Vu la requête, enregistrée le 8 décembre 2006, présentée pour la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE ET DES CADRES DE L'INDUSTRIE ET DU COMMERCE (M.A.C.I.F.), ayant son siège social 224 avenue de la Rochelle à Niort (79055), par Me Pytkiewicz ; la société M.A.C.I.F. demande à la cour :
1°) de réformer le jugement n° 0401857 en date du 17 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Paris n'a qu'en partie fait droit à sa demande tendant à ce que le centre hospitalier Sainte-Anne soit condamné à lui verser une somme de 535 842, 73 euros en réparation des préjudices résultant de l'infection nosocomiale dont M. X, a été victime alors qu'il était hospitalisé dans cet établissement, du fait d'un accident provoqué par son assuré, M. Y, le 10 mars 2000 ;
2°) de condamner le centre hospitalier Sainte-Anne à lui verser la somme de 432 842, 73 euros ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier Sainte-Anne, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 avril 2008 :
- le rapport de M. Demouveaux, rapporteur,
- les observations de Me Debois, pour la M.A.C.I.F,
- et les conclusions de M. Jarrige, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, le 10 mars 2000, à Vincennes, M. X, alors qu'il traversait une rue à pied, a été renversé par un véhicule conduit par M. Y, dont la M.A.C.I.F. était l'assureur ; que M. X a contracté une infection nosocomiale au cours de l'opération chirurgicale qui a été pratiquée sur lui, au centre hospitalier Sainte-Anne à la suite de cet accident ; que, par le jugement contesté, le Tribunal administratif de Paris a condamné le centre hospitalier Sainte-Anne à verser à la M.A.C.I.F. la somme de 103 000 euros en remboursement des indemnités qu'elle a versées à M. X et à la Caisse primaire d'assurance maladie de Paris à raison de ce dommage ; que la M.A.C.I.F. demande la réformation de ce jugement en tant qu'il a refusé de porter au-delà de 274 282 euros la somme qu'elle était recevable à réclamer ;
Sur la recevabilité de la demande :
Considérant que la M.A.C.I.F. a produit, pour la première fois en appel, une lettre, en date du 27 décembre 2006, du responsable de la fonction « recours contre tiers » de la Caisse primaire d'assurance maladie de Paris certifiant avoir reçu le paiement par la M.A.C.I.F. de la somme de 422 063, 61 euros, en remboursement des prestations sociales exposées à la suite de l'accident survenu le 10 mars 2000 à M. X, augmentée d'une somme de 760 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ; que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la M.A.C.I.F. est donc recevable à rechercher la condamnation du centre hospitalier Sainte-Anne à hauteur de cette somme, ainsi que de celle de 274 282 euros versée à M. X ;
Sur le lien de causalité :
Considérant, que la M.A.C.I.F. estime à 267 270, 25 euros les frais d'hospitalisation, de convalescence et de rééducation imputables aux conséquences de l'infection nosocomiale contractée par M. X, ces frais ayant été exposés postérieurement au 30 octobre 2000 ; que si le centre hospitalier Sainte-Anne conteste l'existence d'un lien de causalité entre l'ensemble des soins dispensés après cette date et l'infection nosocomiale, il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport d'expertise qu'un staphylocoque doré a été mis en évidence lors de l'intervention du 23 novembre 2000 et que, sans cette apparition et la nécrose osseuse qui s'en est ensuivie, la fracture consécutive à l'accident de la circulation aurait été consolidée à la date du 30 octobre 2000 ; que les sommes versées par la M.A.C.I.F. à la Caisse primaire d'assurance maladie de Paris, au titre des frais exposés après cette date, doivent donc être regardées comme directement liées à l'infection nosocomiale contractée au centre hospitalier Sainte-Anne ;
Sur le préjudice :
Considérant, en premier lieu, que la M.A.C.I.F. justifie avoir versé à la Caisse primaire d'assurance maladie de Paris, du fait de l'infection nosocomiale contractée par M. X au centre hospitalier Sainte-Anne, la somme de 267 270, 65 euros ; qu'elle est donc en droit d'en obtenir le versement ; qu'il y a lieu d'ajouter à cette somme celle de 6 832, 98 euros au titre du capital représentatif des frais futurs d'appareillage dès lors que l'état de la victime nécessite le renouvellement périodique de sa prothèse ; qu'en revanche, la M.A.C.I.F. n'établit ni ne précise la nature et le montant de la somme de 2 000 euros qu'elle réclame au titre des frais médicaux et de transport ; que ses conclusions à ce titre doivent donc être rejetées ;
