Vu la requête, enregistrée le 2 août 2008 par télécopie et régularisée le 4 août 2010, présentée pour M. Jean-Luc A, demeurant ..., par Me Tabouret; M. A demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0210976/2 du 5 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à obtenir la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et du complément de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre des années 1996, 1997 et 1998 ;
2°) de prononcer la décharge desdites impositions supplémentaires et des pénalités y afférentes ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le nouveau code de procédure civile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 novembre 2010 :
- le rapport de M. Lercher, rapporteur,
- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,
- les observations de Me Tabouret, pour M. A,
et connaissance prise de la note en délibéré, présentée le 29 novembre 2010 par Me Tabouret pour M. A,
et connaissance prise de la note en délibéré, présentée le 30 novembre 2010 par Me Tabouret pour M. A ;
Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur les années 1996, 1997 et 1998, l'administration a réintégré dans les résultats imposables de la société Karin Models à l'impôt sur les sociétés et à la contribution à l'impôt sur les sociétés les sommes de 63 662 euros en 1996, 117 299 euros en 1997 et 133 525 euros en 1998, correspondant à des versements enregistrés dans les comptes de la société, provenant de la société de droit américain Next Time Corporation et portées au crédit du compte courant de M. A dans les écritures de la société Karin Models ; qu'à la suite de cette réintégration, l'administration, en application de l'article 109-1-1° du code général des impôts, a regardé les dites sommes comme des revenus distribués entre les mains de M. A et a rectifié les revenus imposables de ce dernier ; que l'administration a également imposé entre les mains de M. A, dans la catégories des revenus de capitaux mobiliers, des avantages en nature non déclarés à hauteur de 916 035 F en 1996, 351 719 F en 1997, 387 604 F en 1998 ; que M. A relève appel du jugement du 5 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à obtenir la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et du complément de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre des années 1996, 1997 et 1998 ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
En ce qui concerne le dialogue oral et contradictoire :
Considérant que le caractère contradictoire que doit revêtir l'examen de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu en vertu des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales interdit au vérificateur d'adresser la notification de redressements qui, selon l'article L. 48, marquera l'achèvement de son examen, sans avoir au préalable engagé un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les points qu'il envisage de retenir ; qu'en outre, dans sa version remise à M. A la charte du contribuable, rendue opposable à l'administration par l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, exige que le vérificateur ait recherché un tel dialogue avant la notification des redressements ; que la méconnaissance de cette exigence a le caractère d'une irrégularité substantielle portant atteinte aux droits et garanties reconnus par la charte du contribuable vérifié ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas contesté que M. A a eu deux entretiens avec le vérificateur les 27 avril et 30 mai 2000, qu'il n'est pas établi qu'il n'y aurait pas eu, à cette double occasion, un dialogue contradictoire sur les motifs des redressements envisagés à l'encontre de M. A ; qu'en particulier M. A n'établit pas qu'il n'aurait pas été mis à même de discuter avec le vérificateur des redressements envisagés de son revenu imposable consécutivement à la vérification de comptabilité de la société Karin Models ;
En ce qui concerne les informations obtenues auprès d'un tiers :
Considérant qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure de redressement mise en oeuvre, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements recueillis dans l'exercice de son droit de communication et qu'elle a effectivement utilisés pour procéder aux redressements, afin que l'intéressé ait la possibilité de demander, avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent, que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition ; qu'il résulte de l'instruction et qu'il ressort des indications portées sur les notifications de redressements du 17 décembre 1999 pour l'année 1996 et du 20 décembre 2000 pour les années 1997 et 1998, que les renseignements sur lesquels s'est fondée l'administration pour procéder aux rehaussements contestés avait pour origine les déclarations et les écritures comptables de la société Karin Models ; que M. A, avait donc la possibilité de demander au service la communication des documents contenant ces renseignements ;
