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28/04/2011 | FRANCE | N°10PA02405

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 28 avril 2011, 10PA02405


Vu la requête, enregistrée le 14 mai 2010, présentée pour la SOCIETE CPC, dont le siège est 23 avenue Gustave Eiffel zone industrielle la Marinière à Bondoufle (91070), par Me Maréchal ; la SOCIETE CPC demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0614900/6-2 en date du 16 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 1er décembre 2004 par laquelle la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée a refusé de lui accorder le bénéfice

du dispositif de désendettement en faveur des rapatriés ;

2°) d'annuler, p...

Vu la requête, enregistrée le 14 mai 2010, présentée pour la SOCIETE CPC, dont le siège est 23 avenue Gustave Eiffel zone industrielle la Marinière à Bondoufle (91070), par Me Maréchal ; la SOCIETE CPC demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0614900/6-2 en date du 16 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 1er décembre 2004 par laquelle la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée a refusé de lui accorder le bénéfice du dispositif de désendettement en faveur des rapatriés ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) de mettre en la cause la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée, le chef du service central des rapatriés, le chef du bureau des archives centrales et le ministre de l'emploi et de la solidarité ;

4°) d'enjoindre à la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée et au Premier ministre de réexaminer sa demande ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 61-1439 du 26 décembre 1961 relative à l'accueil et à la réinstallation des Français d'outre-mer ;

Vu la loi de finances rectificative n° 86-1318 du 30 décembre 1986, notamment son article 44 modifié ;

Vu le décret n° 99-469 du 4 juin 1999 relatif au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 avril 2011 :

- le rapport de Mme Renaudin, rapporteur,

- et les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SOCIETE CPC a sollicité le bénéfice du dispositif de désendettement instauré en faveur des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée prévu par le décret n° 99-469 du 4 juin 1999 par une demande déposée en mars 1999, puis en janvier 2002 ; que, par une décision en date du 1er décembre 2004, la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée a déclaré sa demande inéligible à ce dispositif ; que, par un courrier du 10 juin 2005, la SOCIETE CPC a formé auprès du Premier ministre le recours préalable obligatoire prévu par l'article 12 du décret précité à l'encontre de la décision de la commission nationale de désendettement des rapatriés ; que la SOCIETE CPC relève appel du jugement du 16 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande qu'il a regardée comme tendant à l'annulation de la décision susmentionnée de la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée, mais également dirigée contre la décision implicite par laquelle le Premier ministre a rejeté le recours administratif qu'elle avait formé à l'encontre de ladite décision ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société requérante a dans sa requête de première instance soulevé plusieurs moyens tirés notamment de l'irrégularité de la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée, de l'application illégale de circulaires par l'administration, du refus de délivrance d'une attestation de rapatriement par le service central des rapatriés ; que le tribunal administratif n'a pas visé les moyens ainsi présentés et n'y a pas répondu ; que son jugement a, dès lors, été rendu dans des conditions irrégulières et doit, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens relatifs à la régularité du jugement attaqué, être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SOCIETE CPC devant le tribunal administratif ;

Sur la demande de mise en la cause de diverses autorités :

Considérant que si la société requérante fait valoir que notamment le chef du service central des rapatriés, le chef du bureau des archives centrales et le ministre de la solidarité, dont dépendent les bureaux précédents, n'ont pas été mis en cause, il ressort des termes de la requête présentée en première instance, comme de la requête d'appel, que seule la décision de la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée, à laquelle s'est substituée celle du Premier ministre, est contestée ; qu'eu égard aux conclusions et à l'objet de la requête, alors que la société requérante ne conteste pas la décision du chef du service central des rapatriés, seul le Premier ministre est défendeur à l'instance ;

Considérant que les dispositions de l'article 12 du décret du 4 juin 1999 instituant un recours administratif, préalable obligatoire à la saisine du juge, la décision prise à la suite du recours se substitue nécessairement à la décision initiale ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que la décision implicite par laquelle le Premier ministre avait rejeté le recours à caractère obligatoire formé par la SOCIETE CPC s'était substituée à celle de la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée et qu'en tant qu'elles étaient dirigées contre cette dernière décision, les conclusions de la SOCIETE CPC étaient donc irrecevables ; que, dès lors, la SOCIETE CPC n'est pas fondée à demander que la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée soit appelée en la cause dans la présente instance ;

Sur la légalité de la décision du Premier ministre :

Considérant que la décision implicite du Premier ministre rejetant le recours administratif formé par l'intéressée s'étant substituée à la décision initiale de la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée, les moyens tirés de l'irrégularité de la commission en ce qu'elle aurait été instituée par un décret et non par la loi et du défaut de motivation de la décision de cette commission ne peuvent être utilement invoqués à l'encontre de la décision du Premier ministre, dans la mesure où il s'agit de vices propres à la décision initiale qui ont nécessairement disparu avec elle ;

