Vu la requête, enregistrée le 6 octobre 2009, présentée pour Mme Badia A, demeurant ...), par Me Jovy ; Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0902967/5 en date du 15 juillet 2009 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 18 mars 2009 par lequel le préfet du Val-de-Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée ;
2°) d'annuler la décision du 18 mars 2009 par laquelle le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;
3°) d'annuler la décision du 18 mars 2009 par laquelle le préfet du Val-de-Marne l'a obligée à quitter le territoire français ;
4°) à titre principal, si l'arrêté est annulé pour un vice de légalité interne, de prescrire au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour temporaire d'un an, dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
5°) à titre subsidiaire, si l'arrêté est annulé pour un vice de légalité externe, de prescrire au préfet du Val-de-Marne de prendre à nouveau une décision sur sa demande de titre de séjour temporaire, dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 février 2011 :
- le rapport de M. Piot, rapporteur,
- les conclusions de Mme Descours-Gatin, rapporteur public,
- et les observations de Me Guincestre, représentant Mme A ;
Considérant que Mme A, de nationalité marocaine, doit être regardée comme ayant, le 24 février 2009, sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par un arrêté en date du 18 mars 2009, le préfet du Val-de-Marne a opposé un refus à sa demande de titre de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ; que Mme A fait appel du jugement en date du 15 juillet 2009 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêt attaqué : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) ;
Considérant que Mme A soutient sans être contredite qu'elle est entrée en France en 1983, qu'elle a, en usant de documents falsifiés, obtenu une carte d'identité française, qu'elle est mère de cinq enfants nés et scolarisés en France ; que pour démontrer sa présence en France depuis plus de dix ans, elle produit des documents établis à son nom d'emprunt ; que le préfet du Val-de-Marne indique dans la motivation de l'arrêté attaqué que, depuis l'arrêt de la Cour d'appel de Paris en date du 12 décembre 1999 confirmant un jugement du Tribunal de grande instance de Créteil du 2 mars 1999 refusant à l'intéressée la délivrance d'un nouveau certificat de nationalité française et constatant son extranéité ainsi que celle de ses enfants, elle a continué pendant dix ans à user de sa carte d'identité française indûment obtenue et qu'elle n'a pas restituée ; qu'ainsi, il ressort des pièces du dossier que l'intéressée résidait en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué ; que, par suite, Mme A est fondée à soutenir que le préfet du Val-de-Marne a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ne saisissant pas la commission du titre de séjour avant de refuser son admission à titre exceptionnelle au séjour ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 18 mars 2009 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, la décision du même jour l'obligeant à quitter le territoire français et celle fixant le pays de destination de son éloignement ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ... prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; et qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ; qu'il y a lieu, par application de ces dispositions, et alors qu'aucun des moyens de légalité interne développés par la requérante n'apparaît, en l'état du dossier, de nature à conduire à l'annulation de l'arrêté préfectoral contesté, d'enjoindre simplement au préfet du Val-de-Marne de procéder au réexamen de la situation de Mme A au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de prendre, dans le délai maximum de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, une nouvelle décision dûment motivée après avis de la commission du titre de séjour ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 800 euros au titre des frais exposés par Mme A et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement susvisé en date du 15 juillet 2009 du Tribunal administratif de Melun et l'arrêté du préfet du Val-de-Marne en date du 18 mars 2009 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-de-Marne de procéder au réexamen de la situation de Mme A au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de prendre une nouvelle décision dûment motivée après avis de la commission du titre de séjour des étrangers, dans un délai maximum de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Le préfet tiendra le greffe (service de l'exécution) immédiatement informé des décisions prises en vertu de la présente injonction.
Article 3 : L'Etat versera à Mme A la somme de 800 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
Article 4 : Le surplus des conclusions de Mme A est rejeté.
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N° 09PA05912