Considérant qu'en raison de l'indépendance des procédures de redressement menées à l'encontre de la société à responsabilité limitée Karin Models, d'une part et de M. A, son gérant et associé, d'autre part, ce dernier ne saurait utilement invoquer, au soutien de sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignés, et ainsi qu'en a jugé à bon droit le tribunal administratif, l'irrégularité, à la supposer établie, de la procédure de vérification de ladite société, tirée de ce qu'au cours de cette procédure elle n'aurait pas eu communication de la réponse des autorités fiscales américaines à la demande d'assistance française ; que dès lors que ce document a été porté dans le débat entre les parties dans le cadre de la procédure contentieuse, le tribunal administratif pouvait, sans entacher son jugement de contradiction de motif, s'y référer ;
Sur le bien fondé des impositions :
En ce qui concerne la prescription :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. ; que l'article L. 189 du même livre dispose que : la prescription est interrompue par la notification d'une proposition de redressement, par la déclaration ou la notification d'un procès-verbal, de même que par tout acte comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous les autres actes interruptifs de droit commun ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la notification de redressements du 17 décembre 1999, concernant le seul impôt sur le revenu de l'année 1996, a fait l'objet d'un envoi postal recommandé qui a été présenté le 3 janvier 2000 et retiré le 4 janvier 2000 ; qu'auparavant deux tentatives de signification par huissier ont été faites le 28 et le 30 décembre 1999, à l'adresse déclarée par le requérant : ... la première mentionnant notification de redressements formulaire n° 2120 SD établie en date du 23 décembre 1999 sur 20 feuilles , et la seconde notification ; que M. A fait valoir que ces procès-verbaux dressés en application de l'article 659 du nouveau code de procédure civile, n'avaient pas pour objet, eu égard aux mentions faisant foi jusqu'à preuve contraire qu'ils comportent, la notification de redressements du 17 décembre 1999, laquelle ne lui a été notifiée que le 4 janvier 2000, après l'expiration du délai de reprise visé à l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, intervenue le 31 décembre 1999 ;
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 651 du nouveau code de procédure civile les actes sont portés à la connaissance des intéressés par la notification, qui peut revêtir, alors même que la loi ne l'aurait prévue, la forme d'une signification faite par voie d'huissier de justice ; qu'aux termes de l'article 653 du même code : La date de la signification d'un acte d'huissier de justice est celle du jour où elle est faite à personne, à domicile, à résidence, au parquet ou, dans le cas mentionné à l'article 659, celle de l'établissement du procès verbal. ; que l'article 659 du même code précise sur ce point que : lorsque la personne à qui l'acte doit être signifié n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, l'huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu'il a accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte.... ; qu'enfin, l'article 655 dispose : L'huissier de justice doit laisser, dans tous ces cas, au domicile ou à la résidence du destinataire, un avis de passage daté l'avertissant de la remise de la copie et mentionnant la nature de l'acte, le nom du requérant ainsi que les indications relatives à la personne à laquelle la copie a été remise. ;
Considérant que, si l'acte de l'huissier instrumentaire du 28 décembre 1999 indique qu'il laisse copie à M. A d'un document, et mentionne, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, une notification de redressements en date du 23 décembre 1999, l'acte du même huissier du 30 décembre 1999, qui vise l'article 659 du nouveau code de procédure civile, mentionne qu'il n'a pu remettre le document dont il était chargé, désigné par lui notification et qu'il l'a expédié par lettre recommandée avec accusé de réception le même 30 décembre 1999 ; qu'il n'est pas contesté que le courrier dont il a été accusé réception le 4 janvier 2000 avait pour expéditeur ce même huissier instrumentaire et que le pli contenait la notification de redressements du 17 décembre 1999 qui comportait vingt feuilles ; que par suite, nonobstant l'indication erronée sur la date commise par l'huissier lors de la tentative de signification du 28 décembre 1999, la tentative de signification du 30 décembre 1999 doit être regardée comme ayant eu pour objet la remise à M. A de la notification de redressements du 17 décembre 1999 concernant son impôt sur le revenu de l'année 1996 ; qu'ainsi, les redressements dont s'agit ont été régulièrement notifiés le 30 décembre 1999 ;
