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20/10/2011 | FRANCE | N°10PA05691

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 20 octobre 2011, 10PA05691


Vu la requête, enregistrée le 3 décembre 2010, présentée pour la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS, représentée par son maire, par Me Gerphagnon ; la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600441/6 en date du 7 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Melun l'a condamnée à verser à M. et Mme A une indemnité de 83 000 euros en réparation des dommages affectant leur propriété et résultant d'inondations ;

2°) de déclarer que la société Veolia Eau-Compagnie générale des eaux est responsable des dommages

en cause et devra être seule condamnée à réparer les préjudices subis par les époux...

Vu la requête, enregistrée le 3 décembre 2010, présentée pour la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS, représentée par son maire, par Me Gerphagnon ; la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600441/6 en date du 7 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Melun l'a condamnée à verser à M. et Mme A une indemnité de 83 000 euros en réparation des dommages affectant leur propriété et résultant d'inondations ;

2°) de déclarer que la société Veolia Eau-Compagnie générale des eaux est responsable des dommages en cause et devra être seule condamnée à réparer les préjudices subis par les époux A ;

3°) subsidiairement, de condamner la société Veolia Eau-Compagnie générale des eaux à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre et de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a limité les prétentions indemnitaires de M. et Mme A à la somme de 83 000 euros ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 octobre 2011 :

- le rapport de Mme Renaudin, rapporteur,

- les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public,

- et les observations de Me Gerphagnon, pour la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS et celles de Me Israël, pour la société Veolia Eau-Compagnie générale des eaux ;

Considérant que M. et Mme A, qui avaient acquis en janvier 1997 une maison sise ... dans la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS, ont subi deux inondations à la suite de pluies importantes en 1997 et en 2002 ; que des désordres ont affecté leur habitation, consistant en des fissures ; qu'ils ont recherché devant le Tribunal administratif de Melun la responsabilité de la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS, ainsi que de la société Veolia Eau-Compagnie générale des eaux, pour lesdits dommages, estimant qu'ils étaient imputables à l'insuffisance du réseau d'eaux pluviales de la commune ; que par jugement du 7 octobre 2010, dont la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS relève régulièrement appel, le Tribunal administratif de Melun a condamné cette dernière à verser à M. et Mme A une indemnité de 83 000 euros en réparation de leur préjudice ;

Sur la responsabilité :

Considérant que même en l'absence de faute, la collectivité, maître de l'ouvrage, ainsi que le cas échéant le maître d'oeuvre, sont responsables vis-à-vis des tiers des dommages causés à ceux-ci par l'existence et le fonctionnement d'un ouvrage public à moins que ces dommages ne soient imputables à un cas de force majeure ou à une faute de la victime ;

