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06/03/2007 | FRANCE | N°04PA03391

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 06 mars 2007, 04PA03391


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 et 23 septembre 2004, présentés pour M. Laurent X demeurant ..., par Me Clada ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0317446/2 du 22 juillet 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 29 janvier 1990 par laquelle le directeur de l'Office des migrations internationales (OMI) a fixé les modalités de calcul de l'indemnité qui lui a été accordée à l'occasion de son départ à la retraite et à la condamnation de l'OMI

à réparer le préjudice subi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladit...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 et 23 septembre 2004, présentés pour M. Laurent X demeurant ..., par Me Clada ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0317446/2 du 22 juillet 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 29 janvier 1990 par laquelle le directeur de l'Office des migrations internationales (OMI) a fixé les modalités de calcul de l'indemnité qui lui a été accordée à l'occasion de son départ à la retraite et à la condamnation de l'OMI à réparer le préjudice subi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision et de condamner l'OMI à lui verser la somme de 14 246,30 euros avec intérêt à compter du 1er janvier 1990 au titre de son préjudice financier et 7 622 euros au titre de son préjudice moral ;

……………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 68-1250 susvisée du 31 décembre 1968 modifiée ;

Vu le décret n° 86-73 du 17 janvier 1986 modifié ;

Vu le décret n° 86-416 du 12 mars 1986 modifié ;

Vu le décret n°2005-381 du 20 avril 2005 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 février 2007 :

- le rapport de M. Lelièvre, rapporteur,

- les observations de Me Savignat, pour l'agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations,

- les conclusions de M. Trouilly, commissaire du gouvernement,

- et connaissance prise de la note en délibéré en date du 14 février 2007, présenté pour M. X, par Me Clada ;

Sur la recevabilité de la requête :

Considérant que l'Office des migrations internationales (OMI), en n'opposant pas de fin de non-recevoir à titre principal à la demande indemnitaire présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Paris, a lié le contentieux ; qu'en tout état de cause, M. X avait présenté une réclamation préalable reçue par l'OMI le 20 décembre 2001 ; que, contrairement à ce que soutient l'administration, M. X n'était pas tenu, à peine d'irrecevabilité, de formuler une nouvelle réclamation préalable avant d'interjeter appel du jugement attaqué ;

Sur les moyens tirés de l'irrégularité du jugement et sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité :

Considérant, en premier lieu, que le juge administratif, saisi de conclusions mettant en jeu la responsabilité de la puissance publique, ne soulève pas d'office un moyen d'ordre public lorsqu'il constate au vu des pièces du dossier qu'une des conditions d'engagement de la responsabilité publique n'est pas remplie et cela alors même qu'il fonde ce constat sur des dispositions législatives ou réglementaires non invoquées en défense ; qu'en conséquence, il n'est pas tenu de procéder à la communication prescrite par les dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative pour les moyens relevés d'office par le juge ; qu'en l'espèce, le Tribunal administratif de Paris n'a commis aucune irrégularité en n'informant pas les parties de ce qu'il comptait, pour rejeter la demande de M. X tendant à l'augmentation de son indemnité de licenciement sur l'absence de faute de l'OMI, faire application du décret du 17 janvier 1986 ; qu'en tout état de cause, l'OMI avait fait valoir en défense que dès lors que M. X avait été admis à la retraite par survenance de la limite d'âge, il n'avait en réalité pas fait l'objet d'un licenciement et n'avait droit à aucune indemnisation à ce titre ; qu'ainsi, en se fondant sur cette circonstance pour rejeter la demande du requérant, le tribunal administratif n'a pas soulevé de moyen d'ordre public ; que les stipulations de l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatives au droit à un procès équitable n'ont pas été méconnues ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en affirmant, d'une part, que le statut des personnels de l'OMI en date du 4 novembre 1955 était applicable à la situation de M. X et, d'autre part, que l'intéressé n'avait droit à aucune indemnité de licenciement, le tribunal administratif n'a pas entaché son jugement d'une contradiction de motifs ;

Considérant, en dernier lieu, que M. X, qui a usé de la possibilité de saisir du litige le Tribunal administratif de Paris, qui est un tribunal indépendant disposant d'un pouvoir de pleine juridiction, n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été privé de son droit à exercer un recours effectif au sens de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur les conclusions de l'OMI opposant la prescription quadriennale :

Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la loi n° 68-1250 susvisée du 31 décembre 1968 : « L'administration doit, pour pouvoir se prévaloir, à propos d'une créance litigieuse, de la prescription prévue par la présente loi, l'invoquer avant que la juridiction saisie du litige au premier degré se soit prononcée sur le fond » ;

Considérant que l'OMI n'a pas opposé la prescription quadriennale devant les premiers juges, lesquels se sont prononcés sur le fond ; que le jugement attaqué n'étant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, entaché d'aucune irrégularité et la cour de céans ne statuant pas, de ce fait, par voie d'évocation, les conclusions de l'OMI, présentées pour la première fois en appel, tendant à l'application de la prescription quadriennale, doivent être rejetées ;

Sur le fond :

En ce qui concerne l'indemnité de licenciement :

