Vu la requête, enregistrée le 22 février 2006, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0520211/8 du 18 janvier 2006 en tant que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé la disposition de son arrêté du 5 décembre 2005 fixant l'Angola comme pays de destination de la reconduite à la frontière de M. Nsimbadio X ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Paris ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du 31 janvier 2007 par laquelle le président de la cour a désigné M. Benel pour statuer notamment sur les appels dirigés contre les décisions juridictionnelles rendues en application de l'article L. 512-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juillet 2007 :
- le rapport de M. Benel, rapporteur,
- et les conclusions de M. Bachini, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté les conclusions de M. X dirigées contre l'arrêté du 5 décembre 2005 en tant qu'il ordonnait sa reconduite à la frontière, mais a annulé la décision contenue dans le même arrêté désignant l'Angola comme pays de destination de la reconduite ; que le PREFET DE POLICE demande l'annulation de ce jugement en tant qu'il a accueilli les conclusions de M. X relatives au pays de destination de la reconduite ; que, par voie du recours incident, l'intéressé en demande l'annulation en tant qu'il a rejeté ses conclusions contre la mesure de reconduite et demande le rejet de la requête du PREFET DE POLICE ;
Sur l'appel incident de M. X :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité angolaise, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 6 août 2005, de la décision du préfet de 18 juillet 2005 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X participe activement à l'éducation de sES deux enfants, nés en France en 2003 et 2005 ; que l'épouse du requérant est atteinte d'une grave maladie, nécessitant des soins qu'elle ne pourrait recevoir en Angola et qu'elle a d'ailleurs bénéficié, pour ce motif, d'un titre de séjour temporaire ; qu'il n'est pas contesté que, bien que l'autorisation provisoire de séjour ait été délivrée postérieurement à la décision attaquée, l'état de santé de l'intéressée préexistait à cette décision ; que, dans les circonstances de l'affaire, eu égard notamment à l'intérêt de sa présence pour sa famille séjournant en France, la mesure de reconduite prise à l'encontre de M. X porte au droit de celui-ci au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels ladite mesure a été prise ; qu'ainsi le PREFET DE POLICE a méconnu les stipulations conventionnelles précitées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à demander l'annulation du jugement du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du décembre 2005 ordonnant sa reconduite à la frontière ;
Sur l'appel principal du PREFET DE POLICE :
Considérant que, par suite de l'annulation, prononcée par la présente décision, de l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. X, la requête du PREFET DE POLICE tendant à l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 18 janvier 2006, annulant ce même arrêté seulement en tant qu'il fixe l'Angola comme pays de destination de la reconduite de l'intéressé, est devenue sans objet ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que M. X a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Besse, avocat de M. X, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros que demande M. X sur le fondement de ces dispositions ;
D E C I D E :
Article 1er : L'article 2 du jugement du 3 janvier 2006 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 5 décembre 2005 du PREFET DE POLICE ordonnant la reconduite à la frontière de M. X sont annulés.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du PREFET DE POLICE.
Article 3 : L'Etat versera à Me Besse, avocat de M. X, une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
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N° 01PA02043
SOCIETE EUROSIC
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No 06PA00712