Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 26 mai 2008, présentée pour M. Ousmane A, demeurant ...), par Me Chevrier, avocat ; M. A demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0706961-4 du 6 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a refusé d'abroger l'arrêté du 30 mai 1997 prononçant son expulsion ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;
3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mars 2010 :
- le rapport de Mme Dhiver, rapporteur,
- les conclusions de M. Egloff, rapporteur public,
- et les observations de Me Chevrier pour M. A ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 524-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sans préjudice des dispositions de l'article L. 524-1, les motifs de l'arrêté d'expulsion donnent lieu à un réexamen tous les cinq ans à compter de la date d'adoption de l'arrêté. L'autorité compétente tient compte de l'évolution de la menace pour l'ordre public que constitue la présence de l'intéressé en France, des changements intervenus dans sa situation personnelle et familiale et des garanties de réinsertion professionnelle ou sociale qu'il présente, en vue de prononcer éventuellement l'abrogation de l'arrêté. L'étranger peut présenter des observations écrites. A défaut de notification à l'intéressé d'une décision explicite d'abrogation dans un délai de deux mois, ce réexamen est réputé avoir conduit à une décision implicite de ne pas abroger ;
Considérant que M. A a fait l'objet d'un arrêté d'expulsion pris par le préfet de police le 30 mai 1997 ; qu'en vue du réexamen par le préfet de Seine-et-Marne des motifs de cet arrêté en application des dispositions précitées de l'article L. 524-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, M. A a présenté des observations écrites par un courrier du 9 février 2007 ; que le préfet, qui n'a notifié aucune décision à M. A dans le délai de deux mois prévu par lesdites dispositions, est réputé avoir implicitement refusé d'abroger ledit arrêté d'expulsion ; que le requérant demande, par la présente requête, l'annulation de ce refus implicite ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A vit en concubinage avec une compatriote en situation régulière avec laquelle il a eu un enfant né le 16 avril 2005 ; qu'il est le père de deux enfants français, nés le 27 décembre 1998 d'une précédente union avec une ressortissante française ; que les deux enfants français résident avec M. A qui subvient effectivement à leur entretien et à leur éducation ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant, s'il a été condamné pour des faits de recel de vols, falsification de chèques et usage de faux commis en 2001, ait fait l'objet d'une condamnation pour des faits commis ultérieurement ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le préfet de Seine-et-Marne a, en refusant d'abroger l'arrêté d'expulsion du 30 mai 1997, porté au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise et a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'abrogation de la décision implicite par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a refusé d'abroger l'arrêté du 30 mai 1997 prononçant son expulsion ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction saisie de conclusions en ce sens prescrit, par la même décision, cette mesure, assortie le cas échéant d'un délai d'exécution ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A était titulaire, à la date de l'arrêté préfectoral ordonnant son expulsion, d'un titre de séjour en cours de validité ; que, par suite, l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il appartiendra au préfet, si M. A le saisit d'une demande en ce sens, d'apprécier la situation de l'intéressé au regard de son droit au séjour en tenant compte des motifs du présent arrêt et au vu de la situation de droit et de fait prévalant à la date de la décision statuant sur cette demande ; que, par suite, les conclusions de M. A tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 800 euros que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Melun du 6 mars 2008 est annulé.
Article 2 : Le refus implicite du préfet de Seine-et-Marne d'abrogation de l'arrêté d'expulsion pris le 30 mai 1997 à l'encontre de M. A est annulé.
Article 3 : L'Etat versera à M. A une somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.
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N°08PA02806