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27/10/2011 | FRANCE | N°11PA00387

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 27 octobre 2011, 11PA00387


Vu la requête, enregistrée le 21 janvier 2011 par télécopie et régularisée le 28 janvier 2011, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1007524/5-2 du 16 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé son arrêté du 26 mars 2010 en tant qu'il a refusé d'accorder à M. A le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étudiant et lui a fait obligation de quitter le territoire et, d'autre part, lui a enjoint de lui délivrer un titre de séjour portant la mention étu

diant dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;
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Vu la requête, enregistrée le 21 janvier 2011 par télécopie et régularisée le 28 janvier 2011, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1007524/5-2 du 16 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé son arrêté du 26 mars 2010 en tant qu'il a refusé d'accorder à M. A le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étudiant et lui a fait obligation de quitter le territoire et, d'autre part, lui a enjoint de lui délivrer un titre de séjour portant la mention étudiant dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Paris ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 octobre 2011 :

- le rapport de M. Lercher, président-rapporteur,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,

- et les observations de Me Hug, pour M. A ;

Considérant que le PREFET DE POLICE relève appel du jugement du 16 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de M. A tendant à l'annulation de la décision du 26 mars 2010 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention étudiant . (...) ; que ces dispositions permettent à l'administration d'apprécier, sous le contrôle du juge, la réalité et le sérieux des études poursuivies ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, ressortissant sud coréen, entré en France en octobre 2000 sous couvert d'un visa étudiant pour suivre des études de philosophie, était titulaire jusqu'en décembre 2009 d'un titre de séjour en qualité d'étudiant ; que par la décision du 26 mars 2010 le PREFET DE POLICE lui a refusé le renouvellement de ce titre au motif qu'il n'avait obtenu aucun diplôme depuis 2003, qu'il s'était inscrit six années consécutives sans succès en doctorat de philosophie et que, sans avoir soutenu sa thèse, il présentait une inscription en Master 2 construction européenne ; que si M. A, qui ne justifie pas des motifs pour lesquels il ne s'est pas présenté à sa soutenance de thèse, prévue en octobre 2009, soutient que l'administration universitaire a refusé de lui accorder une nouvelle dérogation et qu'il a suspendu ses travaux en vue d'approfondir ses connaissances au regard de son projet professionnel, ses allégations ne sont pas confirmées par son directeur de recherches ; que le Master 2 auquel il est inscrit a pour objet d'étude le fonctionnement et la réforme éventuelle de l'organisation mondiale du commerce, sans que l'intéressé soit en mesure d'établir le lien entre ce nouveau champ d'étude et la question de l'intersubjectivité dans la phénoménologie de Merleau-Ponty, objet de ses études doctorales et, par suite, la cohérence de son parcours universitaire à l'issue de neuf ans d'études ; que, dès lors, la décision par laquelle le PREFET DE POLICE a refusé le renouvellement du titre de séjour de M. A en qualité d'étudiant ne peut être regardée comme entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que M. A fait valoir que son départ provoquerait la rupture de son couple, créé sur le territoire depuis plus de huit ans ; que si l'intéressé n' a souscrit un pacte civil de solidarité avec B, ressortissant français, qu'en décembre 2009, il ressort toutefois des pièces du dossier constituées de quittances EDF, de factures, de relevés bancaires libellés à son nom et à l'adresse de B en tant qu'hébergeant, et d'attestations des parents de B et d'amis que la réalité et la solidité de sa relation, antérieure de plusieurs années au pacte civil de solidarité, doit être regardée comme établie ; que, dès lors, M. A est fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 26 mars 2010 en tant qu'il refuse le renouvellement du titre de séjour de M. A en qualité d'étudiant ;

Considérant qu'il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par M. A devant le Tribunal administratif de Paris ;

Considérant que si M. A fait valoir que la décision de refus de titre porte gravement atteinte au respect de sa vie privée et familiale dès lors que depuis septembre 2002, il partage sa vie avec un ressortissant français avec qui il a conclu un pacte civil de solidarité en décembre 2009, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant pour contester le refus de renouveler un titre de séjour en qualité d'étudiant, qui résulte seulement d'une appréciation de la réalité et du sérieux des études poursuivies ; que par suite le moyen doit être écarté ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé ; que le dernier alinéa de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ;qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'à la suite de l'annulation d'une obligation de quitter le territoire français, il incombe au préfet, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'une obligation de quitter le territoire français et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée, au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen ; qu'il y a lieu, par suite, de prescrire au PREFET DE POLICE de réexaminer la demande de titre de séjour de M. A au regard, notamment, de la motivation du présent arrêt, dans un délai de deux mois à compter de sa notification ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée... ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le PREFET DE POLICE à verser à M. A la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 16 décembre 2010 est annulé en tant qu'il porte annulation de la décision du 26 mars 2010 du PREFET DE POLICE refusant le renouvellement du titre de séjour de M. A.

Article 2: Le surplus des conclusions de la requête du PREFET DE POLICE est rejeté.

Article 3 : Le PREFET DE POLICE réexaminera la demande de titre de séjour de M. A dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Le préfet de police tiendra le greffe de la cour (service de l'exécution) immédiatement informé des dispositions prises pour répondre à cette injonction.

Article 4: Le PREFET DE POLICE versera à M. A la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la demande de M. A présentée devant le Tribunal administratif de Paris et de ses conclusions d'appel sont rejetés.

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N° 11PA00387


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA00387
Date de la décision : 27/10/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LERCHER
Rapporteur ?: M. Alain LERCHER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : HUG

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-10-27;11pa00387 ?
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