En ce qui concerne les avantages en nature :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Karin Models avait comptabilisé en charge de frais de mission et de restauration, au nom de M. A, des sommes qui n'ont pas été admises comme remboursement de frais par l'administration à hauteur de 916 035 F en 1996, 351 719 F en 1997, 387 604 F en 1998 ; que M. A soutient que l'importance de ses frais de mission s'explique par la nature même de son travail, lequel consistait en la recherche de mannequins et que ces frais ont un lien avec l'objet de la société Karin Models et avec la mission qui lui était impartie au sein de la société ; qu'il n'apporte toutefois à ces allégations sur le caractère professionnel de sa fréquentation des clubs, boîtes de nuit et cabarets aucune justification qui serait de nature à établir ce caractère pour tout ou partie des sommes restant en litige ; que c'est dès lors à bon droit que l'administration a regardé ces sommes comme des avantages en nature versés à M. A ;
Considérant qu'aux termes de l'article 54 bis du code général des impôts rendu applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 222-3 du même code, les contribuables imposés d'après leur bénéfice réel doivent obligatoirement inscrire en comptabilité, sous une forme explicite, la nature et la valeur des avantages en nature accordés à leur personnel ; qu'il résulte de ce qui précède que la société Karin Models n'a pas porté en comptabilité les dépenses dont s'agit dans les avantages versés à son personnel ; que lesdites dépenses ont, dès lors, été à bon droit regardées comme des rémunérations ou avantages occultes accordés par la société à son gérant salarié et associé ; qu'aux termes de l'article 111 du même code : Sont notamment considérés comme revenus distribués... c. les rémunérations et avantages occultes ; que c'est ainsi à bon droit que l'administration a imposé M. A dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur la fraction non déclarée de l'avantage en nature dont il a bénéficié au cours des années d'imposition en litige ;
En ce qui concerne les sommes inscrites au compte courant de M. A :
Considérant qu'en vertu du 3 de l'article 158 du code général des impôts sont notamment imposables à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, les revenus considérés comme distribués en application des articles 109 et suivants du même code ; qu'aux termes de l'article 109 dudit code : 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. ; que pour contester l'imposition en tant que revenus distribués sur le fondement de l'article 109 du code général des impôts des sommes de 80 000 dollars (63 662 euros), 130 000 dollars (117 299 euros) et 158 000 dollars (133 525 euros), portées respectivement en 1996, 1997 et 1998 au crédit du compte courant ouvert à son nom dans les écritures de la société Karin Models, dont il possède 38 % du capital, M. A soutient qu'elles constituent le remboursement d'un prêt verbal consenti par lui à la société américaine Next Time Corporation ; que l'attestation de M. Peter B, expert comptable de la société Next Time Corporation, en date du 13 janvier 2000, ne suffit pas à établir l'existence du prêt ainsi invoqué et de son remboursement par les versements litigieux ; qu'il ressort de la réponse des autorités fiscales américaines à la demande d'assistance française, que ces autorités n'ont pu obtenir aucune preuve de l'existence dudit prêt auprès de la société Next Time Corporation, dont les écritures comptables et les déclarations fiscales ne prenaient pas en compte les versements litigieux en tant que remboursements d'un prêt consenti par M. A, avant la vérification de comptabilité menée à l'encontre de la société Karin Models ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'appréhension des sommes litigieuses par M. A ; que ce dernier n'est, par suite, pas fondé à contester leur imposition comme revenus distribués ; que ces sommes ayant été portées au crédit du compte courant d'associé de M. A par la société Karin Models, elles sont imposables en France ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à obtenir la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et du complément de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre des années 1996, 1997 et 1998 ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
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N° 08PA04132