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02/07/2010 | FRANCE | N°09PA02747

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 02 juillet 2010, 09PA02747


Vu la requête, enregistrée le 13 mai 2009, complétée par des pièces nouvelles enregistrées le 12 août 2009, présentée pour Mme Hulya A, demeurant ... par Me Manelphe ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0817782/12-1 en date du 3 mars 2009 par laquelle le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant d'une part à l'annulation de la décision du 8 septembre 2008 par laquelle le préfet de police a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié et lui a demandé de prendre toutes ses dispositio

ns pour quitter le territoire français, d'autre part, à enjoindre au préfet...

Vu la requête, enregistrée le 13 mai 2009, complétée par des pièces nouvelles enregistrées le 12 août 2009, présentée pour Mme Hulya A, demeurant ... par Me Manelphe ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0817782/12-1 en date du 3 mars 2009 par laquelle le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant d'une part à l'annulation de la décision du 8 septembre 2008 par laquelle le préfet de police a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié et lui a demandé de prendre toutes ses dispositions pour quitter le territoire français, d'autre part, à enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou à défaut de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler ladite décision pour excès de pouvoir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 21 juin 2010 :

- le rapport de M. Guillou, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Dely, rapporteur public ;

Considérant que Mme A, de nationalité turque, a sollicité son admission exceptionnelle en qualité de salarié ; que, par décision du 8 septembre 2008, le préfet de police lui a opposé un refus de séjour et lui a demandé de prendre ses dispositions pour quitter le territoire français ; que Mme A relève appel devant la cour de l'ordonnance du 3 mars 2009 par laquelle le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur la régularité de l'ordonnance :

Considérant qu'aux termes de l'ordonnance R. 222-1 du code de justice administrative : Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris [ ] peuvent, par ordonnance : [ ] 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour contester devant le Tribunal administratif de Paris la décision de refus d'admission exceptionnelle au séjour en tant que salarié, Mme A a soulevé devant le Tribunal administratif de Paris plusieurs moyens de fait et de droit assortis de pièces permettant d'en apprécier le bien fondé, qu'elle a fait valoir notamment qu'elle est entrée sur le territoire en janvier 2003, qu'elle s'y est maintenue de manière stable et continue, qu'elle est entourée par sa famille, qu'elle dispose d'une formation dans le métier de la couture et de la fabrication des tapis orientaux qu'elle souhaiterait mettre en oeuvre sur le territoire ; que les termes dans lesquels ses moyens étaient exprimés permettaient d'en saisir le sens et la portée et étaient suffisants pour permettre au juge d'exercer son office en en appréciant le bien fondé au regard des pièces produites et de celles qui viendraient à l'être ; que, dans ces conditions, le président du Tribunal administratif de Paris, ne pouvait, comme il l'a fait par l'ordonnance attaquée, rejeter cette demande en application des dispositions précitées par le motif que les allégations de la requérante étaient manifestement insusceptibles de venir au soutien de ses moyens ; que, par suite, l'ordonnance du président du Tribunal administratif de Paris du 3 mars 2009 doit être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Paris ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant que la décision litigieuse a été signée par Mme Béatrice Carrière, attachée principale d'administration à la préfecture de police, qui dispose d'une délégation de signature en vertu de l'arrêté n° 2008 - 00466 du 7 juillet 2008 régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 11 juillet suivant, pour signer notamment les décisions de refus de titre de séjour assorties de l'obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le signataire de la décision attaquée n'aurait pas été titulaire d'une délégation régulière, manque en fait ;

Considérant que Mme A fait valoir que la décision litigieuse est insuffisamment motivée et ne fait aucune référence ni à ses compétences professionnelles, ni à son intégration dans la société française ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que la décision énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, qu'elle vise l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique que la situation de la requérante, après un examen approfondi, n'est pas de nature, pour des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels, à lui ouvrir droit au séjour sur le fondement de cet article et que, le 17 juin 2008, par le biais de son conseil, Mme A a reçu notification d'une précédente décision de refus dans laquelle le préfet de police a précisé que le contrat de travail qu'elle a déposé ne figurait pas sur la liste des métiers fixée par l'arrêté ministériel du 18 janvier 2008 ; que dès lors ladite décision litigieuse doit être regardée comme suffisamment motivée au sens de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de sa motivation doit être écarté ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; et qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : [...] 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ;

Considérant que Mme A fait valoir qu'elle justifie d'une vie privée et familiale ancienne, stable et intense, ainsi que d'une parfaite insertion dans la société française, qu'elle séjourne depuis six ans sur le territoire, que suite à son divorce en 2007, elle vit entourée de ses frères et soeurs et de son cousin qui constituent sa seule famille, ainsi que de ses relations amicales, qu'elle a suivi des cours de français lui permettant de maîtriser la langue française, qu'elle dispose d'une promesse d'embauche en qualité de mécanicienne de confection, métier pour lequel elle justifie de diplômes obtenus en Turquie, qu'elle envisage de mettre à profit sa formation concernant la confection de moquette et de tapis d'orient, qu'elle a des ressources personnelles ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressée est célibataire et sans charge de famille, qu'elle ne démontre pas être dépourvue de toutes attaches en Turquie où elle a vécu jusqu'à l'âge de 25 ans ; que, si elle soutient que ses frères et soeurs résident en France, elle ne justifie pas la régularité de leur séjour ; que, compte tenu des circonstances de l'espèce, la décision attaquée n'a pas porté au droit de Mme A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, le préfet de police n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant que ni l'ancienneté de son séjour, ni la présence de sa famille à ses côtés ne constituent, à elles seules, des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifiant la régularisation de la situation de Mme A ; qu'aucune des circonstances invoquées par Mme A ne permet de regarder la décision attaquée comme entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision au regard de sa situation personnelle ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du préfet de police en date du 8 septembre 2008 ; que, par voie de conséquence ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : L'ordonnance n° 0817782/12-1 du président du Tribunal administratif de Paris en date du 3 mars 2009 est annulée.

Article 2 : La demande présentée devant le Tribunal administratif de Paris par Mme A ainsi que le surplus des conclusions de sa requête sont rejetées.

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N° 09PA02747


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 09PA02747
Date de la décision : 02/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FOURNIER DE LAURIERE
Rapporteur ?: M. Hervé Guillou
Rapporteur public ?: Mme DELY
Avocat(s) : MANELPHE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-07-02;09pa02747 ?
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