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06/07/2011 | FRANCE | N°10PA00804

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 06 juillet 2011, 10PA00804


Vu la requête, enregistrée le 15 février 2010, présentée pour la société AAAB POMPES FUNEBRES RIVE GAUCHE, dont le siège est au 78 rue de la Pompe à Paris (75116), par Me Zamora ; la société AAAB POMPES FUNEBRES RIVE GAUCHE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501072/2, 0501088/2 du 14 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2000 et 2001 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contes

tées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les frais ...

Vu la requête, enregistrée le 15 février 2010, présentée pour la société AAAB POMPES FUNEBRES RIVE GAUCHE, dont le siège est au 78 rue de la Pompe à Paris (75116), par Me Zamora ; la société AAAB POMPES FUNEBRES RIVE GAUCHE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501072/2, 0501088/2 du 14 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2000 et 2001 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les frais irrépétibles au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 juin 2011 :

- le rapport de Mme Versol, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public ;

Considérant que la SARL AAAB POMPES FUNEBRES RIVE GAUCHE, qui exerce une activité de pompes funèbres et dont le capital social est détenu à 99 % par M. A et le surplus par Mme A, qui est également salariée de l'entreprise, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des exercices clos en 2000 et 2001, à la suite de laquelle des redressements en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée lui ont été notifiés ; que la société relève appel du jugement du 14 décembre 2009 du Tribunal administratif de Paris qui a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des contributions additionnelles à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2000 et 2001 ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, en premier lieu, que si la société requérante fait valoir que le Tribunal administratif de Paris a, en méconnaissance des prescriptions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, omis de mentionner, dans les visas, les mémoires en défense présentés par l'administration, enregistrés au greffe du tribunal le 21 juillet 1995, il ressort de la minute du jugement figurant au dossier que ce moyen manque en fait ; que la requérante n'est pas davantage fondée à soutenir que le jugement attaqué ne comporte pas le visa des textes appliqués, nonobstant la circonstance que ne sont pas cités les articles 53 A et 54 bis du code général des impôts ;

Considérant, en deuxième lieu, que si la société requérante soutient que les premiers juges n'ont pas suffisamment répondu aux moyens tirés de la déductibilité de différentes dépenses comptabilisées en charges, du caractère explicite de l'inscription en comptabilité d'un avantage en nature au bénéfice de M. A et de la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'acquisition de véhicules automobiles, il ressort de l'examen du jugement attaqué qu'il est suffisamment motivé en ce qui concerne la réponse apportée à ces moyens ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté ; que la requérante ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que les premiers juges n'ont pas répondu à tous les arguments développés par les parties ;

