La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/01/2011 | FRANCE | N°10PA00329

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 18 janvier 2011, 10PA00329


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 janvier et 4 mars 2010, présentés par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0912093 en date du 16 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé son arrêté en date du 17 juin 2009 refusant à Mlle Malika A l'admission exceptionnelle au séjour et l'obligeant à quitter le territoire français, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressée une carte de séjour portant la mention vie privée et familiale ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mlle A devant le Tribunal administratif de...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 janvier et 4 mars 2010, présentés par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0912093 en date du 16 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé son arrêté en date du 17 juin 2009 refusant à Mlle Malika A l'admission exceptionnelle au séjour et l'obligeant à quitter le territoire français, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressée une carte de séjour portant la mention vie privée et familiale ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mlle A devant le Tribunal administratif de Paris ;

........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 janvier 2011 :

- le rapport de M. Dellevedove, rapporteur,

- les conclusions de Mme Descours-Gatin, rapporteur public,

- et les observations de Me Mendel-Riche, pour Melle A ;

Considérant que Mlle A, de nationalité marocaine, née le 1er janvier 1967, a déclaré être entrée en France le 14 mai 2004 munie d'un visa de court séjour ; qu'elle a sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le PREFET DE POLICE fait appel du jugement en date du 16 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 17 juin 2009 refusant de délivrer à l'intéressée le titre de séjour sollicité, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite, et a enjoint à l'administration de lui délivrer une carte de séjour portant la mention vie privée et familiale ;

Sur les conclusions du PREFET DE POLICE :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du même code : La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2 (...) ; qu'aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail, qui s'est substitué à l'article L. 341-2 de ce code : Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ; qu'aux termes de l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse : La situation de l'emploi ou l'absence de recherche préalable de candidats déjà présents sur le marché du travail n'est pas opposable à une demande d'autorisation de travail présentée pour un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse souhaitant exercer une activité professionnelle dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur la liste annexée au présent arrêté ; qu'en présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14, il appartient à l'autorité administrative de vérifier s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention salarié ou travailleur temporaire ; que, dans cette hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité figurant dans la liste annexée à l'arrêté interministériel du 18 janvier 2008, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des motifs exceptionnels exigés par la loi ; qu'il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et recensés comme tels dans l'arrêté du 18 janvier 2008, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que, par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ;

Considérant que Mlle A faisait valoir devant les premiers juges sa formation, la promesse d'embauche dont elle était titulaire en qualité d'assistante de vie et les difficultés que son employeur potentiel, époux de la personne atteinte d'une maladie neuro-dégénérative et invalide à 80 %, qu'elle assiste depuis son entrée en France, a rencontrées pour recruter une autre personne pour cette fonction ; qu'elle est parfaitement intégrée à la société française et notamment à la cellule familiale de son employeur avec lequel, à l'instigation de celui-ci, elle a par ailleurs constitué une société civile immobilière afin d'assurer la stabilité de sa situation matérielle en France ; qu'il ressort des pièces du dossier que, d'une part, Mlle A a demandé la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention salarié sans être titulaire du visa de long séjour exigé par les dispositions de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a considéré qu'elle était saisie d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 précité ; que, d'autre part, l'intéressée ne justifie avoir effectivement assisté l'épouse de son employeur que depuis juin 2008 et avoir suivi une formation spécialisée à cette fin d'une durée de seulement 20 heures ; que, si son employeur produit en appel les attestations de ses démarches auprès de l'ANPE, il ressort des pièces du dossier qu'il a effectivement obtenu de nombreuses candidatures ; que le métier d'assistante de vie ne saurait être regardé comme un métier en tension et ne figure pas sur la liste des métiers annexés à l'arrêté susmentionné ; que l'intéressée est célibataire, sans charges de famille en France et n'est pas démunie d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu au moins jusqu'à l'âge de 37 ans et où résident ses parents et sa fratrie ; que, dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, en refusant de régulariser la situation administrative de Mlle A en faisant application des dispositions relatives à l'admission exceptionnelle au séjour, le PREFET DE POLICE n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ; que les mêmes circonstances ne sont pas davantage de nature à faire regarder l'arrêté contesté comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mlle A ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur le motif tiré de l'erreur manifeste d'appréciation pour annuler l'arrêté susvisé en date du 17 juin 2009 refusant à Mlle A le titre de séjour qu'elle avait sollicité, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée, et pour enjoindre à l'administration de délivrer à l'intéressé un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale ; que, toutefois, il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mlle A ;

Sur la légalité de l'arrêté du 17 juin 2009 :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par Mlle A ;

Considérant qu'au regard de l'obligation de motiver les refus d'autorisation, imposée par l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, le préfet, ou, à Paris, le PREFET DE POLICE doit, s'il estime devoir rejeter une demande de carte de séjour temporaire présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 40 de la loi du 20 novembre 2007, faire connaître les motifs pour lesquels ladite demande est rejetée, en indiquant les faits de l'espèce qu'il retient ou écarte ; qu'à cette fin il peut relever soit que la demande, faute de tendre à l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisée par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national, laquelle est aujourd'hui annexée à l'arrêté susmentionné du 18 janvier 2008, ne se situe pas dans le champ de l'admission exceptionnelle au séjour ainsi sollicitée, soit que les éléments de la situation personnelle du demandeur, qu'il lui appartient de préciser, tels que, par exemple, l'insuffisance de son expérience et de sa qualification professionnelles, l'absence de perspective réelle d'embauche dans l'une des activités susmentionnées, la faible durée de son séjour en France, font obstacle à ce que sa demande puisse être regardée comme relevant d'un motif exceptionnel ;

Considérant qu'il suit de là qu'en se bornant à indiquer à Mlle A, qui avait présenté à l'appui de sa demande une promesse d'embauche en qualité d'assistante de vie ainsi qu'il a été dit, qu' après un examen approfondi de sa situation, la requête de l'intéressée ne répond ni à des considérations humanitaires ni à des motifs exceptionnels et que Mlle A ne remplit aucune des conditions prévues à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile , le PREFET DE POLICE n'a pas satisfait aux exigences de la loi susvisée du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ; que, dès lors, l'arrêté litigieux en date du 12 février 2008 est entaché d'une motivation insuffisante et doit, pour ce motif, être annulé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 17 juin 2009 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction de Mlle A :

Considérant que, compte tenu de l'illégalité dont est entaché l'arrêté litigieux, le présent arrêt n'implique pas que soit délivré à Mlle A un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale mais implique seulement qu'il soit enjoint à l'autorité administrative de reprendre la procédure et de réexaminer le droit au séjour de l'intéressée et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, d'une part, que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris lui a enjoint de délivrer un titre de séjour à Mlle A ; que, d'autre part, les conclusions susvisées de la requérante qui tendent à la délivrance du titre susmentionné, ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au bénéfice de Mlle A, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Paris en date du 16 décembre 2009 est annulé en tant qu'il a enjoint au PREFET DE POLICE de délivrer à Mlle A une carte de séjour portant la mention vie privée et familiale .

Article 2 : L'Etat versera à Mlle A la somme de 1 000 (mille) euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les surplus des conclusions des parties sont rejetés.

''

''

''

''

6

N° 10PA00329

2

N° 10PA00329


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA00329
Date de la décision : 18/01/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Ermès DELLEVEDOVE
Rapporteur public ?: Mme DESCOURS GATIN
Avocat(s) : MENDEL-RICHE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-01-18;10pa00329 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award