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31/12/2009 | FRANCE | N°08PA03622

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7éme chambre, 31 décembre 2009, 08PA03622


Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2008, présentée par le PRÉFET DE POLICE ; le PRÉFET DE POLICE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0521206 du 18 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé sa décision en date du 7 septembre 2005 refusant à M. Abderrahmane A la délivrance d'un titre de séjour et sa décision du 27 octobre 2005 rejetant son recours gracieux, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé une carte de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a condamné l'État à verser à M. A la

somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice a...

Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2008, présentée par le PRÉFET DE POLICE ; le PRÉFET DE POLICE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0521206 du 18 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé sa décision en date du 7 septembre 2005 refusant à M. Abderrahmane A la délivrance d'un titre de séjour et sa décision du 27 octobre 2005 rejetant son recours gracieux, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé une carte de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a condamné l'État à verser à M. A la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande de M. A ;

........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux des étrangers malades prévus à l'article 7-5 du décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 décembre 2009 :

- le rapport de Mme Brin, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Larere, rapporteur public ;

Considérant que M. Abderrahmane A, de nationalité algérienne, né le 21 septembre 1963 à Ouarizane, est entré régulièrement en France le 31 août 2000 sous couvert d'un visa à entrées multiples délivré le 21 juin 2000 par les autorités consulaires françaises en Algérie ; qu'il a sollicité le 7 février 2005 son admission au séjour en tant qu'étranger malade ; que le 7 septembre 2005, le PRÉFET DE POLICE lui a opposé un refus de titre de séjour assorti d'une invitation à quitter le territoire français ; que par un jugement du 18 juin 2008, le Tribunal administratif de Paris a annulé cette décision ainsi que celle du 27 octobre 2005 rejetant le recours gracieux de l'intéressé, a enjoint au PRÉFET DE POLICE de lui délivrer un titre de séjour et a mis à la charge de l'État la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés ; que le PRÉFET DE POLICE relève appel de ce jugement ;

Sur la légalité des décisions du 7 septembre 2005 et du 27 octobre 2005 :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 7° au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays... ;

Considérant que le PRÉFET DE POLICE soutient que M. A peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ce qu'a d'ailleurs estimé le médecin, chef du service médical de la préfecture de police, par son avis en date du 22 mars 2005 selon lequel si l'état de santé de M. A nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ; que s'il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport d'examen médical du docteur Jean-Claude Bossard, psychiatre, expert agréé par la Cour de cassation, en date du 14 avril 2005, que M. A souffre d'une pathologie psychotraumatique compliquée de troubles de l'humeur, d'une pathologie d'allure neurologique et d'un syndrome suicidaire dont l'origine provient de confrontations à des situations impliquant la mort d'autrui et au risque personnel de mort et que M. A indique avoir été victime en Algérie de racket et de menaces de mort, il n'est toutefois pas établi que l'origine de cette pathologie ferait par elle-même obstacle à ce que l'intéressé puisse recevoir des soins dans son pays d'origine ; que le requérant ne conteste d'ailleurs pas l'existence en Algérie de structures médicales et de médicaments propres à assurer la prise en charge de cette pathologie ; que, dès lors, c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a retenu que le refus de titre de séjour opposé à M. A par le PRÉFET DE POLICE méconnaissait les stipulations précitées du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et a annulé pour ce motif son arrêté du 7 septembre 2005 ainsi que sa décision du 27 octobre 2005 rejetant le recours gracieux de M. A ;

Considérant qu'il y a lieu pour la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. A tant devant le Tribunal administratif de Paris que devant elle ;

Considérant que M. A soutient que l'auteur de l'avis du médecin soumis à l'appréciation du PRÉFET DE POLICE ne peut être identifié car il ne comporte pas de nom ;

Considérant qu'en vertu de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de délivrer à un étranger malade résidant habituellement en France une carte de séjour temporaire vie privée et familiale est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de la santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police ; que l'article 7-5 du décret du 30 juin 1946 réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, alors applicable et aujourd'hui codifié à l'article R. 313-22 du même code, prévoit que cet avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé ; qu'enfin, l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades, pris pour l'application de ces dispositions, prévoit notamment que le rapport médical du médecin agréé ou du praticien hospitalier est adressé sous pli confidentiel au médecin inspecteur de la santé publique ou au médecin chef de la préfecture de police, qui conserve ce rapport et transmet son avis à l'autorité préfectorale ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour respecter les prescriptions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les documents soumis à l'appréciation du préfet de police doivent comporter l'avis du médecin chef de la préfecture de police et être établis de manière telle que, lorsqu'il statue sur la demande de titre de séjour, le préfet puisse vérifier que l'avis au regard duquel il se prononce a bien été rendu par le médecin compétent ; qu'en conséquence, l'avis doit permettre l'identification du médecin inspecteur dont il émane et être signé par lui ;

Considérant qu'il est constant que l'avis du médecin du 22 mars 2005 transmis au PRÉFET DE POLICE n'indique pas le nom de son auteur ; que la méconnaissance de la formalité substantielle que constitue l'identification de l'auteur de cet avis prévu par l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile entache d'irrégularité la procédure au terme de laquelle le PRÉFET DE POLICE a pris sa décision ; que, par ce seul moyen, M. A est fondé à demander l'annulation de l'arrêté du PRÉFET DE POLICE en date du 7 septembre 2005 et la décision du 27 octobre 2005 rejetant son recours gracieux ;

Sur les conclusions de M. A à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ;

Considérant, d'une part, qu'eu égard au motif d'annulation ci-avant retenu, qui est le seul, en l'état du dossier, qui apparaisse fondé et qui n'implique pas nécessairement que le PRÉFET DE POLICE délivre une carte de séjour temporaire à M. A, les conclusions de celui-ci présentées devant le Tribunal administratif de Paris tendant à ce qu'il lui soit délivré un tel titre doivent être rejetées ; que, d'autre part, l'annulation de la décision l'invitant à quitter le territoire français entraîne que l'administration procède au réexamen de la demande de l'intéressé ; qu'il y a donc lieu, sans prononcer d'astreinte, d'enjoindre au PRÉFET DE POLICE de procéder au réexamen de la demande de M. A dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a enjoint au PRÉFET DE POLICE de délivrer à M. A un carte de séjour temporaire ;

Sur les conclusions de M. A tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, sur le fondement de ces dispositions, de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. A à l'occasion du litige ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il est enjoint au PRÉFET DE POLICE de procéder au réexamen de la situation de M. A dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 2 : Le jugement n° 0521206 du Tribunal administratif de Paris en date du 18 juin 2008 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du PRÉFET DE POLICE est rejeté.

Article 4 : L'État versera à M. A la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 08PA03622


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7éme chambre
Numéro d'arrêt : 08PA03622
Date de la décision : 31/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: Mme Dominique BRIN
Rapporteur public ?: Mme LARERE
Avocat(s) : BOUDJELTI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2009-12-31;08pa03622 ?
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