Vu la requête, enregistrée le 29 mai 2006, présentée pour M. et Mme Antoine X demeurant ... par Me Saint Marcoux ; M et Mme X demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9902317/2/2, en date du 24 avril 2006, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur requête tendant à obtenir la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, et des pénalités y afférentes, auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1992, 1993 et 1994 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention fiscale franco-libanaise du 24 juillet 1962 et l'accord franco libanais résultant d'un échange de lettres en date des 15 juillet et 30 septembre 1986 entre le ministre du budget et l'ambassadeur du Liban en France ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 novembre 2007 :
- le rapport de M. Pujalte, rapporteur,
- les observations de Me Saint-Marcoux, pour M. et Mme X,
- et les conclusions de M. Adrot, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. et Mme X, de nationalité libanaise, ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale d'ensemble au titre des années 1992, 1993 et 1994 ; qu'à l'issue de ce contrôle le service vérificateur leur a notifié différents redressements fondés sur les dispositions de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales pour l'année 1992, 168 du code général des impôts pour l'année 1993, et L. 63 du livre des procédures fiscales et 168 du code général des impôts pour l'année 1994 ; qu'ils relèvent régulièrement appel du jugement du Tribunal administratif de Paris, susvisé, qui a rejeté leur demande ;
Sur le principe de l'imposition en France des requérants :
Considérant que pour demander la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1992, 1993 et 1994 les requérants font valoir qu'ils avaient, pour lesdites années, leur domicile fiscal au Liban ;
En ce qui concerne la domiciliation fiscale des requérants au regard de la loi fiscale française :
Considérant qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : « Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française » ; qu'aux termes de l'article 4 B du même code : «1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a) Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de séjour principal ; b) Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; c) Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques (...) » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les requérants disposaient d'un domicile situé 14 rue des Sablons à Paris (75016) auquel se rattachent des consommations régulières d'énergie et l'utilisation régulière d'une ligne téléphonique, et de deux véhicules immatriculés en France ; que si l'attestation du maire de la localité d'Achrafieh au Liban, en date du 26 juillet 1995, établit qu'à cette date, postérieure aux années en litige, les intéressés y résidaient elle n'induit aucunement qu'ils y résidaient antérieurement ; que si l'examen du passeport de M. X qui bénéficiait d'un visa « à entrées multiples » permet tout au plus d'établir qu'il est entré sur le territoire français à plusieurs reprises au cours des années contestées il ne permet pas, à lui seul, d'établir ni la durée de ses séjours au Liban ni, a fortiori, la durée de ses séjours en France ; que, dans ces conditions et dans la mesure où les pièces produites ne démontrent pas l'existence d'une résidence habituelle au Liban, les requérants doivent être regardés comme ayant établi leur foyer en France au sens des dispositions précitées de l'article 4 B du code général des impôts ; qu'il suit de là qu'ils étaient passibles de l'impôt sur le revenu à raison de l'ensemble de leurs revenus, au titre des trois années en cause, sauf à établir leur droit de se prévaloir des stipulations de la convention franco- libanaise du 24 juillet 1962 ;
En ce qui concerne l'application de la convention franco- libanaise du 24 juillet 1962 :
Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 2 de la convention conclue le 24 juillet 1962 entre la France et le Liban : « 1.-Au sens de la présente convention, on entend par « résident d'un État contractant » toute personne qui, en vertu dudit État, est assujettie à l'impôt dans cet État, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère analogue. 2. Lorsque selon la disposition du paragraphe 1 ci-dessus, une personne physique est considérée comme résidente de chacun des deux Etats contractants, cette personne est réputée résidente de celui des deux Etats où se trouve le centre de ses intérêts vitaux, c'est-à-dire le lieu avec lequel ses relations personnelles et professionnelles sont les plus étroites. 3. Si l'État contractant où la personne physique a le centre de ses intérêts vitaux ne peut pas être déterminé, cette personne physique est réputée résidente de celui des deux Etats où elle séjourne le plus longtemps. » ;
Considérant que, pour soutenir qu'au titre des années en litige ils doivent être regardés comme résidents du Liban, au sens de ces stipulations, les requérants font valoir qu'ils avaient leur résidence habituelle au Liban et non pas en France ; que, toutefois, et ainsi qu'il a été dit ci-avant, ils n'en justifient pas et ne justifient pas davantage avoir été assujettis à l'impôt au Liban à raison de leur domicile ou de leur résidence ; qu'ainsi ils ne sont pas fondés à se prévaloir des stipulations précitées de la convention franco-libanaise ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 376 de l'annexe II du code général des impôts alors en vigueur : « ... Les fonctionnaires (de la direction générale des impôts) ... peuvent dans le ressort territorial du service où ils sont affectés fixer les bases d'imposition ou notifier les redressements » ; qu'il résulte de ces dispositions que les