès lors que cette mesure est assortie d'un délai de retour approprié à la situation de l 'intéressé et supérieur à sept jours ; qu'elles ne font pas davantage obstacle à ce qu'une mesure de reconduite à la frontière soit prise, sans être assortie d'un tel délai, dans les cas prévus aux 5°, 7° et 8° du même II de l'article L. 511-1, à la condition que ce délai réduit, voire l'absence de délai, soient justifiés par la situation du ressortissant de pays tiers, ou, dans le cas prévu au 3° du II, à la condition que l'obligation initiale de quitter le territoire ait été prise conformément aux exigences de forme et de fond prévues par les dispositions des articles 7 et 12 de la directive ;
Considérant que, comme indiqué précédemment, l'arrêté contesté du 28 juin 2011 décidant la reconduite à la frontière de M. A a été pris sur le fondement des dispositions alors en vigueur du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et séjour des étrangers et du droit d'asile, ce qui n'impliquait pas nécessairement qu'il soit assorti d'un délai de retour approprié à la situation de l'intéressé et supérieur à sept jours ; que si cet arrêté ne comportait pas la mention d'un délai de départ volontaire, l'obligation initiale de quitter le territoire français du 9 février 2010, notifiée le 17 février 2010, sur laquelle il se fondait, était assortie d'un délai d'un mois, à l'expiration duquel il pouvait être reconduit d'office à la frontière ; que, par ailleurs, la motivation d'une obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement ; que l'arrêté du 9 février 2010 visait notamment le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aux termes duquel, dans sa rédaction alors applicable, " l'autorité administrative qui refuse la délivrance (...) d'un titre de séjour à un étranger (...) peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français ( ...) " ; qu'il indiquait que M. A ne remplissait aucune des conditions pour bénéficier de la carte de séjour temporaire sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que le bénéfice de la carte mention " salarié " ne pouvait lui être accordé sur le fondement de l'article L. 313-10 1° du même code ; qu'il ajoutait que M. A célibataire sans enfants, ne justifiait pas être démuni d'attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'il comportait ainsi les circonstances de fait et les considérations de droit sur lesquels le préfet des Hauts-de-Seine s'était fondé pour refuser un titre de séjour à M. A et l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'il mentionnait en outre les voies de recours disponibles ; que, par suite, l'obligation initiale de quitter le territoire du 19 février 2010 a été prise conformément aux exigences de forme et de fond prévues par les dispositions des articles 7 et 12 de la directive du 16 décembre 2008 ; que le préfet a pu dans l'arrêté attaqué dès lors ne prévoir aucun délai de retour sans méconnaître les dispositions sus analysées de la directive n°2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales: " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée à l'article L. 511-4 dans sa rédaction alors en vigueur du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'un arrêté d'expulsion pris selon la procédure normale ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait prendre légalement une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;
Considérant que si M. A soutient qu'il vit en France depuis le 3 juin 1998, qu'il travaille et y a construit toute sa vie personnelle, il ressort toutefois des pièces du dossier et notamment du procès-verbal établi le 28 juin 2011 lors de son interpellation, qu'il a déclaré être isolé et sans enfant à charge en France, alors que toute sa famille réside en Egypte ; que la durée de son séjour n'est pas établie ; que, dans ces conditions, l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 28 juin 2011 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que n'étant pas en situation de se voir délivrer de plein droit la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", il ne peut utilement soutenir que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auraient été méconnues ; que l'arrêté litigieux n'a pas davantage méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant enfin, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
Considérant que le requérant fait valoir qu'il est de confession copte et qu'il subirait des persécutions en cas de retour en Égypte ; qu'il n'établit pas, cependant, que, du fait de son appartenance religieuse, il serait personnellement exposé à des risques en cas de retour dans son pays d'origine ; que, dès lors, le préfet des Hauts-de-Seine n'a pas méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
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N° 11PA03629