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15/12/2008 | FRANCE | N°06PA00229

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 15 décembre 2008, 06PA00229


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 janvier 2006 et 27 janvier 2006, présentés pour M. Yovan X, demeurant ..., par la SCP Jean-Pierre Martin et Associés ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0006881/6-2 du 13 décembre 2005, en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Boulogne-Billancourt à lui verser la somme 1 560 000 F HT au titre du protocole transactionnel, les sommes de 545 471, 83 F HT, 197 464, 41 F HT et 202 675 F HT au titre du

marché de maîtrise d'oeuvre, toutes sommes augmentées des taxes sur...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 janvier 2006 et 27 janvier 2006, présentés pour M. Yovan X, demeurant ..., par la SCP Jean-Pierre Martin et Associés ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0006881/6-2 du 13 décembre 2005, en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Boulogne-Billancourt à lui verser la somme 1 560 000 F HT au titre du protocole transactionnel, les sommes de 545 471, 83 F HT, 197 464, 41 F HT et 202 675 F HT au titre du marché de maîtrise d'oeuvre, toutes sommes augmentées des taxes sur la valeur ajoutée et des intérêts moratoires, et 500 000 F à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et injustifiée dans le cadre de l'opération de réalisation d'un équipement culturel et d'une salle de conseil municipal ;

2°) de condamner la commune de Boulogne-Billancourt à lui verser la somme de 246 967, 40 euros HT (1 620 000 F), majorée de la taxe sur la valeur ajoutée avec intérêts au taux légal au titre du protocole transactionnel, la somme de 100 286, 91 euros TTC

(657 839, 03 F TTC), augmentée des intérêts au taux légal au titre du marché de maîtrise d'oeuvre, la somme de 36 304, 52 euros TTC (238 142, 07 F), augmentée des intérêts moratoires au titre de la restitution de la retenue de garantie, et la somme de 50 000 euros, à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et injustifiée ;

3°) de mettre à la charge de la commune la somme de 3 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le décret n° 78-1306 du 26 décembre 1978 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles ;

Vu le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

Vu le décret n° 73-207 du 28 février 1973 relatif aux conditions de rémunération des missions d'ingénierie et d'architecture remplies pour le compte des collectivités publiques par des prestataires de droit privé ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 décembre 2008 :

- le rapport de M. Dellevedove, rapporteur,

- les observations de Me Gauvin de la SCP Tirard et associés pour la commune de Boulogne-Billancourt ;

- et les conclusions de Mme Dely, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un marché en date du 10 juin 1993, la commune de Boulogne-Billancourt, maître d'ouvrage, a confié au groupement conjoint formé par la société ICA3, économiste de la construction, et M. X, architecte, mandataire du groupement, la maîtrise d'oeuvre de l'opération de réalisation d'un équipement culturel et d'une salle de conseil municipal à proximité de l'hôtel de ville de la commune, pour un montant forfaitaire de rémunération initial du marché maîtrise d'oeuvre précité de 1 154 748, 53 HT (7 574 653, 86 F) ; que, à la suite de modifications importantes apportées au programme de l'opération, d'ajournements à l'initiative de la commune et du mémoire en réclamation en date du 17 octobre 1996 à hauteur de 781 270, 37 euros HT (5 104 797, 72 F) présenté par le requérant, par trois avenants successifs, le dernier en date du 20 mars 1997 comportant en annexe un protocole transactionnel conclut entre M. X et la commune, le montant forfaitaire de rémunération initial du marché a été porté à 1 439 890, 03 euros HT (9 445 059 F) et la date de fin des travaux prévue au 30 mai 1997 ; que M. X fait appel du jugement en date du 13 décembre 2005, en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Boulogne-Billancourt à lui verser la somme 1 560 000 F HT au titre du protocole transactionnel, les sommes de 545 471,83 F HT, 197 464,41 F HT et 202 675 F HT au titre du marché de maîtrise d'oeuvre, toutes sommes augmentées des taxes sur la valeur ajoutée et des intérêts moratoires, et 500 000 F à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et injustifiée ; que, dans le dernier état de ses conclusions, le requérant demande à la cour de condamner la commune de Boulogne-Billancourt à lui verser la somme de 246 967,40 euros HT (1 620 000 F), majorée de la taxe sur la valeur ajoutée avec intérêts au taux légal au titre du protocole transactionnel, la somme de 100 286, 91 euros TTC (657 839, 03 F TTC), augmentée des intérêts au taux légal au titre des prestations du marché de maîtrise d'oeuvre, la somme de 36 304, 52 euros TTC (238 142, 07 F), augmentée des intérêts moratoires au titre de la restitution de la retenue de garantie, et la somme de 50 000 euros, à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et injustifiée ; que, par la voie de l'appel incident, la commune de Boulogne-Billancourt demande à la cour de réformer le jugement attaqué et de condamner M. X à lui verser la somme de 932 950,92 euros HT, augmentée de la taxe sur la valeur ajoutée et des intérêts au taux légal, pour manquement à son obligation de conseil envers le maître d'ouvrage lors des opérations de réception des travaux ;

