La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/04/2007 | FRANCE | N°06PA00945

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre - formation b, 27 avril 2007, 06PA00945


Vu la requête, enregistrée le 10 mars 2006, présentée pour la société anonyme MAISON BOSC, dont le siège social est situé 3 boulevard du Palais à Paris (75004), par Me Rolland, avocat ; la société MAISON BOSC demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris du 10 janvier 2006 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er juillet 1993 au 31 janvier 1997 et des pénalités dont ces droits étaient assortis ;

2°)

de prononcer la décharge de ces droits et de ces pénalités ;

-----------------------...

Vu la requête, enregistrée le 10 mars 2006, présentée pour la société anonyme MAISON BOSC, dont le siège social est situé 3 boulevard du Palais à Paris (75004), par Me Rolland, avocat ; la société MAISON BOSC demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris du 10 janvier 2006 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er juillet 1993 au 31 janvier 1997 et des pénalités dont ces droits étaient assortis ;

2°) de prononcer la décharge de ces droits et de ces pénalités ;

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 avril 2007 :

- le rapport de M. Dalle, rapporteur ;

- les conclusions de M. Bataille, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la S.A. MAISON BOSC exerce une activité de costumier des cours, tribunaux et universités ; qu'elle conteste des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été mis à sa charge à la suite de deux vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, ayant porté sur les périodes, respectivement, du 1er juillet 1993 au 31 janvier 1996 et du 1er février 1996 au 31 janvier 1997 ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que le rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la société MAISON BOSC au titre de la période du 1er février 1996 au 31 janvier 1997 a été assorti de la majoration de 150 % pour opposition à contrôle fiscal, prévue par les dispositions alors applicables de l'article 1730 du code général des impôts ; que, par décision en date du 5 octobre 2006, postérieure à l'introduction de la requête devant la cour, l'administration fiscale a dégrevé cette majoration à concurrence de la somme de 27 074,64 euros ; que les conclusions à fin de décharge de la société MAISON BOSC sont donc, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur le surplus des conclusions :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par jugement du 11 décembre 1997, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure simplifiée de redressement judiciaire à l'encontre de la société MAISON BOSC et désigné X comme administrateur judiciaire avec mission d'assurer seul l'administration de l'entreprise ; que suivant jugement en date du 25 mai 1998, le tribunal de commerce de Paris a transformé la procédure simplifiée en procédure générale de redressement judiciaire et modifié la mission de X en mission d'assistance ; que les redressements afférents à la période du 1er juillet 1993 au 31 janvier 1996 ont été notifiés par l'administration à X par deux notifications en date du 15 décembre 1997 et du 8 janvier 1998 et ceux afférents à la période du 1er février 1996 au 31 janvier 1997 par une notification en date du 20 janvier 1998 ; que Y, président directeur général de la société MAISON BOSC, a répondu à ces trois notifications, dont une copie avait été adressée à la société MAISON BOSC, par trois courriers datés des 14 et 30 janvier et du 2 février 1998, dans lesquels elle précisait qu'elle contestait les redressements et que l'administrateur judiciaire répondrait dans les meilleurs délais aux notifications ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'administrateur judiciaire ait donné suite à l'intention ainsi exprimée par la dirigeante de l'entreprise ; que les impositions litigieuses ont été mises en recouvrement le 5 juin 1998 ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 31 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, alors applicable, relative au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises : « Outre les pouvoirs qui leur sont conférés par la présente loi, la mission du ou des administrateurs est fixée par le tribunal. Ce dernier les charge ensemble ou séparément : 1° Soit de surveiller les opérations de gestion ; 2° Soit d'assister le débiteur pour tous les actes concernant la gestion ou certains d'entre eux ; 3° Soit d'assurer seuls, entièrement ou en partie, l'administration de l'entreprise » ; qu'en vertu de l'article 141 de la même loi, applicable aux entreprises faisant l'objet d'une procédure simplifiée, pendant la période d'observation l'activité est poursuivie par le débiteur sauf s'il apparaît nécessaire au tribunal de nommer un administrateur, qui peut être un administrateur judiciaire, le débiteur étant alors soit dessaisi et représenté par l'administrateur, soit assisté par celui-ci ; que les règles ainsi posées, relatives au dessaisissement du débiteur, ne sont édictées que dans l'intérêt des créanciers ; que, dès lors, seul l'administrateur désigné par le tribunal peut s'en prévaloir pour contester la validité des actes de gestion accomplis par le débiteur ; qu'en l'espèce, il ne résulte d'aucune des pièces produites que l'administrateur judiciaire aurait contesté les observations présentées les 14 et 30 janvier et le 2 février 1998 par Y ; que celles-ci doivent être regardées par suite comme ayant été valablement présentées par l'intéressée ; qu'il suit de là que, l'administration ayant mis en recouvrement les impositions correspondant aux redressements notifiés sans les avoir au préalable confirmés, en réponse aux courriers susmentionnés de Y, les dispositions de l'article L 57 du livre des procédures fiscales prévoyant que l'administration doit rejeter les observations du contribuable par une réponse motivée ont été méconnues ; que la procédure d'imposition se trouve de ce fait entachée d'irrégularité ;

