Vu la requête et le mémoire, enregistrés les 2 avril et 20 juin 2007, présentés pour M. Kamel X demeurant chez M. Mohamed X ..., par Me Boudjellal ; M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0703832/8 du 16 mars 2007 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 mars 2007 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite, et à ce qu'il soit fait injonction audit préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
2°) d'annuler ledit arrêté ;
3°) d'enjoindre à l'administration de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de condamner l'administration à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 et publiée par décret le 8 octobre 1990 ;
Vu l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du 31 janvier 2007 par laquelle le président de la cour a désigné Mme Régnier-Birster, magistrat, pour statuer notamment sur les appels dirigés contre les décisions juridictionnelles rendues en application de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir au cours de l'audience publique du 26 juin 2007, présenté son rapport et entendu :
- les observations de M. X, et celles de Me Diop, pour M. X,
- et les conclusions de M. Trouilly, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1-II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (…) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité algérienne, n'a pas été en mesure de présenter les documents justifiant de son entrée régulière en France et est dépourvu de titre de séjour en cours de validité ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;
Considérant toutefois, que lorsque la loi ou un accord international prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;
Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 6°- 4 de l'accord franco-algérien susvisé : « Le certificat de résidence d'un an portant mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : 4) au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d'ascendant direct d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d'un an est délivré au ressortissant algérien que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an » ;
Considérant que M. X fait valoir qu'il est le père de trois enfants de nationalité française, nés en 1982, 1986 et 1991, de sa relation avec une ressortissante algérienne résidant régulièrement en France avec laquelle il a vécu jusqu'en 1998 ; qu'il a continué, après sa séparation avec la mère de ses enfants, à entretenir des relations régulières avec ces derniers et notamment avec sa fille mineure scolarisée en 3ème dans un collège parisien sur laquelle il exerce conjointement avec son ancienne compagne l'autorité parentale ; que ces déclarations sont corroborées par les pièces au dossier et notamment par deux attestations en date des 16 mars et 20 décembre 2006 de son ancienne compagne ; qu'il ressort de ces éléments que M. X, nonobstant l'absence de ressources régulières, continue d'exercer l'autorité parentale sur sa fille mineure ; qu'il est dès lors en droit de se voir délivrer, en application des dispositions précitées de l'article 6°- 4 de l'accord franco-algérien, un certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » ; qu'il est fondé, par voie de conséquence, à soutenir que le préfet de police ne pouvait pas prendre légalement la mesure de reconduite dont il a fait l'objet et à demander l'annulation du jugement ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé » ; que l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France dispose que : « Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, (.) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas » ;
Considérant que la présente décision prononce l'annulation pour excès de pouvoir d'un arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. X et non celle d'une décision refusant de lui délivrer une carte de séjour temporaire ; que, dès lors, elle n'implique pas nécessairement la délivrance d'une carte de séjour temporaire ; qu'en revanche, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée, au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prescrire au préfet de police de se prononcer sur la situation de M. X dans le délai d'un mois suivant la notification de la présente décision ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le paiement à M. X de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris en date du 16 mars 2007 et l'arrêté préfectoral en date du 13 mars 2007 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X sont annulés.
Article 2 : Le préfet de police se prononcera sur la situation de M. X dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à M. X au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus de la requête de M. X est rejeté.
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N° 07PA01238