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02/05/2011 | FRANCE | N°10PA06035

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 02 mai 2011, 10PA06035


Vu la requête, enregistrée le 23 décembre 2010, présentée pour M. Francisco B et Mlle Cornellie A, demeurant ensemble ..., par Me Lamine ; M. B et Mlle A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002177/6 en date du 17 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés du 24 mars 2010 par lequel le préfet du Val-de-Marne leur a refusé la délivrance d'un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler les arrêtés préfector

aux susmentionnés du 24 mars 2010 ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, à l'autorité ...

Vu la requête, enregistrée le 23 décembre 2010, présentée pour M. Francisco B et Mlle Cornellie A, demeurant ensemble ..., par Me Lamine ; M. B et Mlle A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002177/6 en date du 17 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés du 24 mars 2010 par lequel le préfet du Val-de-Marne leur a refusé la délivrance d'un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler les arrêtés préfectoraux susmentionnés du 24 mars 2010 ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, à l'autorité préfectorale de leur délivrer un titre de séjour ou une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou à défaut de lui enjoindre de réexaminer leurs demandes sous les mêmes conditions ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu les décisions en date du 25 novembre 2010 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris, accordant à M. B et à Mlle A le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale dans le cadre de la présente instance, à la suite de leurs demandes présentées le 16 août 2010 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le

26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 avril 2011 :

- le rapport de M. Privesse, rapporteur,

- les conclusions de Mme Seulin, rapporteur public,

- et les observations de Me Lamine, représentant M. B et Mlle A ;

Considérant que M. B et Mlle A, nés respectivement les 6 décembre 1973 et 5 juin 1980, le premier de nationalité angolaise et la seconde de nationalité congolaise, ont saisi par une même demande le Tribunal administratif de Melun, sollicitant l'annulation des deux arrêtés du 27 mars 2010 du préfet du Val-de-Marne leur ayant refusé la délivrance d'un titre de séjour, en assortissant ces refus d'obligations de quitter le territoire français ; que par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté la demande ; que par leur requête, les intéressés relèvent régulièrement appel du jugement susmentionné du Tribunal administratif de Melun, sur les deux fondements de l'atteinte portée à leur vie privée et familiale en France, et de l'existence de considérations humanitaires et de motifs exceptionnels quant à la demande de délivrance d'un titre en qualité de salarié de M. B ;

Sur la recevabilité du recours de Mlle A :

Considérant que, si la demande présentée devant le Tribunal administratif de Melun a été présentée conjointement par M. B et Mlle A, elle aurait dû faire l'objet de deux demandes distinctes ; que dès lors, ce litige n'a été pris en compte par le tribunal qu'au titre de la demande de M. B, laquelle présentait en outre un moyen relatif à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de son activité professionnelle et de motifs exceptionnels ; que par suite, les conclusions de la requête, à nouveau conjointe devant la Cour, présentée par Mlle A ne peuvent qu'être rejetés pour irrecevabilité de sa demande de première instance ;

Sur la requête présentée par M. B :

Sur le défaut de motivation :

Considérant que l'arrêté litigieux concernant M. B comporte dans ses visas et ses motifs, s'agissant de la demande faite en qualité de salarié, les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde et qui permettent de vérifier que l'administration préfectorale a procédé à un examen de la situation particulière de celui-ci au regard des stipulations et des dispositions législatives et réglementaires applicables ; que par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que cette décision serait insuffisamment motivée ;

Sur la demande de titre de séjour en qualité de salarié :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable : la carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. La commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour exprime un avis sur les critères d'admission exceptionnelle au séjour mentionnés au premier alinéa (...) ;