Considérant, en dernier lieu, que la société requérante n'est pas fondée à se prévaloir de la circonstance que les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de l'application de la réponse ministérielle à M. Bignon, député, publiée le 15 décembre 1977, invoquée sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, dès lors que ce moyen était inopérant, la société n'entrant pas dans les prévisions de cette doctrine administrative qui se rapporte à la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'acquisition de leur véhicule par les artisans taxis ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 54 bis du code général des impôts : Les contribuables visés à l'article 53 A (...) doivent obligatoirement inscrire en comptabilité, sous une forme explicite, la nature et la valeur des avantages en nature accordés à leur personnel ; et qu'aux termes de l'article 111 du même code : Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une société qui comptabilise indistinctement, dans son compte de frais généraux, des avantages en nature accordés à des membres de son personnel et qui, revêtant de ce fait un caractère occulte, sont constitutifs pour ceux-ci de revenus distribués, ne peut, elle-même, les soustraire de son bénéfice imposable ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société AAAB POMPES FUNEBRES RIVE GAUCHE a pris à bail, au titre des exercices clos en 2000 et 2001, un appartement d'une superficie de 228 m², situé dans le 16ème arrondissement de Paris, dont il est constant qu'il a constitué la résidence principale de M. et Mme A et de leurs enfants en 2000 et 2001 ; que la société a comptabilisé un avantage en nature au bénéfice de Mme A, évalué à 120 000 F pour chacun des exercices alors que la totalité des frais afférents à cette location s'élevait à 384 354 F en 2000 et 402 360 F en 2001 ; qu'estimant en dernier lieu que l'appartement avait été mis à la disposition de chacun des époux A à concurrence de 50 % des frais exposés, le service a, d'une part, rehaussé le montant de l'avantage en nature déductible, imposable dans la catégorie des traitements et salaires, accordé à Mme A au titre de 2000 et 2001, à concurrence respectivement des sommes de 192 177 F et 201 180 F, et a, d'autre part, considéré que la société avait accordé à M. A un avantage en nature non déclaré, en méconnaissance des dispositions de l'article 54 bis du code général des impôts, du même montant que l'avantage accordé à son épouse ; que l'administration a, par suite, exclu des charges déductibles au titre des exercices clos en 2000 et 2001 la moitié des dépenses exposées par la société AAAB POMPES FUNEBRES RIVE GAUCHE au titre des loyers, charges locatives et assurances se rapportant audit appartement ; que la société requérante ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que l'avantage en nature accordé à Mme A a été comptabilisé explicitement au soutien de son moyen tendant à la décharge des suppléments d'imposition résultant de l'avantage en nature accordé à M. A, dont il n'est pas contesté qu'il n'a jamais été comptabilisé en tant que tel ; que l'administration apporte la preuve qui lui incombe de la réalité de l'avantage en nature accordé à M. A, en soutenant sans être utilement contredite que l'appartement en cause a constitué la résidence principale parisienne de M. et Mme A et de leurs enfants et que le bail de location ne faisait mention que d'un usage d'habitation ; que si la société requérante soutient que la moitié de la surface de l'appartement était utilisée à titre professionnel, au motif qu'elle a elle-même pris ce local à bail, que le siège de la société ne permettait pas la bonne exécution de certaines prestations nécessitant un environnement prestigieux, que l'usage du local à titre professionnel a été admis par son propriétaire, enfin que des plaintes ont été formulées en raison de nuisances occasionnées lors d'expositions de cercueils, elle ne l'établit pas en se bornant à produire l'étude d'évaluation des locaux de son siège social situé rue de la Pompe à Paris et des copies de lettres qui auraient été adressées à ses clients, les invitant à se rendre à l'appartement pour l'organisation d'obsèques, sans preuve qu'elles ont bien été adressées aux clients mentionnés ; que la requérante, ainsi que le relève le ministre, n'a par ailleurs pas produit les pièces annoncées se rapportant à la possibilité d'un usage professionnel de l'appartement ou aux plaintes des voisins de M. et Mme A ; qu'ainsi, en estimant que l'utilisation de l'appartement par M. et Mme A était privative pour la totalité de sa surface et en en déduisant que M. A bénéficiait de la moitié de cet avantage, l'administration a fait une exacte appréciation de la valeur de l'avantage en nature reçu par M. A au cours de chacune des années d'imposition, sans que la société requérante puisse utilement faire valoir que l'administration aurait méconnu les dispositions de l'article 215 du code civil ou le principe de l'imposition commune des époux ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : -1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire (...) 2° (...) les amortissements réellement effectués par l'entreprise, dans la limite de ceux qui sont généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation et compte tenu des dispositions de l'article 39 A, y compris ceux qui auraient été différés au cours d'exercices antérieurs déficitaires, sous réserve des dispositions de l'article 39 B (...) - 5. Sont également déductibles les dépenses suivantes : (...) b. Les frais de voyage et de déplacements exposés par ces personnes ; c. Les dépenses et charges afférentes aux véhicules et autres biens dont elles peuvent disposer en dehors des locaux professionnels ; d. Les dépenses et charges de toute nature afférentes aux immeubles qui ne sont pas affectés à l'exploitation ; (...) f. Les frais de réception, y compris les frais de restaurant et de spectacles (...) Les dépenses ci-dessus énumérées peuvent également être réintégrées dans les bénéfices imposables dans la mesure où elles sont excessives et où la preuve n'a pas été apportée qu'elles ont été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise ;