Sur les conclusions de l'appel principal de M. X :

Sur les conclusions tendant à la condamnation de la commune au titre du protocole transactionnel :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de l'avenant susmentionné en date du 20 mars 1997 au marché de maîtrise d'oeuvre : « Une indemnité de 1 500 000 F HT valeur marché est versée à l'Atelier X dans les conditions définies au protocole d'accord annexé au présent avenant. Le mandatement de cette indemnité interviendra avec le premier acompte présenté dès après la signature du présent avenant. / Dès le versement de cette indemnité le groupement de maîtrise d'oeuvre se considère comme complètement et définitivement rempli dans ses droits relativement aux conséquences des ajournements et modifications de programme, il renonce à tout recours ultérieur qui trouverait son origine dans un fait antérieur à la signature du présent document qui vaut transaction au sens de l'article 2044 du Code civil » ; qu'aux termes de l'article 6 de l'avenant précité : « La date de fin des travaux est prévue pour le 30 mai 1997 » ; qu'aux termes de l'article 1er du protocole transactionnel susmentionné conclu entre M. X et la commune de Boulogne-Billancourt le 20 mars 1997, annexé à l'avenant précité : « Le présent protocole a pour objet d'indemniser l'Atelier X des sujétions qu'il a subies du fait des modifications de programme intervenues, et de la durée des travaux qui en est résultée, entraînant ainsi de sa part diverses interventions non prévues » ; qu'aux termes de l'article 2 du protocole précité : « L'indemnité compensatrice des préjudices subis par le maître d'oeuvre est définitivement arrêtée à la somme de 1 500 000 F HT (...) » ; qu'au terme de l'article 3 du même protocole : « Sous réserve de la bonne exécution de ce qui précède, l'Atelier X se considère comme complètement et définitivement rempli dans ses droits relativement aux conséquences des ajournements et modifications de programme, il renonce à tout recours ultérieur qui trouverait son origine dans un fait antérieur à la signature du présent protocole qui vaut transaction au sens de l'article 2044 du code civil » ; qu'aux termes de l'article 4 dudit protocole : « La valeur de l'indemnité définie à l'article 2 s'entend pour une réception prononcée au plus tard le 30 mai 1997 et des levées de réserves intervenant au plus tard le 31 juillet 1997. / Dans le cas où, pour une cause indépendante du maître d'oeuvre, le délai d'exécution ou le délai de levée des réserves serait prolongé, cette indemnité serait majorée de : / -150 000 F HT ferme par mois supplémentaire pour une réception des travaux au-delà du 30 mai 1997 / - 60 000 F HT ferme par mois supplémentaire pour une date de fin de levée des réserves de l'entreprise au-delà d'un délai de deux mois après la date de réception effective. » ; qu'il résulte des stipulations précitées que les parties audit protocole doivent être regardées comme ayant entendu, par l'article 4, prévenir le risque d'un litige ultérieur portant sur l'ajournement de la réception des travaux et de la levée des réserves au-delà des prévisions du marché ;

