Vu la requête, enregistrée le 10 octobre 2003, présentée pour M. Dominique X, élisant domicile ... par Me Saint Marcoux, avocat ; M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 01-263 du 3 juillet 2003 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions du trésorier-payeur général de Seine-et-Marne rejetant ses demandes de décharge de responsabilité solidaire ainsi qu'une demande de suspension provisoire des poursuites ;
2°) de prononcer l'annulation des décisions en cause ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2006 :
- le rapport de M. Dalle, rapporteur ;
- les conclusions de M. Bataille, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la trésorerie de Roissy-Pontault-Combault (Seine-et-Marne) a décerné le 30 mars 1999 à l'employeur de M. X un avis à tiers détenteur pour avoir paiement d'une somme de 1 310 732,09 F, représentant principalement des compléments d'impôt sur le revenu dus par M. et Mme X au titre des années 1993 à 1996, assortis d'une majoration de 10 % et de frais pour un montant de 9 887 F ; que, par une lettre en date du 20 septembre 2000, parvenue au service le 25 septembre 2000, M. X a demandé au trésorier-payeur général de Seine-et-Marne, d'une part, à être déchargé de sa responsabilité solidaire pour le paiement de ces impositions, d'autre part, que les poursuites engagées à son encontre soient suspendues jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la demande de décharge ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté les demandes de l'intéressé tendant à l'annulation de la décision implicite apparue le 25 novembre 2000 et de la décision expresse en date du 7 juin 2001, par lesquelles le trésorier-payeur général a rejeté sa demande en décharge de responsabilité, ainsi que de la décision du trésorier-payeur général du 22 janvier 2001, refusant de faire droit à sa demande de suspension provisoire de l'avis à tiers détenteur litigieux ;
En ce qui concerne la demande en décharge de responsabilité solidaire :
Considérant qu'aux termes de l'article 1685 du code général des impôts : « 1. Chacun des époux, lorsqu'ils vivent sous le même toit, est solidairement responsable des impositions assises au nom de son conjoint au titre de la taxe d'habitation. 2. Chacun des époux est tenu solidairement au paiement de l'impôt sur le revenu … Chacun des époux peut demander à être déchargé de cette obligation » ; qu'en vertu de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales, l'administration peut décharger de leur responsabilité les personnes tenues au paiement d'impositions dues par un tiers ; que cette dernière disposition s'applique par extension au cas où l'un des époux demande à être déchargé de son obligation solidaire de payer l'impôt établi au nom des deux conjoints ; qu'en vertu de l'article R. 247-10 de ce livre, une telle demande gracieuse doit être présentée au trésorier-payeur général dont dépend le lieu d'imposition ; que la décision du trésorier-payeur général peut être contestée devant le juge de l'excès de pouvoir ;
Considérant qu'à l'appui de sa contestation devant le juge de l'excès de pouvoir, le débiteur solidaire des impositions visées à l'article 1685 du code général des impôts ne peut utilement invoquer ni des moyens mettant en cause le bien-fondé des impositions auxquelles a été assujetti le débiteur principal, ni des moyens touchant à la régularité des poursuites engagées par l'administration en vue de recouvrer les sommes restant à payer ; qu'il ne peut pas non plus utilement soulever de moyens relatifs à l'existence ou à l'étendue de l'obligation solidaire, dès lors qu'à la date de sa demande gracieuse des poursuites ont déjà été engagées à son encontre ; qu'en revanche, même s'il fait déjà l'objet de poursuites, il est recevable à contester la décision du trésorier-payeur général en soutenant que celle-ci est entachée d'inexactitude matérielle, d'erreur de droit, d'erreur manifeste ou de détournement de pouvoir ; que, par suite, en jugeant qu'un conjoint dont la responsabilité solidaire était mise en jeu et à l'encontre duquel des poursuites étaient déjà engagées ne pouvait contester l'obligation mise à sa charge qu'en présentant des moyens ayant trait au recouvrement de l'impôt, dans les conditions prévues par l'article L. 281 du livre des procédures fiscales, et en rejetant, pour ce motif, comme irrecevables, les demandes présentées devant lui par M. X, le Tribunal administratif de Melun a commis une erreur de droit ; qu'il y a lieu par suite d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté comme irrecevables les conclusions de M. X tendant à la décharge de sa responsabilité solidaire ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions en décharge de responsabilité présentées par M. X devant le Tribunal administratif de Melun ;
