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16/10/2009 | FRANCE | N°07PA04765

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7éme chambre, 16 octobre 2009, 07PA04765


Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 2007, présentée pour M. Robert A, demeurant ..., par Me Nicolaïdès ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0118870/2 en date du 9 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant d'avis à tiers détenteur décernés à son encontre les 2 et 9 juillet 2001 ainsi que les 21 juin et 30 août 2006 par le trésorier principal de Paris 8ème en vue du recouvrement de cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti

au titre des années 1982, 1983 et 1984 et des pénalités et frais y afférents ;...

Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 2007, présentée pour M. Robert A, demeurant ..., par Me Nicolaïdès ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0118870/2 en date du 9 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant d'avis à tiers détenteur décernés à son encontre les 2 et 9 juillet 2001 ainsi que les 21 juin et 30 août 2006 par le trésorier principal de Paris 8ème en vue du recouvrement de cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1982, 1983 et 1984 et des pénalités et frais y afférents ;

2°) de prononcer cette décharge ;

3°) d'enjoindre à l'administration de restituer les sommes qu'il a versées spontanément et les prélèvements effectués par voie d'avis à tiers détenteur ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 20 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

En application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ayant été informées que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen soulevé d'office ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2009 :

- le rapport de M. Dalle, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Larere, rapporteur public ;

Considérant que M. A fait appel du jugement en date du 9 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Paris a refusé de le décharger de l'obligation de payer résultant de sept avis à tiers détenteur décernés à son encontre les 2 et 9 juillet 2001 ainsi que les 21 juin et 30 août 2006, en vue de recouvrer des cotisations à l'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 1982, 1983 et 1984 ainsi que des pénalités et frais y afférents;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort des motifs du jugement attaqué que le tribunal administratif a répondu aux moyens du requérant relatifs à la transaction passée le 25 janvier 1995 et renouvelée le 17 juillet 1998 avec le directeur des services fiscaux de Paris Nord ; que l'omission à statuer alléguée ne peut donc qu'être écartée ;

Sur la recevabilité des conclusions dirigées contre les trois avis à tiers détenteur du 2 juillet 2001 et contre les deux avis à tiers détenteur du 21 juin 2006 :

Considérant, en premier lieu, qu'il est constant qu'à la date à laquelle les trois avis à tiers détenteur du 2 juillet 2001 ont été notifiés aux établissements bancaires et au centre des chèques postaux gérant les comptes de M. A, le solde de ces comptes était nul ou débiteur ; qu'ainsi, ces avis n'ont jamais eu d'effet sur le recouvrement des impositions établies au nom de M. A, puisque le recouvrement sur ces ne pouvait se poursuivre sans notification de nouveaux avis ; que M. A était donc sans intérêt, et par suite irrecevable à contester ces avis devant le tribunal administratif ;

Considérant, en second lieu, que les deux avis à tiers détenteur notifiés le 21 juin 2006 à la Banque transatlantique et à la banque CIC n'ont fait l'objet d'aucune demande préalable auprès du receveur général des finances, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 281-1 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, les conclusions présentées directement contre ces avis devant le tribunal sont également irrecevables ;

Sur l'obligation de payer résultant des avis à tiers détenteur des 9 juillet 2001 et 30 août 2006 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle, perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable./ Le délai de quatre ans, mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables ou par tous autres actes interruptifs de la prescription ; qu'aux termes de l'article R. 281-2 du même livre : La demande prévue par l'article R. 281-1 doit, sous peine de nullité, être présentée au trésorier-payeur général dans un délai de deux mois à partir de la notification de l'acte si le motif invoqué est un vice de forme ou, s'il s'agit de tout autre motif, dans un délai de deux mois après le premier acte qui permet d'invoquer ce motif ; et qu'aux termes de l'article R. 281-5 du même livre : Le juge se prononce exclusivement au vu des justifications qui ont été présentées au chef de service. Les redevables qui l'ont saisi ne peuvent ni lui soumettre des pièces justificatives autres que celles qu'ils ont déjà produites à l'appui de leurs mémoires, ni invoquer des faits autres que ceux exposés dans ces mémoires... ;

Considérant que, pour contester l'obligation de payer découlant des avis à tiers détenteur en date des 9 juillet 2001 et 30 août 2006, M. A se prévaut de la prescription définie à l'article L. 274 précité ; que l'administration soutient en défense que ce moyen ne pourrait plus être invoqué, faute que, comme l'exigent les dispositions précitées de l'article R. 281-2 du livre des procédures fiscales, il ait été soulevé à l'occasion de la contestation du premier acte qui lui eût permis de le faire ;

Considérant que ni les dispositions de l'article R. 281-2 du livre des procédures fiscales, ni celles de l'article R. 281-5 du même livre, ne font obstacle à ce que le contribuable soulève devant le tribunal administratif ou devant la cour administrative d'appel, jusqu'à la clôture de l'instruction, des moyens de droit nouveaux, n'impliquant pas l'appréciation de pièces justificatives ou de circonstances de fait qu'il lui eût appartenu de produire ou d'exposer dans sa demande au trésorier-payeur général, tels que la prescription de l'action en recouvrement édictée par le premier alinéa de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales, pourvu que la demande prévue par l'article R. 281-2 ait été présentée au trésorier-payeur général dans le délai de deux mois après le premier acte de poursuites permettant d'invoquer cette prescription ;