Considérant, en premier lieu, que par un arrêt en date du 6 octobre 1998, la cour de céans s'est bornée à constater que, par la décision attaquée du 29 janvier 1990, l'OMI avait réglé la situation de M. X sur la base des textes applicables aux personnels de l'office, notamment le statut du 4 novembre 1955 modifié ; qu'en estimant que M. X ne pouvait se prévaloir de ce statut pour se voir attribuer une indemnité de licenciement, dès lors qu'il avait été admis à la retraite par survenance de la limite d'âge, les premiers juges n'ont pas méconnu l'autorité de la chose jugée par la cour ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu de l'article 52 du décret susvisé du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions applicables aux agents non titulaires de l'Etat et de ses établissements publics, l'indemnité de licenciement n'est pas due lorsque l'agent a atteint l'âge d'entrée en jouissance d'une pension au taux plein du régime d'assurance général d'assurance vieillesse de sécurité sociale ; que M. X, qui avait la qualité d'agent non titulaire d'un établissement public de l'Etat et qui a été admis à la retraite par survenance de la limite d'âge, n'avait ainsi aucun droit au versement d'une indemnité de licenciement ; que les dispositions du décret du 3 février 1955 dont se prévaut le requérant, qui ont d'ailleurs été abrogées par décret du 22 juin 1972, auxquelles renvoie le statut des personnels de l'OMI du 4 novembre 1955, ne conféraient, en tout état de cause, aucun droit à l'attribution d'une indemnité de licenciement aux agents admis à la retraite par la survenance de la limite d'âge de 65 ans ;

Considérant, en dernier lieu, que M. X ne saurait utilement se prévaloir de l'avantage irrégulièrement consenti à un autre agent pour demander à bénéficier du même avantage ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce qu'il serait victime d'une discrimination prohibée par l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou de ce que l'OMI aurait méconnu le principe d'égalité ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce que l'OMI lui verse une indemnité de licenciement ;

En ce qui concerne le remboursement des frais de voyage :

Considérant qu'aux termes de l'article 5 du décret n° 86-416 susvisé du 12 mars 1986 modifié : « Pour l'application du présent décret : 1° La résidence à l'étranger s'entend comme le lieu où l'agent est affecté pour au moins dix mois ; (…) 3° Le changement de résidence s'entend comme un mouvement lié : (…) - à un rapatriement induit par l'admission à la retraite » ; qu'aux termes de l'article 20 dudit décret dans sa version alors applicable : « L'agent changeant de résidence (…) peut prétendre à la prise en charge - des voyages entre son ancienne et sa nouvelle résidence pour lui-même, les membres de sa famille » ; qu'aux termes de l'article 47 du même décret : « (…) la prise en charge des frais de voyage visés au présent décret s'effectue - soit par la délivrance de titres de transport nominatifs dont l'émission a été au préalable assurée par l'administration - soit par remboursement aux intéressés, sur présentation de pièces justificatives nécessaires, et dans la limite du coût qu'aurait représenté la prise en charge directe du voyage par l'administration » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, de fin décembre 1989 à mars 1991, l'OMI a adressé les courriers destinés à M. X à Ajaccio ; que l'intéressé a été inscrit en 1991 sur les listes électorales en Corse ; que l'OMI a décidé, en application du décret précité du 12 mars 1986, de prendre en charge les frais de changement de résidence du Maroc vers la France de l'intéressé autres que ses frais de voyages et ne soutient pas que l'indemnité qui a été versée à ce titre aurait été obtenue par fraude ; que, contrairement à ce qui est soutenu en défense, le voyage que M. X a effectué de Casablanca à Ajaccio en décembre 1989 est intervenu quelques jours avant la date de sa mise à la retraite ; que les dispositions précitées de l'article 47 du décret du 12 mars 1986 ne subordonnent pas le remboursement des frais de voyage à la présentation de pièces justificatives devant l'administration avant toute saisine du juge ; qu'il est constant que les frais de voyages de M. X et de son épouse se sont élevés à 544,85 euros ; qu'ainsi, alors même que le requérant est ultérieurement revenu s'établir au Maroc et que le voyage en cause a eu lieu durant les derniers jours de congé dont il bénéficiait, ce voyage est intervenu dans le cadre de son rapatriement en France ; qu'ainsi, M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'OMI à lui verser la somme de 544,85 euros au titre de ses frais de voyage ; que cette somme portera intérêt à compter de la réclamation préalable reçue par l'OMI le 20 décembre 2001 ;

En ce qui concerne le préjudice moral :

Considérant que M. X ne justifie pas avoir subi de préjudice moral ; que les conclusions présentées à ce titre ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. X, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à l'OMI la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions à l'encontre de l'OMI ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 22 juillet 2004 est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. X tendant à la condamnation de l'Office des migrations internationales à l'indemniser de ses frais de voyage entre Casablanca et Ajaccio.

Article 2 : L'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations, qui s'est substituée à l'Office des migrations internationales, est condamnée à verser la somme de 544,85 euros à M. X. Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 20 décembre 2001.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X et les conclusions de l'Office des migrations internationales au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Laurent X et à l'agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations.

Copie en sera adressée au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

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N° 04PA03391


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 04PA03391
Date de la décision : 06/03/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. MERLOZ
Rapporteur ?: M. Francois LELIEVRE
Rapporteur public ?: M. TROUILLY
Avocat(s) : CLADA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2007-03-06;04pa03391 ?
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