Considérant, en deuxième lieu, que la M.A.C.I.F. réclame au titre de l'indemnité temporaire totale de M. X, de ses troubles dans les conditions d'existence, lesquels résultent d'une invalidité de 27 %, et du préjudice professionnel, consistant en l'impossibilité d'exercer à nouveau la profession de déménageur, les sommes respectives de 47 002 euros, 91 470 euros et de 43 642, 50 euros ; que, toutefois, aucun préjudice financier lié à une perte de revenus n'est établi ni même allégué, M. X étant demandeur d'emploi à la date des faits, non plus qu'aucun préjudice lié à l'invalidité temporaire totale qui ne soit déjà réparé par ailleurs ; que, s'agissant du préjudice professionnel, évalué par les premiers juges à 47 000 euros, la M.A.C.I.F. n'apporte pas d'éléments nouveaux susceptibles de remettre en cause cette évaluation, l'évolution de la situation professionnelle de M. X à la suite de l'accident n'étant notamment pas précisée ; qu'il n'est pas établi que la victime ait eu à souffrir, du fait de son amputation, d'un préjudice sexuel ni qu'il ait pratiqué auparavant des activités sportives ; qu'ainsi, il ne résulte pas de l'instruction qu'en accordant une somme de 87 000 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence et du préjudice professionnel, le tribunal administratif ait fait de ces chefs de préjudice une insuffisante évaluation ;
Considérant toutefois que M. X a été affecté, du seul fait de l'infection nosocomiale, d'une incapacité temporaire totale de 23 mois ; que ce préjudice revêtant un caractère distinct de celui pouvant être subi au titre de la perte de revenus, il y a lieu de le réparer par une indemnité spécifique ; que, dans les circonstances de l'espèce, il en sera fait une juste évaluation en le fixant à 9 200 euros ;
Considérant, en troisième lieu, que du fait de la faute du centre hospitalier Sainte-Anne, M. X a enduré des souffrances chiffrées à 6 par l'expert sur une échelle de 7, alors qu'elles n'auraient été que de 3,5 en l'absence d'amputation et que le préjudice esthétique aurait selon l'expert été de 1 sur une échelle de 7, alors qu'il est en définitive de 7 ; que le tribunal administratif a fait de ce dernier chef de préjudice une estimation insuffisante en le fixant à 13 000 euros ; qu'il y a lieu de la porter à 20 000 euros ; qu'en fixant à une somme de 3 000 euros la réparation de la part des souffrances physiques de M. X imputable à la faute du centre hospitalier Sainte-Anne, le Tribunal administratif de Paris a également fait une appréciation insuffisante de ce chef de préjudice ; qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en allouant à ce titre la somme de 10 000 euros ;
Considérant qu'il suit de là que la M.A.C.I.F. est fondée à demander que le centre hospitalier soit condamné à lui verser, en sus des indemnités reçues en exécution du jugement susvisé du Tribunal administratif de Paris, la somme de 297 303, 63 euros ; que ce jugement doit donc être réformé dans cette mesure ; que les dispositions susvisées font obstacle à ce que la société M.A.C.I.F., qui, pour l'essentiel, n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer au centre hospitalier Sainte-Anne tout ou partie de la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier Sainte-Anne la somme de 2 000 euros au titre des mêmes dispositions ;
D E C I D E :
Article 1er : La somme que le centre hospitalier Sainte-Anne a été condamné à verser à la société M.A.C.I.F. par l'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Paris est portée à 297 303, 63 euros .
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 17 octobre 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le centre hospitalier Sainte-Anne versera à la société M.A.C.I.F. la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
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N° 06PA03996