Considérant qu'il ressort des termes mêmes de cet article qu'il appartient à l'étranger de faire valoir les motifs exceptionnels justifiant que lui soit octroyé un titre de séjour salarié sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 ; qu'il ressort des pièces du dossier, que M. B a sollicité son admission exceptionnelle au séjour en application des dispositions susmentionnées de l'article L. 313-14, en produisant une promesse d'embauche du 24 novembre 2009 en qualité d'employé de nettoyage de véhicules, ainsi qu'une demande d'autorisation de travail pour un salarié étranger du 25 novembre 2010, et fait valoir que la situation de l'emploi est un des éléments que l'autorité préfectorale peut prendre en considération pour délivrer un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions ; que le secteur dans lequel il souhaite travailler est en manque de main d'oeuvre ; que toutefois, ces circonstances ne sont pas de nature à établir que son admission au séjour se justifierait au regard de motifs exceptionnels, alors qu'un tel emploi ne figure pas, en tout état de cause, sur la liste des métiers régionaux annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008, pris pour l'application des dispositions du troisième alinéa du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour lesquels la situation locale de l'emploi n'est pas opposable aux étrangers ; qu'ainsi, et alors qu'en outre la demande d'autorisation de travail a été faite postérieurement à la décision litigieuse, le préfet, qui n'a pas commis d'erreur en motivant son refus par la circonstance que la liste susmentionnée ne vise pas l'emploi dont s'agit, n'était pas tenu de transmettre la promesse d'embauche au directeur départemental du travail et de l'emploi, conformément aux articles L. 5221-2 et R. 5221-20 du code du travail, et n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle du requérant en estimant de ce fait que l'intéressé ne pouvait se prévaloir utilement d'un motif exceptionnel justifiant la délivrance d'un titre de séjour portant la mention salarié ;

Sur le droit du requérant au respect de leur vie privée et familiale :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; et qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : ... 7° à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée... ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B est entré irrégulièrement en France en 2001, selon ses déclarations, sans toutefois en justifier ; qu'à l'exception de ses enfants nés en France en 2006 et 2009, il ne dispose d'aucune attache familiale en France alors qu'il conserve des attaches familiales fortes dans son pays d'origine ; qu'il n'établit pas en outre être dans l'impossibilité de reconstituer sa cellule familiale dans ce même pays d'origine, en faisant simplement état de craintes quant à la sécurité y régnant, et alors que ses enfants sont encore en bas âge ; qu'au surplus, il ne rapporte la preuve ni de son intégration, ni de sa résidence en France avant l'année 2005 ; que par suite, le moyen tiré par M. B, de ce que le refus de titre de séjour litigieux porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par ladite décision et méconnaîtrait dès lors les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ;

Sur la violation de la Convention internationale relative aux droits des enfants :

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'aux termes de l'article 9-1 de la même convention : Les États parties veillent à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré, à moins que les autorités compétentes ne décident, sous réserve de révision judiciaire et conformément aux lois et procédures applicables, que cette séparation est nécessaire dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Une décision en ce sens peut être nécessaire dans certains cas particuliers, par exemple lorsque les parents maltraitent ou négligent l'enfant, ou lorsqu'ils vivent séparément et qu'une décision doit être prise au sujet du lieu de résidence de l'enfant ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que M. B soutient que la décision litigieuse lui refusant un titre de séjour porte atteinte à l'intérêt supérieur de ses deux enfants mineurs qui sont susceptibles de se retrouver éloignés de l'un au moins de leurs parents ; qu'il ressort cependant des pièces du dossier, qu'ils ne sont pas de nationalité française mais de la nationalité de leur père ou mère ; que la décision litigieuse n'a ni pour objet ni pour effet de séparer l'un d'eux de leurs enfants en bas âge ; qu'au surplus, le requérant n'établit pas l'impossibilité de reconstruire la vie familiale dans son pays d'origine, ou dans tout autre où il serait également admis, en étant accompagné de ses enfants ; que par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations précitées de la convention relative aux droits de l'enfant, doit être écarté ;

Considérant enfin que la circonstance que la présence en France de M. B ne constituerait pas une menace à l'ordre public, de même que celle qu'il invoque suivant laquelle il disposerait d'un logement et qu'il respecterait les lois de la République, sont sans incidence sur la légalité de l'arrêté litigieux ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que par voie de conséquence, les conclusions de la requête de M. B tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour, ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ; qu'il y a lieu également de rejeter les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'étant pas la partie perdante au litige ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B et Mlle A est rejetée.

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N° 10PA06035


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA06035
Date de la décision : 02/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ROTH
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PRIVESSE
Rapporteur public ?: Mme SEULIN
Avocat(s) : LAMINE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-05-02;10pa06035 ?
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