Vu la requête, enregistrée le 20 décembre 2007, présentée pour M. Jean X, demeurant ..., par la SELARL Cohen-Lilti-Cohen, société d'avocats ; M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0503415/1-0503418/1-0504988/1 en date du 22 novembre 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur en date du 25 mars 2005 portant récapitulation et notification de l'ensemble des retraits de points affectant son permis de conduire et portant interdiction de conduire, de chacune des décisions de retraits de points irrégulièrement opérés ainsi que de la décision du préfet du Val-de-Marne en date du 22 avril 2005 ordonnant la restitution du permis de conduire pour solde de points nul ; d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au ministre de reconstituer le capital de points initial et à l'administration de lui restituer son permis de conduire ;
2°) d'enjoindre à l'administration de restituer les points illégalement retirés à la suite des infractions commises les 7 mai 2003, 14 mai 2003, 14 mai 2003, 7 juillet 2003 et 23 décembre 2003 ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros, au titre de l'article
L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la route ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 2 mars 2009 :
- le rapport de M. Dellevedove, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Dely, rapporteur public ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par une décision en date du 25 mars 2005, le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales a, en application de l'alinéa 3 de l'article L. 223-3 du code de la route, informé M. X du retrait de 3 points de son permis de conduire en raison d'une infraction commise le 23 décembre 2003, rappelé à l'intéressé les décisions de retraits de 3, 3, 2 et 2 points consécutifs aux infractions précédemment commises respectivement les 7 mai 2003, 14 mai 2003, 14 mai 2003 et 7 juillet 2003, puis, constaté que le nombre de points affecté à son permis était nul et que celui-ci avait, en application de l'article L. 223-1 du code de la route, perdu sa validité ; que, par une décision du 22 avril 2005, le préfet du Val-de-Marne lui a ordonné de restituer son permis de conduire pour solde de points nul ; que M. X fait appel du jugement du 22 novembre 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions précitées ;
Sur la légalité des décisions de retraits de points consécutives aux infractions commises les 14 mai 2003 et 23 décembre 2003 :
Sur le moyen tiré de l'absence de réalité des infractions :
Considérant qu'il résulte tant des dispositions de l'article L. 223-1 du code de la route, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 10 juillet 1989 dont elles sont issues, que de celles des articles 529-1 à 530-1 du code de procédure pénale, qu'en l'absence d'une réclamation formée dans le délai légal, l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée doit, pour l'application des dispositions précitées, être assimilée à une condamnation définitive établissant la réalité de l'infraction et entraînant de plein droit le retrait de points du permis de conduire ; qu'ainsi, à supposer que M. X ne se serait pas acquitté des amendes infligées à raison des infractions précitées, cette circonstance demeure sans influence sur la légalité des décisions de retrait de points correspondantes, dès lors que l'intéressé n'établit pas avoir formé dans le délai légal une réclamation à l'encontre des infractions en cause ;
Sur le moyen tiré du défaut d'information lors de la constatation des infractions :
Considérant qu'en application des dispositions du code de la route relatives au permis à points, l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire, à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues aux articles L. 11-3 et R. 258 devenus les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, qui constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tous moyens, qu'elle a satisfait à cette obligation préalable d'information ; que, si en vertu de l'article 537 du code de procédure pénale les procès-verbaux établis par les officiers ou agents de police judiciaire font foi jusqu'à preuve contraire, ces dispositions ne trouvent à s'appliquer qu'en ce qui concerne la constatation des faits constitutifs des infractions ; que la mention portée sur ces procès-verbaux selon laquelle le contrevenant a reçu l'information prévue par les articles précités du code de la route n'est pas revêtue de la même force probante ; que, néanmoins, même contredite par le contrevenant, cette indication peut emporter la conviction du juge si elle est corroborée par d'autres éléments ; tel est notamment le cas s'il ressort des pièces du dossier que le contrevenant a contresigné le procès-verbal ou qu'il a pris connaissance, sans élever d'objection, de son contenu ;
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que les procès-verbaux relatifs aux infractions commises le 14 mai 2003, l'une à 16h02 et l'autre à 16h03, comportent notamment les mentions que le contrevenant est susceptible de perdre respectivement 3 et 2 points de son permis de conduire ainsi que la mention pré-imprimée selon laquelle « le contrevenant reconnaît avoir reçu la carte de paiement et l'avis de contravention », mention contresignée par le requérant qui n'a élevé aucune objection ; qu'il n'est pas contesté que ce type d'avis de contravention répond aux exigences d'information prévues par les dispositions précitées du code de la route ; que, dans ces conditions, contrairement à ce que soutient M. X, l'administration doit être regardée comme établissant que l'intéressé a reçu communication desdites informations lors de la constatation des infractions précitées ;
Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'infraction commise le 23 décembre 2003 a été constatée par cinémomètre radar sans interpellation ; que le ministre soutient, sans être expressément contredit sur ce point, que le procès-verbal de l'infraction produit au dossier a été adressé à l'intéressé, accompagné de l'avis de contravention et du formulaire en exonération conformes aux modèles d'imprimés Cerfa produits ; que ce type d'avis de contravention répond pareillement aux exigences d'information prévues par les dispositions précitées du code de la route ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, l'administration doit être regardée comme ayant apporté la preuve de ce qu'elle a satisfait à cet égard à son obligation d'information ;
Sur la légalité des décisions de retraits de points, consécutives aux infractions commises les 7 mai et 7 juillet 2003, et des décisions susvisées des 25 mars et 22 avril 2005 :
Considérant que les procès-verbaux relatifs aux infractions commises les 7 mai et 7 juillet 2003 comportent notamment les mentions que le contrevenant est susceptible de perdre respectivement 3 et 2 points de son permis de conduire mais n'ont pas été contresignés par le requérant ; que les procès-verbaux ne comportent aucune mention expresse de la part de l'agent verbalisateur sur le refus du requérant de signer ni sur la communication qui lui aurait été faite de l'information réglementaire ; que l'administration ne saurait, dans ces conditions, se borner à faire valoir que les procès-verbaux comportent bien les références de l'intéressé et que les mentions précitées suffisent à établir la délivrance à l'intéressé de l'avis de contravention comportant l'information réglementaire ; qu'il s'ensuit que le requérant est fondé à soutenir que l'administration n'apporte pas la preuve que les formalités d'information susmentionnées ont bien été réalisées ; que, dès lors, les décisions de retraits respectivement de 3 et 2 points du capital attaché au permis de conduire de M. X, opérés consécutivement aux infractions précitées, sont intervenues à l'issue d'une procédure irrégulière ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sur les douze points dont était crédité le permis de conduire de l'intéressé, huit points seulement ont été légalement retirés ; qu'ainsi, d'une part, le ministre ne pouvait légalement constater la perte de validité du permis de conduire de M. X dont le solde s'élevait à quatre points à la date de la décision susvisée du 25 mars 2005 ; que, d'autre part, le préfet du Val-de-Marne ne pouvait légalement, par la décision susvisée du 22 avril 2005, lui ordonner de restituer son permis de conduire pour solde de points nul ; que, dès lors, M. X est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes en tant qu'elles portaient sur l'annulation des décisions susvisées des 25 mars 2005 et 22 avril 2005 et des décisions de retraits de 3 et 2 points respectivement consécutives aux infractions des 7 mai et 7 juillet 2003 ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X a droit à la restitution de son permis de conduire doté d'un capital de quatre points, sous réserve que l'intéressé n'ait pas commis de nouvelles infractions ayant entraîné des retraits de points à la date de notification du présent arrêt ; que l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que l'administration reconstitue le capital de points affectés au permis de conduire de M. X en tenant compte des 5 points illégalement retirés et des 8 points retirés à bon droit ; qu'il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales de reconstituer le capital de points du permis de conduire de M. X dans ce sens afin de rétablir à quatre points son capital, sous réserve des conditions précitées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. X présentées sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
Article 1er : Les décisions du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales portant retraits de points du permis de conduire de M. X, consécutives aux infractions commises les 7 mai et 7 juillet 2003, ainsi que la décision du ministre du 25 mars 2005 constatant la perte de validité de son permis de conduire, sont annulées.
Article 2 : La décision du préfet du Val-de-Marne du 22 avril 2005 ordonnant la restitution du permis de conduire de M. X pour solde de points nul est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales de reconstituer le capital de points du permis de conduire de M. X afin de porter à quatre points son capital, sous réserve qu'il n'ait pas commis de nouvelles infractions ayant entraîné des retraits de points à la date de notification du présent arrêt. Le ministre tiendra le greffe de la cour (service de l'exécution) immédiatement informé des dispositions prises pour répondre à cette injonction.
Article 4 : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Melun en date du 22 novembre 2007 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
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N° 07PA04948