Considérant qu'en cas de délégation limitée à la seule exploitation de l'ouvrage, comme c'est le cas en matière d'affermage, si la responsabilité des dommages imputables à son fonctionnement relève du délégataire, sauf stipulations contractuelles contraires, celle résultant de dommages imputables à son existence, à sa nature et son dimensionnement, appartient à la personne publique délégante ; que ce n'est qu'en cas de concession d'un ouvrage public, c'est-à-dire d'une délégation de sa construction et de son fonctionnement, que peut être recherchée par des tiers la seule responsabilité du concessionnaire, sauf insolvabilité de ce dernier, en cas de dommages imputables à l'existence ou au fonctionnement de cet ouvrage ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le service de l'assainissement sur le territoire de la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS a été confié à la société Compagnie Générale des Eaux, à laquelle a succédé la société Veolia Eau-Compagnie générale des eaux, par un traité d'affermage, conclu le 9 février 1976 et renouvelé le 1er mars 2000 ; que ce service comprend la surveillance, le fonctionnement et l'entretien des canalisations destinées à la collecte et à l'évacuation des eaux pluviales et des eaux usées ; que la société Veolia Eau-Compagnie générale des eaux ayant en sa qualité de fermier reçu délégation de la seule exploitation de l'ouvrage, sa responsabilité ne peut être recherchée qu'au titre de cette exploitation, la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS demeurant responsable des dommages aux tiers imputables à l'existence de l'ouvrage, à sa nature et à son dimensionnement, dès lors qu'il ne résulte pas des contrats d'affermage précités qu'ils comportent des stipulations contraires ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le Tribunal administratif de Melun, que les inondations ayant affecté l'immeuble des époux A ont pour cause l'insuffisance de capacité des collecteurs d'eaux pluviales situés sous les rues ... ; que l'expert explique que les eaux du ru du ..., rivière qui collecte les eaux de ruissellement d'un important bassin versant d'environ 157 hectares, qui se déversaient autrefois directement dans le ru ..., sont désormais collectées avant de rejoindre ce dernier cours d'eau, ainsi que, depuis l'urbanisation de ce secteur, les eaux d'autres rues recueillies en amont du carrefour des rues ..., dans des canalisations de diamètre 300 ; qu'il relève que la capacité d'absorption d'un collecteur de ce diamètre est insuffisante pour le débit de pointe des eaux lors de précipitations abondantes et indique que le réseau n'étant dans ce cas pas en mesure d'absorber les volumes d'eau, ceux-ci se déchargent dans la cour commune dans laquelle l'immeuble des époux A se situe ; que l'expert estime qu'une partie des eaux de la cour, lors des précipitations en cause, s'est infiltrée dans le sol pour rejoindre la nappe phréatique passant à 1 mètre sous l'immeuble des époux A et a entraîné les parties fines contenues dans les remblais supportant l'immeuble, diminuant la compacité de ces derniers et provoquant un tassement différentiel à l'origine des fissures constatées ; que dès lors qu'il est ainsi établi que les inondations dont ont été victimes les époux A proviennent exclusivement du sous-dimensionnement des réseaux collectifs, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que ces derniers, tiers par rapport à l'ouvrage public, ne pouvaient rechercher que la responsabilité de la seule commune sur le fondement de la responsabilité sans faute, et non celle de la société délégataire ;

Considérant que la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS ne peut utilement soutenir que la responsabilité de la société Veolia Eau-Compagnie générale des eaux serait engagée à l'égard des époux A sur le fondement des clauses contractuelles du traité d'affermage, lesquelles ne déterminent que les rapports entre le délégant et son délégataire ;

Considérant que la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS ne critique pas l'évaluation du préjudice faite par les premiers juges ; qu'elle se borne au contraire à en demander la confirmation en ce que ceux-ci l'ont limité à la valeur vénale de l'immeuble ;

Sur les conclusions subsidiaires de la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS tendant à ce que la société Veolia Eau-Compagnie générale des eaux la garantisse des condamnations prononcées à son encontre :

Considérant que si la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS invoque un manquement de la société Veolia Eau-Compagnie générale des eaux à l'obligation qui, aux termes des traités d'affermage de 1976 et 2000 lui aurait incombé, de la prévenir de l'insuffisance des réseaux, il résulte des stipulations desdits traités que si le service de l'assainissement comporte l'obligation d'assurer la surveillance des réseaux dans le cadre du fonctionnement et de l'entretien des canalisations, l'obligation d'aviser la commune mise à la charge de la société délégataire par le traité sur l'insuffisance des réseaux, est conditionnée à une augmentation du volume des eaux usées ou à l'application de nouvelles réglementations ; qu'il résulte par ailleurs des stipulations de ces traités que les travaux d'amélioration, d'extension et de renforcement du réseau sont effectués pour le compte de la commune et en supposent l'accord ; que dans le silence du traité sur la nécessité d'aviser la commune en cas d'insuffisance du réseau de collecte des eaux pluviales, un manquement de la société Veolia Eau-Compagnie générale des eaux à ses obligations de conseil ne peut être retenu ; qu'en outre, il résulte de l'instruction que la commune avait connaissance des insuffisances des conduites d'eau pluviales en tous cas dès l'année 2000 ; qu'il s'ensuit que les conclusions d'appel en garantie présentées par la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS à l'encontre de la société Veolia Eau-Compagnie générale des eaux doivent être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun l'a condamnée à réparer les dommages subis par M. et Mme A ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par la société Veolia Eau-Compagnie générale des eaux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE DE CHAUCONIN NEUFMONTIERS versera à la société Veolia Eau-Compagnie générale des eaux une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 10PA03855

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N° 10PA05691


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA05691
Date de la décision : 20/10/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme Mathilde RENAUDIN
Rapporteur public ?: M. JARRIGE
Avocat(s) : GERPHAGNON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-10-20;10pa05691 ?
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