Considérant que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

Considérant que l'administration a réintégré dans les résultats imposables de la société AAAB POMPES FUNEBRES RIVE GAUCHE des frais de réception et des frais d'abonnement à la société des autoroutes Paris Normandie, à l'occasion de déplacements à Deauville, au motif que ces dépenses, exposées les week-ends et dans une ville où la société n'avait aucune activité, n'ont pas été engagées dans l'intérêt de la société ; que les redressements litigieux ayant été établis selon la procédure de redressement contradictoire, il appartient à l'administration d'établir que les frais en cause étaient dépourvus d'intérêt pour l'entreprise ; que le service apporte cette preuve en faisant valoir, sans être sérieusement contredit, qu'il n'a pu être établi de liens entre les convives de M. et Mme A et l'activité de la société ; que si la société requérante soutient que lesdits convives se sont comportés en apporteurs d'affaires et que les dépenses litigieuses ont été génératrices de clientèle, elle ne l'établit par aucune des pièces produites ;

Considérant, en troisième lieu, que l'administration a réintégré aux résultats imposables de la société AAAB POMPES FUNEBRES RIVE GAUCHE au titre des exercices clos en 2000 et 2001 les dotations aux amortissements se rapportant aux véhicules Chevrolet et BMW inscrits à l'actif de son bilan, au motif que l'utilisation professionnelle de ces véhicules n'était pas établie par les pièces comptables ; que la société requérante n'établit pas par les pièces produites l'utilisation professionnelle desdits véhicules ; qu'elle ne peut utilement se prévaloir de la circonstance qu'il a été établi au cours du contrôle que M. et Mme A détenaient à titre privé en 2000 et 2001 deux véhicules de tourisme, de marque Ford et Honda ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. (...) II 1. (...) la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : a) Celle qui figure sur les factures d'achat qui leur sont délivrées par leurs vendeurs (...) ; qu'aux termes de l'article 230 de l'annexe II au code général des impôts, alors en vigueur : 1. La taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens et services que les assujettis à cette taxe acquièrent ou qu'ils se livrent à eux-mêmes n'est déductible que si ces biens et services sont nécessaires à l'exploitation (...) ;

Considérant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que la société ne justifie pas avoir exposé les dépenses d'acquisition du véhicule de marque BMW susmentionné pour les besoins de son exploitation ; que dès lors, c'est à bon droit que l'administration a refusé la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé ces dépenses ; que s'agissant du véhicule inscrit en immobilisation le 30 novembre 2001, il n'est pas contesté que cette acquisition a été annulée par la société qui a constaté la sortie du véhicule de son bilan au 31 décembre 2001 et a porté la taxe sur la valeur ajoutée initialement déduite au passif du bilan dans le compte taxe sur la valeur ajoutée à reverser ; que le reversement de ladite taxe n'ayant pas été opéré au 31 décembre 2001, c'est à bon droit que le service a procédé au rappel de la taxe sur la valeur ajoutée initialement déduite, la requérante ne pouvant utilement se prévaloir d'un usage professionnel du véhicule en cause ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société AAAB POMPES FUNEBRES RIVE GAUCHE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la société AAAB POMPES FUNEBRES RIVE GAUCHE la somme au demeurant non chiffrée qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société AAAB POMPES FUNEBRES RIVE GAUCHE est rejetée.

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N° 10PA00804


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA00804
Date de la décision : 06/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales - Détermination du bénéfice imposable.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables - Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : M. LERCHER
Rapporteur ?: Mme Françoise VERSOL
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : ZAMORA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-07-06;10pa00804 ?
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