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02/07/2010 | FRANCE | N°09PA02743

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 02 juillet 2010, 09PA02743


Vu la requête, enregistrée le 13 mai 2009, présentée pour Mme Tatyana A, demeurant ..., par Me Beyreuther Minkov ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0901128/12-2 du 6 avril 2009 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 décembre 2008 du préfet de police refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois, et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté pour excès de pouvoir ;r>
3°) d'enjoindre audit préfet de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement d...

Vu la requête, enregistrée le 13 mai 2009, présentée pour Mme Tatyana A, demeurant ..., par Me Beyreuther Minkov ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0901128/12-2 du 6 avril 2009 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 décembre 2008 du préfet de police refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois, et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre audit préfet de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la lettre en date du 27 mai 2010, informant les parties, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour est susceptible de soulever un moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité des conclusions dirigées contre l'arrêté de refus de titre de séjour portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de renvoi du 26 décembre 2008 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 2010 :

- le rapport de M. Guillou, rapporteur,

- les conclusions de Mme Dely, rapporteur public ;

- et les observations de Me Beyreuther Minkov, représentant Mme A ;

Considérant que Mme A, de nationalité russe, a sollicité le 5 décembre 2008 un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article

L. 313-11 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par arrêté en date du 26 décembre 2008, le préfet de police a opposé un refus à sa demande de titre de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ; que Mme A relève appel de l'ordonnance du 6 avril 2009 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté susmentionné ;

Sur la régularité de l'ordonnance du vice-président du Tribunal administratif de Paris :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du Tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : [...] 5° Statuer sur les requêtes qui ne présentent plus à juger de questions autres que la condamnation prévue à l'article L. 761-1 ou la charge des dépens ; [...] 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

Considérant que le vice-président du Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur les dispositions du 5° et du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative pour rejeter par ordonnance la demande de Mme A tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 26 décembre 2008 ; qu'il a considéré, notamment, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences dudit arrêté sur la situation personnelle de la requérante n'étaient assortis que d'allégations et de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ; que, cependant, Mme A soutenait dans sa requête qu'elle avait contracté mariage le 2 juin 2008 à Paris avec un ressortissant français avec qui elle habite depuis lors ; qu'elle a appris le français, ce qui témoigne de sa volonté d'intégration ; qu'elle est dépourvue d'attaches familiales en Russie tandis qu'elle a noué de nombreuses relations depuis son arrivée en France ; qu'au soutien de ce moyen tiré de l'atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale, elle versait au dossier la preuve de son mariage ainsi que deux attestations d'amis témoignant de sa communauté de vie avec son mari ; que les termes dans lesquels les différents moyens soulevés étaient exprimés, qui permettaient d'en saisir le sens et la portée, les rendaient suffisamment intelligibles pour que le juge exerçât son office en en appréciant le bien-fondé au regard des pièces produites ou de celles qui viendraient à l'être ; que, dans ces conditions, le vice-président du Tribunal administratif de Paris ne pouvait, comme il l'a fait par l'ordonnance attaquée, rejeter cette demande en application des dispositions précitées de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ; que, par suite, l'ordonnance du vice-président du Tribunal administratif de Paris du 6 avril 2009 doit être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Paris ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du préfet de police en date du

26 décembre 2008 et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que Mme A soutient qu'elle est entrée régulièrement en France le 6 avril 2008 afin de rejoindre son fiancé avec qui elle s'est mariée le 2 juin 2008 à Paris et vit depuis lors, et dont elle est actuellement enceinte, qu'elle a appris la langue française afin de s'intégrer au mieux en France où elle a déjà noué des liens et qu'elle est dépourvue de toute attache familiale et de toute source de revenu dans son pays d'origine ; qu'il résulte des pièces du dossier que, si l'entrée en France et le mariage de Mme A étaient récents à la date de l'arrêté attaqué, l'effectivité de la vie commune avec son mari, de nationalité française, et l'enfant né de cette union depuis lors, n'est pas contestée, ni la réalité de son intégration en France et l'intensité des liens qu'elle y a établi ; que, par suite, Mme A est fondée à soutenir que la décision de refus de titre de séjour du 26 décembre 2008 a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ;

Sur les conclusions à fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de police délivre une carte de séjour temporaire à Mme A ; qu'il y a lieu de prescrire cette délivrance dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions de Mme A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 6 avril 2009 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 26 décembre 2008 du préfet de police refusant à Mme A la délivrance d'un titre de séjour est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à Mme A un titre de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Le préfet de police tiendra le greffe de la cour (service de l'exécution) immédiatement informé des dispositions prises pour répondre à cette injonction.

Article 4 : L'Etat versera à Mme A une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 09PA02743


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 09PA02743
Date de la décision : 02/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FOURNIER DE LAURIERE
Rapporteur ?: M. Hervé Guillou
Rapporteur public ?: Mme DELY
Avocat(s) : BEYREUTHER MINKOV

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-07-02;09pa02743 ?
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