Considérant, toutefois, que cette irrégularité ne peut affecter que les redressements établis à l'issue d'une procédure d'imposition contradictoire ; que le rappel de taxe sur la valeur ajoutée relatif à la période du 1er février 1996 au 31 janvier 1997 a été établi selon la procédure d'évaluation d'office, prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales ; que cette procédure doit être regardée comme ayant été mise en oeuvre à bon droit à l'encontre de la société MAISON BOSC dès lors qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur n'a été informé que lors d'un troisième rendez-vous au siège de l'entreprise que la comptabilité de celle-ci se trouvait chez un comptable, lequel ne détenait en réalité qu'une comptabilité incomplète, sans valeur probante, ce que la dirigeante de la société MAISON BOSC ne pouvait ignorer ; qu'ainsi, les impositions afférentes à la période du 1er février 1996 au 31 janvier 1997 ayant été établies selon une procédure d'évaluation d'office, employée en l'espèce à bon droit à l'encontre de la société MAISON BOSC, il y a lieu de limiter la décharge dont peut bénéficier la société MAISON BOSC aux seules impositions établies au titre de la période du 1er juillet 1993 au 31 janvier 1996 ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'à le supposer fondé le moyen tiré de ce que l'administration n'a pas donné suite à la demande de saisine de l'inspecteur principal présentée le 30 avril 1998 par la dirigeante de la société MAISON BOSC ne serait opérant qu'en ce qui concerne les impositions établies selon une procédure contradictoire ; qu'ainsi qu'il vient d'être dit, les impositions en cause, établies au titre de la période du 1er juillet 1993 au 31 janvier 1996, doivent être déchargées ; que ce moyen est dès lors devenu sans objet ;

Considérant, en troisième lieu, que la société MAISON BOSC soutient qu'elle aurait dû être destinataire des notifications de redressements ; que, toutefois, le Tribunal de commerce de Paris ayant expressément confié à l'administrateur judiciaire le soin d'administrer seul la société, l'administration n'était nullement tenue de notifier les redressements à la société ; que la requérante ne peut invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les termes de la documentation administrative de base référencées 13 L-1513 et 13 L ;1514, qui traitent de questions relatives à la procédure d'imposition et, en tout état de cause, ne contiennent pas d'interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il vient d'être fait application ; que, dès lors, la circonstance que la notification de redressements du 20 janvier 1998, dont procèdent les impositions établies au titre de la période du 1er février 1996 au 31 janvier 1997, selon la procédure d'évaluation d'office, n'ait pas été notifiée à la société MAISON BOSC est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

En ce qui concerne le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée litigieux :

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en l'absence de comptabilité, le service a, en ce qui concerne la période du 1er février 1996 au 31 janvier 1997, déterminé le chiffre d'affaires taxable à la taxe sur la valeur ajoutée de la société à partir des crédits enregistrés sur un compte bancaire ; qu'il a obtenu un chiffre d'affaires TTC, pour la période en cause, de 3 516 256 F, correspondant à un montant de taxe sur la valeur ajoutée due au titre de la même période de 600 620 F ; que la société requérante conteste ce montant de TVA exigible ; qu'elle soutient qu'il doit être réduit pour tenir compte des exportations, exonérées de TVA, qu'elle a réalisées ; qu'eu égard aux justifications produites par la société, l'administration a admis la réalité de certaines exportations effectuées par la requérante et réduit en conséquence de 600 620 F à 461 025 F le montant de TVA exigible ; que, cependant, l'administration conteste le caractère probant des autres justificatifs d'exportation présentés par la requérante et refuse d'accorder à celle-ci un dégrèvement supplémentaire ; que les justificatifs en cause sont, soit des relevés ou avis d'opérations bancaires, qui, en tant que tels, ne constituent pas la preuve de la réalité des exportations, même s'ils font apparaître que le donneur d'ordre est établi à l'étranger ou mentionnent comme motif du paiement le règlement de l'achat de costumes destinés à des membres de professions judiciaires, soit des documents illisibles ; que la requérante n'établit donc pas que le montant de TVA exigible, déterminé par l'administration pour la période du 1er février 1996 au 31 janvier 1997, serait exagéré ;