Considérant qu'il est constant que la commune a versé à l'architecte l'indemnité de 228 673, 52 euros HT (1 500 000 F) précitée destinée à réparer les conséquences des ajournements et modifications de programme intervenus antérieurement à la signature de l'avenant et du protocole précités ; que, à la suite du procès-verbal des opérations préalables à la réception établi par le maître d'oeuvre le 22 juillet 1998, par décision en date du 31 juillet 1998, le maître d'ouvrage a prononcé la réception des travaux avec effet au 15 avril 1998, avec réserves à lever au plus tard le 31 octobre 1998, réserves qui n'ont été effectivement levées que le 1er février 2001 ; que la commune de Boulogne-Billancourt, estimant que la prolongation du délai d'exécution des travaux de 14 mois par rapport aux prévisions du marché et de levée des réserves d'un mois pour le mois d'octobre 1998 relevait du champ d'application de l'article 4 précité, a versé au requérant une indemnité de 329 289,87 euros HT (2 160 000 F), conformément au protocole précité ; que la commune a refusé au requérant de lui verser l'indemnité qu'il réclamait correspondant au retard dans la levée des réserves postérieurement au 1er novembre 1998 ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas sérieusement contesté que ce n'est qu'après la mise en demeure par la commune en date du 3 mars 1999 et son rappel en date du 5 mai 1999, que M. X a organisé des réunions de constat de levée des réserves, lesquelles se sont déroulées entre les mois de juin et août 1999, sa lettre en date du 20 mai 1999 attestant, d'ailleurs, qu'il n'avait défini avant cette dernière date aucune méthodologie à cette fin alors même que la réception, intervenue le 31 juillet 1998 ainsi qu'il a été dit, était assortie de nombreuses et importantes réserves ; que l'ensemble des pièces du dossier révèlent l'absence de véritable implication de sa part en termes d'analyse technique et de mesures concrètes à prendre afin de faire respecter les délais de levée des réserves, ainsi qu'en atteste, par exemple, sa correspondance en date du 22 novembre 1999, ayant pourtant pour objet l'analyse du rapport de synthèse de l'entreprise générale relatif aux visites de levée des réserves, dont les plus bénignes parmi celles qualifiées de « non levables » par l'entreprise auraient pu faire l'objet d'une simple mesure de réfaction ; qu'il n'établit ni la réalité des difficultés qu'il prétend avoir subies de la part de l'entreprise générale dans sa mission de levée des réserves avant le refus express opposé par celle-ci le 13 janvier 2000, ni, a fortiori, que ces difficultés aient excédé les aléas normalement prévisibles pour un homme de l'art titulaire d'un marché de maîtrise d'oeuvre à forfait alors même qu'il n'allègue pas davantage avoir jamais proposé concrètement sur la période litigieuse au maître d'ouvrage la mise en oeuvre des pouvoirs de contrôle, de coercition et de sanction qu'il tient des stipulations contractuelles, et notamment du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, à proportion de la gravité des malfaçons et des retards en cause, malgré les rappels à l'ordre réitérés du maître d'ouvrage ; qu'il s'ensuit que, comme le soutient à bon droit la commune, les retards dans la levée des réserves par rapport aux prévisions de la décision de réception ne sauraient être regardés comme une prolongation du délai de levée des réserves résultant d'une cause indépendante du maître d'oeuvre au sens des stipulations précitées du protocole, insusceptible de lui ouvrir droit, dans ces conditions, à l'indemnité qu'il demande à ce titre ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation de la commune au titre du marché de maîtrise d'oeuvre :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 3 du cahier des clauses administratives particulières du marché de maîtrise d'oeuvre : « Nature de la mission : / Mission de maîtrise d'oeuvre sans projet de type m2 (1ère catégorie) selon les termes du décret 73.207 du 28 février 1973, qui comprend : / (...) Un Dossier des Ouvrages Exécutés (DOE) » ; qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article 9 du cahier précité : « (...) Les éléments APS, APD, DCE, AMT et DOE ne pourront faire l'objet que d'un seul règlement par élément à l'achèvement complet des prestations afférentes (...) » ; qu'il est constant que les prestations réalisées au titre de l'élément de mission du dossier des ouvrages exécutés dont le requérant demande de paiement n'ont pas été achevées ; qu'il s'ensuit que, en tout état de cause, il ne saurait avoir droit à leur règlement sur le fondement des stipulations précitées lui confiant une mission complète à ce titre ; que, si le requérant fait valoir qu'il n'a pu achever lesdites prestations en raison de l'opposition de l'entreprise générale, il n'établit ni même n'allègue aucune faute de la commune de nature à engager sa responsabilité alors même qu'il est tenu à son égard à une obligation de résultat au titre de cet élément de mission ;

Considérant, en second lieu, qu'en vertu des dispositions de l'article 132 du code des marchés publics, applicables au marché en cause par l'effet de l'article 322 du même code, dans leur rédaction alors en vigueur, et le septième alinéa de l'article 9 du cahier des clauses administratives particulières du marché de maîtrise d'oeuvre, la commune de Boulogne-Billancourt est fondée à conserver par devers elle, en l'absence d'achèvement des prestations, la retenue destinée à garantir la bonne exécution des obligations contractuelles incombant au maître d'oeuvre ; qu'il appartiendra à celui-ci de demander à la commune, s'il s'y croit fondé, le remboursement de ladite garantie à l'achèvement de ses prestations ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation de la commune à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive :

Considérant que M. X ne fait état d'aucun élément permettant d'établir que la commune de Boulogne-Billancourt aurait fait preuve d'une résistance abusive et injustifiée de nature à lui ouvrir droit à indemnité ; que, dès lors, la demande présentée au titre de ce chef de préjudice ne peut qu'être rejetée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions de l'appel incident de la commune de Boulogne-Billancourt :

Considérant que, si la commune soutient, à nouveau, en appel que l'architecte aurait manqué à son obligation de conseil en omettant d'appeler l'attention du maître d'ouvrage sur de nombreuses malfaçons qui auraient dû faire l'objet de réserves à la réception, elle n'établit pas davantage devant la cour qu'en première instance la réalité du préjudice dont elle demande réparation à hauteur de la somme de 932 950, 92 euros HT ni le lien de causalité entre ce préjudice et de prétendus manquements du maître d'oeuvre en se bornant à produire une liste de rubriques et des factures de travaux commandés par elle sans faire référence à aucun constat contradictoire tels qu'ils doivent être établis notamment au sens de l'article 12 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ; que, dès lors, les conclusions de la commune de Boulogne-Billancourt tendant à la réformation du jugement attaqué sur ce point ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Boulogne-Billancourt, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à M. X la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. X la somme de 1 000 euros en application des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : M. X versera à la commune de Boulogne-Billancourt la somme de 1 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de l'appel incident de la commune de Boulogne-Billancourt sont rejetées.

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N° 06PA00229


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 06PA00229
Date de la décision : 15/12/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés FOURNIER DE LAURIERE
Rapporteur ?: M. Ermès Dellevedove
Rapporteur public ?: Mme DELY
Avocat(s) : SCP TIRARD et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2008-12-15;06pa00229 ?
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