Vu la requête, enregistrée le 8 août 2007, présentée pour la SOCIETE ORANGINA SCHWEPPES HOLDING, dont le siège est 12-14 rue Belgrand à Levallois-Perret (92309), par Me Douard ; la SOCIETE ORANGINA SCHWEPPES HOLDING demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0116698/1 du 6 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations de taxe professionnelle que la société Schweppes France a acquittées au titre des années 1999 et 2000 dans le rôle de la commune de Levallois-Perret ;
2°) de prononcer la restitution demandée à hauteur de respectivement 108 150 et 130 888 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 20 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
4°) de condamner l'Etat aux dépens ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ensemble le premier protocole additionnel à cette convention ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu la loi n° 2003-1312 du 30 décembre 2003 portant loi de finances rectificative pour l'année 2003 ;
Vu le décret n°2009-14 du 7 janvier 2009 et l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 novembre 2009 :
- le rapport de Mme Brin, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Larere, rapporteur public ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que la société Schweppes France a déclaré dans sa base imposable à la taxe professionnelle due au titre des années 1999 et 2000 la valeur locative d'outillages industriels lui appartenant qu'elle a mis gratuitement à la disposition de ses sous-traitants ; que, par trois réclamations des 11 et 22 décembre 2000 et du 9 avril 2001, elle a sollicité la restitution de la part de la taxe professionnelle acquittée au titre de ces années correspondant à la valeur locative de ces outillages, au motif que c'était à tort qu'elle avait intégré cette valeur dans sa base imposable ; que, par décision du 19 septembre 2001, le directeur des services fiscaux des Hauts-de-Seine Nord a rejeté ses réclamations ; que la SOCIETE ORANGINA SCHWEPPES HOLDING, venant aux droits de la société Schweppes France, a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande en réduction des cotisations de taxe professionnelle dont elle était redevable au titre des années 1999 et 2000 résultant de l'intégration dans ses bases d'imposition de la valeur locative des immobilisations mises gratuitement à la disposition de ses sous-traitants ; que, devant le tribunal, le directeur des services fiscaux, par un mémoire du 20 février 2004 qui a été communiqué à la requérante, a opposé auxdites conclusions les dispositions de l'article 59 de la loi du 30 décembre 2003 portant loi de finances rectificative pour 2003 modifiant le 3° bis de l'article 1469 du code général des impôts ; que, par un jugement du 6 juin 2007, le Tribunal administratif de Paris en se fondant sur ces dispositions a rejeté la demande de la SOCIETE ORANGINA SCHWEPPES HOLDING ; que cette dernière fait appel du jugement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précitées ne portent pas atteinte au droit que possèdent les États de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou amendes ; que s'il résulte de ces stipulations que le droit au respect de ses biens reconnu à toute personne physique ou morale ne porte pas atteinte au droit de chaque État de mettre en oeuvre les lois qu'il estime nécessaires pour assurer le paiement des impôts, c'est à la condition de ménager un juste équilibre entre les exigences de l'intérêt général et les impératifs de sauvegarde du droit au respect des biens ;
Considérant qu'aux termes de l'article 59 de la loi susvisée du 30 décembre 2003 portant loi de finances rectificative pour l' année 2003 et modifiant le 3° bis de l'article 1469 du code général des impôts : I. - (...) Les biens (...) utilisés par une personne qui n'en est ni propriétaire, ni locataire, ni sous-locataire, sont imposés au nom de leur sous-locataire ou, à défaut, de leur locataire ou, à défaut, de leur propriétaire dans le cas où ceux-ci sont passibles de la taxe professionnelle. II. - Les dispositions du I s'appliquent aux impositions relatives à l'année 2004 ainsi qu'aux années ultérieures et, sous réserve des décisions passées en force de chose jugée, aux impositions relatives aux années antérieures ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : La taxe professionnelle a pour base : 1° (...) a) la valeur locative (... ) des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle (...) ; que, par une décision du 25 avril 2003, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a jugé que les immobilisations dont la valeur locative est ainsi intégrée dans l'assiette de la taxe professionnelle sont les biens placés sous le contrôle du redevable et que celui-ci utilise matériellement pour la réalisation des opérations qu'il effectue ; que, pour l'application de ce principe avant l'entrée en vigueur de l'article 59 précité, les sous-traitants qui utilisaient matériellement pour la réalisation des opérations constitutives de leur activité des outillages spécifiquement adaptés que le donneur d'ordres, qui en conservait la propriété, mettait à leur disposition, étaient réputés disposer de ces outillages au sens du a) du 1° de l'article 1467 du code général des impôts, quelle que soit l'intention du donneur d'ordres procédant à une telle mise à disposition et alors même que les sous-traitants n'auraient exercé qu'un contrôle partiel sur ces outillages ; qu'ainsi, un contribuable qui avait mis gratuitement à la disposition de ses sous-traitants des immobilisations était en droit, en application de la décision du Conseil d'État du 23 avril 2003 susmentionnée, et avant l'entrée en vigueur de l'article 59 de la loi du 30 décembre 2003, d'obtenir la restitution des cotisations de taxe professionnelle qu'il avait acquittées indûment résultant de l'intégration dans ses bases d'imposition de la valeur locative desdites immobilisations ;
Considérant que les dispositions de l'article 59 de la loi du 30 décembre 2003, adoptées postérieurement aux demandes de restitution des cotisations de taxe professionnelle présentées par la société Schweppes France, comme il a été dit ci-dessus, les 11 et 22 décembre 2000 et 9 avril 2001, ont eu pour effet de la priver rétroactivement du droit à une telle restitution qu'elle tenait de l'intégration indue dans sa base imposable de la valeur locative des immobilisations mises gratuitement par ses soins à la disposition de ses sous-traitants ; que, dans ces conditions, le droit à restitution des cotisations de taxe professionnelle indûment acquittées par la requérante, qu'elle tenait des textes alors applicables, doit être regardé comme constituant un bien au sens des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant que ni la volonté d'éviter un transfert de charges entre les collectivités locales en fonction du redevable de la taxe professionnelle, ni l'objectif d'assurer le maintien de l'activité des sous-traitants et d'éviter le transfert de la charge fiscale des donneurs d'ordres aux sous-traitants qui implique une délicate renégociation de leurs relations contractuelles, ni le souci de prévenir la perte de recettes fiscales et un éventuel afflux contentieux, ne constituent des motifs suffisants d'intérêt général de nature à justifier l'atteinte ainsi portée aux biens de la société requérante au sens des stipulations de l'article 1er du premier protocole précité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE ORANGINA SCHWEPPES HOLDING est fondée à demander la réduction des cotisations de taxe professionnelle sollicitée et à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les autres conclusions de la requête :
Considérant, en premier lieu, que le présent litige n'ayant donné lieu à aucune mesure de nature à faire naître des frais compris dans les dépens au sens des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les conclusions de la requête tendant à ce que l'Etat soit condamné aux dépens sont dépourvues d'objet et doivent, par suite, être rejetées ;
Considérant, en second lieu, qu'en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SOCIETE ORANGINA SCHWEPPES HOLDING et non compris dans les dépens ;
DECIDE
Article 1er : Le jugement n° 0116698/1 en date du 6 juin 2007 du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : Les cotisations de taxe professionnelle auxquelles la SOCIETE ORANGINA SCHWEPPES HOLDING a été assujettie au titre des années 1999 et 2000 sont réduites à hauteur de respectivement 108 150 et 130 888 euros.
Article 3 : L'Etat versera à la SOCIETE ORANGINA SCHWEPPES HOLDING la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE ORANGINA SCHWEPPES HOLDING est rejeté.
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N° 07PA03079