Considérant que ce premier acte était, selon l'administration, un avis à tiers détenteur en date du 31 octobre 1996 ; que cependant, l'administration n'apporte aucun élément de nature à établir que cet avis aurait été régulièrement notifié ; que, faute pour M. A d'avoir reçu cet avis et aucun autre acte de poursuite n'ayant été effectué entre-temps, les trois avis à tiers détenteurs susmentionnés, en date du 2 juillet 2001, envoyés aux banques et au centre des chèques postaux gérant ses comptes, constituaient chacun à son égard le premier acte lui permettant d'invoquer la prescription ; que l'intéressé a contesté ces actes par une réclamation datée du 10 août 2001, dont il n'est pas allégué qu'elle n'aurait pas été reçue par le trésorier-payeur général dans le délai de deux mois mentionné à l'article R. 281-2 du livre des procédures fiscales ; que le nouveau moyen soulevé devant le tribunal administratif par M. A, tiré de ce que l'action en recouvrement était prescrite, ne dépendant de l'appréciation d'aucune circonstance de fait qu'il lui eût appartenu d'exposer dans sa demande au trésorier-payeur général, l'intéressé était recevable à l'invoquer postérieurement à l'expiration du délai de deux mois suivant le premier acte de poursuites lui permettant de se prévaloir de la prescription ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par l'administration qu'aucun acte de poursuites n'a été effectué dans les quatre années suivant le 30 juin 1988, date de la mise en recouvrement des impositions litigieuses, et qu'en conséquence la prescription prévue par l'article L. 274 précité était acquise à M. A à la date de notification des avis à tiers détenteur des 9 juillet 2001 et 30 août 2006 ;

Considérant par ailleurs, qu'aux termes de l'article 2220 du code civil, dans sa rédaction applicable en l'espèce : On ne peut, d'avance, renoncer à la prescription : on peut renoncer à la prescription acquise ; et qu'aux termes de l'article 2221 du même code : La renonciation à la prescription est expresse ou tacite ; la renonciation tacite résulte d'un fait qui suppose l'abandon du droit acquis ;

Considérant que le ministre soutient que M. A, ayant effectué des règlements spontanés auprès du service à partir de 1993, puis sollicité et obtenu en 1995 et 1998, dans le cadre d'une transaction devenue caduque, la remise gracieuse des impositions dont le recouvrement était poursuivi, avait de ce fait tacitement renoncé à se prévaloir de la prescription, selon les dispositions précitées de l'article 2221 du code civil ; que, cependant, pour vraisemblables que soient ces allégations, l'absence de toute précision sur les conditions dans lesquelles ces règlements et transaction sont intervenus ne permet pas de les regarder comme des faits d'où il résulterait que M. A avait tacitement renoncé à invoquer la prescription ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A doit être déchargé de l'obligation de payer résultant des deux avis à tiers détenteur en date des 9 juillet 2001 et 30 août 2006, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens présentés par le requérant en ce qui concerne ces actes de poursuites ;

Sur les conclusions en restitution des sommes versées par le contribuable ou prélevées par voie d'avis à tiers détenteur :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant que, dans le dernier état de ses écritures, le requérant demande la restitution des versements qu'il a effectués et des prélèvements réalisés par voie d'avis à tiers détenteur entre le 31 octobre 1996 et le 21 juin 2006, des prélèvements réalisés entre janvier 2009 et ce jour , ainsi que l'indemnisation de tous les frais bancaires occasionnés par les différents avis à tiers détenteur émis depuis 2001 ;

Considérant que l'exécution du présent arrêt, par lequel la cour décharge M. A de l'obligation de payer résultant de deux avis à tiers détenteur, en date des 9 juillet 2001 et 30 août 2006, notifiés respectivement à la paierie générale du Trésor et à la Banque Transatlantique, n'implique pas que la cour ordonne la restitution à l'intéressé des sommes qu'il a lui-même spontanément acquittées, indépendamment de ces actes de poursuites ; que, s'agissant des prélèvements effectués par voie d'avis à tiers détenteur, s'il résulte de l'instruction que des sommes ont été réglées par la paierie générale du Trésor et, le cas échéant, par la Banque Transatlantique, en exécution des deux avis à tiers détenteur litigieux, les pièces du dossier ne permettent pas d'en déterminer le montant ; qu'il y a lieu par suite d'ordonner un supplément d'instruction contradictoire afin que l'administration fasse connaître à la cour, dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, le montant des sommes versées par la paierie générale du Trésor et/ou par la Banque Transatlantique en exécution des avis à tiers détenteur litigieux, entre le 9 juillet 2001 et le 21 juin 2006 et postérieurement à janvier 2009 ;

Considérant, enfin, qu'en l'absence au dossier de tout élément permettant de chiffrer les frais bancaires afférents à ces avis, la demande du requérant tendant au remboursement desdits frais ne peut qu'être rejetée ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre une somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce titre par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ;

DECIDE

Article 1er : M. A est déchargé de l'obligation de payer résultant des deux avis à tiers détenteur en date des 9 juillet 2001 et 30 août 2006, notifiés respectivement à la paierie générale du Trésor et à la Banque Transatlantique.

Article 2 : Le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État fera connaître à la cour, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt le montant des sommes versées par la paierie générale du Trésor et par la Banque transatlantique en exécution des avis à tiers détenteur mentionnés à l'article 1er litigieux, qui doivent être restituées à M. A.

Article 3 : Le surplus des conclusions en décharge et à fin d'injonction présentées par M. A est rejeté.

Article 4 : L'État versera une somme de 1 500 euros à M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le jugement attaqué est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

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N° 07PA04765


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7éme chambre
Numéro d'arrêt : 07PA04765
Date de la décision : 16/10/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés MARTIN LAPRADE
Rapporteur ?: M. David DALLE
Rapporteur public ?: Mme LARERE
Avocat(s) : NICOLAÏDES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2009-10-16;07pa04765 ?
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