Considérant que le moyen tiré de ce que les associés de la société n'auraient pas obtenu, en raison d'une procédure discriminatoire, une attestation de rapatriement du service central des rapatriés, est inopérant à l'encontre de la décision de la commission et de celle du Premier ministre, le refus de ce service n'ayant pu avoir d'incidence sur ces décisions dès lors lesdits associés n'ont pas la qualité de rapatrié au sens des dispositions du décret du 4 juin 1999 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 26 décembre 1961 susvisée : Les Français, ayant dû ou estimé devoir quitter, par suite d'évènements politiques, un territoire où ils étaient établis et qui était antérieurement placé sous la souveraineté, le protectorat ou la tutelle de la France, pourront bénéficier de la solidarité nationale affirmée par le préambule de la constitution de 1946, dans les conditions prévues par la présente loi. / Cette solidarité se manifeste par un ensemble de mesures de nature à intégrer les Français rapatriés dans les structures économiques et sociales de la nation. / Ces mesures consisteront, en particulier, à accorder aux rapatriés des prestations de retour, des prestations temporaires de subsistance, des prêts à taux réduit et des subventions d'installation et de reclassement, des facilités d'accès à la profession et d'admission dans les établissements scolaires, des prestations sociales, ainsi que des secours exceptionnels. ; qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 99-469 du 4 juin 1999 susvisé : Il est institué un dispositif de désendettement au bénéfice des personnes mentionnées à l'article 2 qui, exerçant une profession non salariée ou ayant cessé leur activité professionnelle ou cédé leur entreprise, rencontrent de graves difficultés économiques et financières, les rendant incapables de faire face à leur passif. ; qu'aux termes de l'article 2 de ce décret : Bénéficient des dispositions du présent décret les personnes appartenant à l'une des deux catégories suivantes : / 1° Personnes mentionnées au I de l'article 44 de la loi de finances rectificative pour 1986 ; (...) ; qu'aux termes de l'article 44 de la loi de finances rectificative pour 1986 dans sa rédaction issue de l'article 62 de la loi de finances rectificative pour 2000 n° 2000-1353 du 30 décembre 2000 : I. - Les sommes restant dues au titre des prêts accordés aux rapatriés avant le 31 mai 1981 par des établissements de crédit ayant passé convention avec l'Etat sont remises en capital, intérêts et frais. Peuvent bénéficier de cette mesure : / - les Français rapatriés tels qu'ils sont définis à l'article 1er de la loi n° 61-1439 du 26 décembre 1961 relative à l'accueil et à la réinstallation des Français d'outre-mer, installés dans une profession non salariée ; (...) / - les enfants de rapatriés, mineurs au moment du rapatriement, qui ont repris une exploitation pour laquelle leurs parents avaient obtenu l'un des prêts mentionnés ci-dessous ; / - les sociétés industrielles et commerciales dont le capital est détenu par les rapatriés définis à l'article 1er de la loi n° 61-1439 du 26 décembre 1961 précitée, à concurrence de 51%, si la société a été créée avant le 15 juillet 1970, ou de 90%, si la société a été constituée après cette date. / - les sociétés civiles d'exploitation agricole et les sociétés civiles immobilières pour lesquelles la répartition du capital ou des droits aux résultats d'exploitation répondent aux conditions prévues à l'alinéa précédent. ; que l'article 3 du décret du 4 juin 1999 institue une commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée qui statue selon l'article 8 sur l'éligibilité des dossiers constitués par les personnes estimant appartenir à l'une des catégories mentionnées à l'article 2 ;

Considérant que pour déclarer inéligible la demande de la SOCIETE CPC, la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée a considéré qu'elle ne justifiait pas d'un capital social détenu à plus de 90% par des rapatriés tels que définis à l'article 1er de la loi du 26 décembre 1961 ni n'apportait la preuve de son appartenance à une des catégories de bénéficiaires définies à l'article 2 du décret du 4 juin 1999 ; que le Premier ministre doit être regardé comme s'étant approprié ce motif, en rejetant implicitement le recours préalable de la requérante ;