Considérant, par ailleurs, que la société requérante demande la prise en compte, au titre de cette période, de montants de TVA déductible de 34 437 F et 61 534 F, correspondant respectivement à des prestations facturées par sa société mère, la société Veni Creator, et à des frais généraux ; que, cependant, l'administration conteste que les prestations facturées par la société Veni Creator aient été réglées par la société MAISON BOSC et celle-ci ne démontre pas la réalité des paiements ; qu'alors que 57 factures de la société Veni Creator sont en litige, deux chèques et un ordre de virement seulement sont produits, dont le montant total ne correspond d'ailleurs pas à celui des factures ; que si la requérante soutient que les paiements ont été effectués en trois fois, par souci de simplification et eu égard aux relations existant entre les deux sociétés, et dit produire à l'appui de ses allégations la balance générale des deux sociétés, retraçant ces opérations, le seul document versé au dossier est une balance provisoire, dont il n'est pas précisé si elle concerne la société MAISON BOSC ou la société Veni Creator et qui, en tout état de cause, a été établie pour la période du 1er juillet 1995 au 31 janvier 1996 et non pour celle, en litige, du 1er février 1996 au 31 janvier 1997 ; que, s'agissant de la TVA sur frais généraux, la requérante ne produit aucune facture et ne peut invoquer à cet égard le vol desdites factures et d'une partie de sa comptabilité ; qu'en outre, alors qu'elle supporte la charge de la preuve sur ce point dès lors qu'elle est en situation d'évaluation d'office, elle n'établit pas que ces dépenses étaient nécessaires à l'entreprise, ce que l'administration conteste ;

En ce qui concerne les discordances relevées entre le montant de chiffre d'affaires servant à déterminer l'impôt sur les sociétés et celui servant à déterminer la taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant que la requérante indique elle-même dans son mémoire en réplique devant le tribunal administratif que la demande qu'elle présente à ce titre ne concerne que l'exercice clos le 31 janvier 1996 et non la période, restant en litige, du 1er février 1996 au 31 janvier 1997 ;

En ce qui concerne la demande de compensation :

Considérant que la société MAISON BOSC demande que les rappels de TVA qui lui sont assignés soient compensés par le dégrèvement résultant de ce qu'elle aurait omis d'imputer la taxe sur la valeur ajoutée afférente à des loyers facturés en 1993, 1994 et 1995 par la SCI du Palais, propriétaire d'un immeuble qu'elle prenait en location ; que l'administration nie toutefois que ces loyers aient été payés et la société MAISON BOSC n'apporte aucune preuve de la réalité des paiements ; que si elle indique produire des justificatifs de leur réalité, lesdits justificatifs ne concernent pas des loyers mais d'autres frais généraux ; que la demande de compensation ne peut donc être admise ;

En ce qui concerne la pénalité pour opposition à contrôle fiscal :

Considérant qu'aux termes de l'article 1730 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : « Dans le cas d'évaluation d'office des bases d'imposition prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, les suppléments de droits mis à la charge du contribuable sont assortis, outre l'intérêt de retard visé à l'article 1727 calculé dans les conditions définies aux articles 1727 A et 1729 ;2, d'une majoration de 150 % » ;

Considérant que les faits sus-évoqués, relevés par le service, caractérisent l'opposition à contrôle fiscal ; que la demande de la société MAISON BOSC à fin de décharge de la majoration assortissant le rappel de TVA au taux définitif de 100 % qui lui a été assigné au titre de la période du 1er février 1996 au 31 janvier 1997 ne peut donc qu'être rejetée ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société MAISON BOSC à concurrence de la somme de 27 074,64 euros, en ce qui concerne la majoration prévue à l'article 1730 du code général des impôts.

Article 2 : La société MAISON BOSC est déchargée des droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er juillet 1993 au 31 janvier 1996 et des pénalités y afférentes.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la société MAISON BOSC est rejeté.

Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 10 janvier 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

2

N° 06PA00945


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 06PA00945
Date de la décision : 27/04/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ESTEVE
Rapporteur ?: M. David DALLE
Rapporteur public ?: M. BATAILLE
Avocat(s) : ROLLAND

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2007-04-27;06pa00945 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award