Sur les fins de non-recevoir opposées par l'administration :
Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. X peut contester par la voie du recours pour excès de pouvoir les décisions du trésorier-payeur général rejetant sa demande en décharge gracieuse de solidarité ; que, par ailleurs, l'intérêt à agir s'appréciant à la date d'introduction des demandes devant le tribunal, la circonstance que les impositions ont été soldées postérieurement à l'instance devant le tribunal et que plus aucune somme n'est aujourd'hui réclamée à M. X est sans incidence sur la recevabilité des demandes introduites par celui-ci devant le tribunal ; qu'enfin, la présentation à l'administration des demandes en décharge de responsabilité n'est enfermée dans aucun délai, contrairement à ce que soutient le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; que M. X pouvait donc adresser le 20 septembre 2000 au trésorier-payeur général une demande en décharge de solidarité, bien que l'avis à tiers détenteur fût daté du 30 mars 1999 ; qu'il résulte de ce qui précède que les fins de non-recevoir opposées par le trésorier-payeur général de Seine-et-Marne et par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur la légalité des décisions attaquées :
Considérant que l'administration ne conteste pas qu'à la date des décisions attaquées M. X était solidairement redevable envers le Trésor public de la somme de 1 310 732,09 F, mentionnée dans l'avis à tiers détenteur ; qu'il ressort des pièces du dossier que le requérant disposait alors d'un revenu brut annuel d'environ 240 000 F ; qu'en exécution d'une décision de justice rendue le 7 novembre 2000, il devait verser chaque mois une pension de 5 000 F pour l'entretien et l'éducation de sa fille, née en janvier 2000 ; que, dans ces conditions, et même si M. X n'acquittait pas de loyer, le trésorier-payeur général de Seine-et-Marne a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des capacités contributives de l'intéressé, en estimant qu'il était financièrement en mesure d'acquitter sa dette fiscale et en rejetant totalement sa demande en décharge de solidarité ; qu'il y a lieu dès lors d'annuler les décisions par lesquelles le trésorier-payeur général a rejeté la demande en décharge de responsabilité solidaire présentée par M. X ;
En ce qui concerne la demande de suspension des poursuites :
Considérant que M. X n'invoque aucun moyen de légalité à l'encontre de la décision en date du 22 janvier 2001 par laquelle le trésorier-payeur général de Seine-et-Marne a refusé de suspendre l'avis à tiers détenteur litigieux, dans l'attente de la décision à intervenir sur sa demande en décharge de responsabilité ; qu'il se borne à soutenir qu'il peut bénéficier d'une telle suspension, en application de la réponse à M. Y, sénateur, en date du 9 avril 1987, aux termes de laquelle : « il est d'ailleurs précisé que, bien que de telles réclamations n'aient pas d'effet suspensif, il a été demandé aux comptables du Trésor de surseoir aux poursuites jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la demande de décharge » ; qu'il ne peut cependant se prévaloir de cette réponse, les dispositions de l'article 1er du décret du 28 novembre 1983 ne trouvant pas à s'appliquer aux réponses ministérielles et celles de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ne pouvant être invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir ; qu'il n'est par suite pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision précitée du 22 janvier 2001 ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Melun du 3 juillet 2003 est annulé en tant qu'il a rejeté comme irrecevables les demandes de M. X, tendant à la décharge de sa responsabilité solidaire.
Article 2 : La décision implicite du trésorier-payeur général de Seine-et-Marne en date du 26 novembre 2000, rejetant dans sa totalité la demande en décharge de responsabilité solidaire de M. X, ensemble la décision expresse du 7 juin 2001, sont annulées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. X est rejeté.
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N° 03PA03977