Considérant que si en tant que société industrielle et commerciale, la SOCIETE CPC pouvait prétendre au bénéfice du dispositif de désendettement institué par le décret du 4 juin 1999, il fallait pour cela qu'en application de l'article 44 de la loi de finances rectificative pour 1986, son capital soit détenu par des rapatriés à concurrence de 90%, cette société ayant été constituée le 16 novembre 1988 ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des statuts de la SOCIETE CPC, que le capital social de cette dernière est réparti entre M. Jean-Luc , né le 12 mai 1951 au Maroc, à raison de 165 parts, soit 33% de la totalité, et la SCI La Serterie ; que cette dernière SCI est constituée depuis 1985 entre les six enfants de M. Martin , rapatrié du Maroc, dont notamment M. Jean-Luc ; que tous les enfants de M. Martin étaient mineurs au moment du rapatriement ; qu'ils n'ont donc pas la qualité de rapatriés tels que définis à l'article 1er précité de la loi du 26 décembre 1961 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, contrairement à ce que soutient la société requérante, que l'administration n'ait pas pris en compte la circonstance que la SCI La Serterie était composée par les enfants de M. Martin et que lui même en détenait 85% des parts ; qu'en tout état de cause la SCI La Serterie ne détenant que 67% du capital social de la société requérante, l'erreur de fait alléguée par cette dernière ne peut avoir d'incidence sur la décision contestée, le critère de 90% de la détention du capital par des rapatriés n'étant en l'espèce pas rempli ; que dès lors, c'est sans commettre d'erreur de droit que le Premier ministre a refusé de réformer la décision du 1er décembre 2004 de la commission ; qu'il n'est pas établi, ni même allégué, que si M. Martin a lui la qualité de rapatrié, ses enfants auraient repris son exploitation, notamment au titre de la SOCIETE CPC ; que, par suite, en rejetant la demande de cette société, au motif qu'elle n'entrait pas dans la catégorie des bénéficiaires du dispositif prévu par le décret du 4 juin 1999, le Premier ministre n'a pas méconnu les dispositions des articles 1er et 2 dudit décret ; que si, au demeurant, la société requérante soutient que la commission se fonde sur huit catégories de citoyens, elle n'apporte aucune précision permettant à la Cour d'apprécier le bien-fondé de ses allégations alors que, comme il a été dit, il ressort des termes de la décision de la commission que celle-ci a rejeté la demande de la société requérante comme n'entrant pas dans les catégories définies à l'article 2 du décret du 4 juin 1999 ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 44 de la loi de finances rectificative pour 1986 que cette loi opère elle-même une distinction entre les Français rapatriés tels qu'ils sont définis à l'article 1er de la loi n° 61-1439 du 26 décembre 1961 et les enfants de rapatriés, mineurs au moment du rapatriement ; que contrairement à ce que soutient la société requérante, le décret du 4 juin 1999 ne restreint pas, contre la volonté du législateur, la notion de Français rapatrié en ne l'ouvrant pas aux mineurs au moment des faits ; que la décision contestée ne contrevient pas ainsi au principe de solidarité nationale ; qu'en considérant que les enfants de M. Martin n'avaient pas la qualité de rapatriés au sens de l'article 1er de la loi du 26 décembre 1961 et sans porter atteinte à leur citoyenneté française, laquelle ne suffit pas à elle seule à permettre la reconnaissance du statut de rapatrié, l'administration n'a par ailleurs commis aucune discrimination, la société requérante ne pouvant au demeurant utilement invoquer les dispositions du code pénal ;

Considérant que si la société requérante soutient que la décision en cause fait illégalement application de circulaires inopposables, ladite décision a été prise, comme il a été indiqué, sur le seul fondement du décret n° 99-469 du 4 juin 1999 ; qu'il suit de là que ce moyen est inopérant ;

Considérant que si la société requérante fait valoir que la décision contestée porterait atteinte aux droits de la défense en violation de l'article 6 1° de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elle n'apporte aucune précision permettant à la Cour d'apprécier le bien-fondé de ses allégations ; qu'en tout état de cause la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée, lorsqu'elle se prononce sur les demandes d'admission au dispositif de désendettement institué par le décret du 4 juin 1999, ne dispose d'aucune compétence juridictionnelle ; qu'il en est de même pour le Premier ministre lorsqu'il se prononce sur un recours gracieux formé à l'encontre de ladite décision ; que le moyen tiré de ce que la décision de la commission susmentionnée méconnaîtrait les stipulations de l'article 6 1° de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est donc inopérant ;

Considérant que le moyen tiré de ce que la société requérante a subi un préjudice du fait de l'attitude de l'administration est inopérant au soutien de conclusions présentées en excès de pouvoir ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE CPC n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision par laquelle le Premier ministre a rejeté son recours gracieux à l'encontre de la décision du 1er décembre 2004 de la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée refusant de lui accorder le bénéfice du dispositif de désendettement en faveur des rapatriés ; que, le présent arrêt n'impliquant aucune mesure d'exécution, les conclusions de la requête tendant à ce qu'il soit enjoint à la commission et au Premier ministre de réexaminer sa demande doivent également être rejetées, de même que celles visant à mettre à la charge de l'Etat le versement de frais irrépétibles ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 16 mars 2010 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la SOCIETE CPC devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.

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N° 10PA02405


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA02405
Date de la décision : 28/04/2011
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme Mathilde RENAUDIN
Rapporteur public ?: M. JARRIGE
Avocat(s) : SCP D'AVOCAT MAURICE MARECHAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-04-28;10pa02405 ?
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