fonctionnaires de la direction générale des impôts sont compétents pour exercer les droits de vérification et de communication dans l'ensemble du ressort du service auquel ils sont affectés ; que l'inspecteur des impôts dont s'agit, relevant de la direction générale des impôts, et appartenant à la brigade de fiscalité personnelle et de contrôle des revenus du 7ème arrondissement de Paris, qui a procédé à l'examen contradictoire de la situation fiscale d'ensemble des époux X, puis a arrêté les bases de leur imposition, était affecté à la direction des services fiscaux de Paris-Ouest dont dépend le 16ème arrondissement de Paris où était situé le domicile des requérants ; que, dès lors, ceux-ci ne sont pas fondés à soutenir que le vérificateur n'était pas compétent pour effectuer ledit contrôle dont ont procédé les impositions contestées ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Sur la taxation d'office des revenus de l'année 1992 fondée sur le crédit bancaire de 500 000 F :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : « Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. » ; qu'aux termes de l'article L. 66-1 du même livre : « Sont taxés d'office : 1° à l'impôt sur le revenu, les contribuables qui n'ont pas déposé dans le délai légal la déclaration d'ensemble de leurs revenus (...) » ;
Considérant que les requérants soutiennent que la somme de 500 000 F correspondrait à un prêt consenti par la mère de M. X qui aurait été réalisé par l'intermédiaire de l'entreprise familiale Promomarket ; que, pour justifier de l'origine de cette somme, ils produisent une attestation de ladite entreprise qui se borne simplement à indiquer qu'elle « a bien effectué au cours des cinq dernières années au débit de son compte, des virements en faveur de M. X » ; qu'ainsi ce document eu égard à son imprécision ne permet aucunement ni d'identifier la provenance de la somme en litige, ni d'établir qu'il s'agisse d'un prêt ;
Sur le principe de la mise en oeuvre des dispositions de l'article 168 du code général des impôts :
Considérant qu'aux termes de l'article 168 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : «1. En cas de disproportion marquée entre le train de vie d'un contribuable et ses revenus, la base d'imposition à l'impôt sur le revenu est portée à une somme forfaitaire déterminée en appliquant à certains éléments de ce train de vie le barème ci-après (...) Les revenus visés au présent article sont ceux qui résultent de la déclaration du contribuable et, en cas d'absence de déclaration, ils sont comptés pour zéro (…) ; 2 bis La disproportion marquée entre le train de vie d'un contribuable et ses revenus est établie lorsque la somme forfaitaire qui résulte de l'application du barème et de la majoration prévus au 1 et 2 excède d'au moins un tiers, pour l'année de l'imposition et l'année précédente, le montant du revenu net global déclaré, y compris les revenus exonérés ou taxés selon un taux proportionnel ou libéré de l'impôt par l'application d'un prélèvement (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que la taxation forfaitaire est applicable même en l'absence de déclaration d'ensemble des revenus ;
Considérant que pour contester la décision de l'administration de faire application des dispositions de l'article 168 précité, les requérants soutiennent que leur revenu forfaitaire, au titre de l'année 1993, déterminé par application à certains éléments de leur train de vie du barème susvisé, n'excède pas d'au moins un tiers le montant de leur revenu imposé au titre de l'année précédente 1992 ; que, cependant, et en premier lieu, la taxation forfaitaire est applicable dans l'hypothèse où le montant de l'évaluation forfaitaire excède d'au moins un tiers, pour l'année d'imposition et l'année précédente, le montant du revenu net global déclaré ; qu'en deuxième lieu, en l'absence, comme en l'espèce, de déclaration d'ensemble des revenus, les revenus du contribuable sont comptés pour zéro ; qu'en dernier lieu, le revenu déclaré qui doit être comparé au train de vie pour l'appréciation de la disproportion marquée, s'entend du revenu net global déclaré par le contribuable, abstraction faite des rehaussements auxquels le service a procédé ultérieurement et des sommes qui n'ont pas été déclarées par le contribuable ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que l'administration a mis en oeuvre la procédure prévue par les dispositions précitées de l'article 168 du code général des impôts ;
Sur l'application du régime d'imposition de l'accord franco-libanais résultant d'un échange de lettres, en date des 15 juillet et 30 septembre 1986, entre le ministre du budget et l'ambassadeur du Liban en France :
Considérant qu'en application de l'accord franco-libanais susvisé, les ressortissants libanais réfugiés en France, après 1974, et disposant principalement de revenus d'origine étrangère peuvent opter pour un barème d'imposition fondé sur la valeur forfaitaire de certains éléments du train de vie nécessaire à l'application de ce barème ; que l'application de ce régime est subordonnée à la production, avant le 1er mars de chaque année, d'une déclaration mentionnant les éléments de train de vie nécessaire à l'application de ce barème ; que les requérants ont déposé, hors délai, cette déclaration le 7 avril 1995 après avoir reçu l'avis de vérification relatif à l'examen de leur situation fiscale personnelle ; qu'ils ne sont, dès lors, pas fondés à solliciter, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, le bénéfice des stipulations de l'accord franco-libanais invoqué ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur requête ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.
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N° 06PA01947