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16/05/2006 | FRANCE | N°02PA01320

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ere chambre - formation b, 16 mai 2006, 02PA01320


Vu la requête, enregistrée le 15 avril 2002, présentée pour M. Patrice X, élisant domicile ..., par Me Assouline ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°0015697/5 0015709 0015711 0015716 0015718 0013581 en date du 7 février 2002 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Paris n'a que partiellement fait droit à ses demandes tendant notamment à l'annulation des décisions implicites portant refus de le réintégrer à compter du 22 mai 1997 jusqu'au 9 décembre 1997 ;

2°) d'annuler, les décisions implicites portant refus de réintégrer

M. X à compter du 22 mai 1997 jusqu'au 9 décembre 1997, ainsi que la décision l...

Vu la requête, enregistrée le 15 avril 2002, présentée pour M. Patrice X, élisant domicile ..., par Me Assouline ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°0015697/5 0015709 0015711 0015716 0015718 0013581 en date du 7 février 2002 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Paris n'a que partiellement fait droit à ses demandes tendant notamment à l'annulation des décisions implicites portant refus de le réintégrer à compter du 22 mai 1997 jusqu'au 9 décembre 1997 ;

2°) d'annuler, les décisions implicites portant refus de réintégrer M. X à compter du 22 mai 1997 jusqu'au 9 décembre 1997, ainsi que la décision le plaçant en congé de longue durée sur la période du 24 septembre 1998 au 23 juin 1999 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 143 500 F (21.876,43 euros) en réparation du préjudice subi du fait du refus illégal de le réintégrer dans ses fonctions à compter du 22 mai 1997, la somme de 250.000 F (38.112,25 euros) en réparation des troubles subis dans ses conditions d'existence du fait de l'attitude de l'administration depuis le mois de mars 1999, le plaçant en congé de longue durée puis en retraite d'office pour invalidité, la somme de 150.000 F (22.867,35 euros) en réparation du préjudice subi au titre de la perte de chance d'être recruté dans un corps de catégorie A, la somme de 40 498,44F (6 173,95 euros) en remboursement de ses frais de formation, lesdites sommes étant augmentées des intérêts de droits ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83 ;634 du 13 juillet 1983 et la loi n° 84 ;16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu le décret n° 86 ;442 du 14 mars 1986

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 mai 2006 :

- le rapport de Mme Appèche-Otani, rapporteur,

- les observations de M. X,

- et les conclusions de Mme Giraudon, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions implicites refusant de réintégrer M. X à compter du 22 mai 1997 et jusqu'au 8 décembre 1997 et à la réparation du préjudice résultant de la perte de revenus subie sur cette période d'éviction :

Considérant qu'aux termes de l'article 27 du décret n° 86 ;442 du 14 mars 1986 : « Lorsque, à l'expiration de la première période de six mois consécutifs de congé de maladie, un fonctionnaire est inapte à reprendre son service, le comité médical est saisi pour avis de toute demande de prolongation de ce congé dans la limite des six mois restant à courir. Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical : en cas d'avis défavorable il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme. Le fonctionnaire qui, à l'expiration de son congé de maladie, refuse sans motif valable lié à son état de santé le ou les postes qui lui sont proposés peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire » ;

Considérant que comme l'ont estimé les premiers juges, l'administration en refusant de faire droit à la demande de réintégration de M. X formée le 17 avril 1997 et réitérée à plusieurs reprises, et en s'abstenant de convoquer le comité médical pour vérifier si son agent était inapte à reprendre son service, a commis une illégalité ; que confronté à l'inertie fautive de l'administration faisant obstacle à sa reprise de service, il est constant que M. X, dont les droits à congé de maladie ordinaire expiraient le 22 mai 1997, a tenté de régulariser sa situation en produisant des certificats médicaux de complaisance prescrivant des arrêts de travail couvrant la période du 22 mai 1997 au 9 décembre 1997 ; que dans les circonstances de l'espèce, ces certificats médicaux ne peuvent être tenus pour établissant l'inaptitude de M. X à reprendre ses fonctions et comme justifiant pour cette période, la persistance du refus de réintégration qui lui était illégalement opposé ; que par suite M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal, dans le jugement attaqué, a refusé pour la période susmentionnée d'annuler le refus de réintégration opposé par l'administration ;

Considérant que la production des certificats médicaux susmentionnés, bien que constitutive d'une faute imputable à M X, n'a pas eu pour effet, eu égard aux circonstances de l'espèce, d'exonérer l'administration, ni en totalité ni même, partiellement de sa responsabilité, engagée à l'égard de cet agent du fait de l'illégalité des refus implicites de réintégration qui lui ont été opposés ; que M. X a, par suite, droit à réparation du préjudice subi du fait de son éviction illégale du service sur la période litigieuse ; qu'il sera fait réparation du préjudice résultant de la perte de revenus sur la période considérée en condamnant l'administration à verser à M. X une indemnité correspondant aux traitements qu'il aurait perçus sur la période du 22 mai au 8 décembre 1997 à l'exception des indemnités liées à l'exercice effectif des fonctions s'il n'avait été illégalement écarté du service, et déduction faite des revenus de remplacement perçus par lui durant cette période ; qu'il a également droit aux intérêts au taux légal à compter de sa demande soit le 1er décembre 1998 ; que les intérêts échus à la date du 18 juin 2003, date à laquelle la capitalisation des intérêts a été demandée par le requérant, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts ;

Considérant que l'administration soutenant dans ses écritures, sans être contredite, qu'elle a versé à M. X les indemnités qui lui étaient dues pour la période allant du 9 décembre 1997 au 31 août 1998, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du requérant tendant à être indemnisé des pertes de revenus sur cette période ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision plaçant M. X en congé de longue durée sur la période du 24 septembre 1998 au 23 juin 1999 :

Considérant qu'il ressort d'un certificat établi le 17 février 1999 par le docteur Rannou, médecin psychiatre assurant le suivi de M X, que ce dernier était soigné pour un état anxio-dépressif sévère ; que d'un deuxième certificat établi le 13 octobre 1999 il ressort que cet état pathologique perdurait encore en septembre 1999 ; que par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges, qui ne se sont pas fondés sur des faits matériellement inexacts, ont estimé que l'administration avait pu légalement décider de placer le requérant en congé de longue durée sur la période du 24 septembre 1998 au 23 juin 1999 ; que par suite, les conclusions susanalysées de M. X ne peuvent qu'être rejetées ; que la responsabilité de l'administration ne saurait par suite être engagée du fait de cette mise en congé de longue durée ; qu'il suit de là que les conclusions de M. X tendant à l'indemnisation des troubles dans les conditions d'existence qu'il estime avoir subis du fait de son placement en congé de longue durée doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'indemnisation des préjudices subis du fait de la mise illégale en retraite d'office pour invalidité à compter du 13 août 1999 ;

Considérant que l'administration a, en exécution du jugement du tribunal annulant la décision de mise en retraite d'office susmentionnée, et devenu sur ce point définitif faute d'être contesté, procédé à la réintégration de M. X à compter du 13 août 1999 ; que M. X demande, comme il l'avait fait devant le tribunal, à être indemnisé des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de la faute commise par l'administration en le mettant illégalement à la retraite ; que M. X a droit en réparation du préjudice résultant de sa perte de rémunération pour la période du 13 août 1999 au 2 février 2003, à une indemnité compensatoire correspondant aux traitements qu'il aurait dû pourvoir à l'exception des indemnités liées à l'exercice des fonctions et déduction faite des revenus de remplacements définitivement acquis par lui sur ladite période ; que toutefois l'administration ayant émis à l'encontre de M. X un ordre de reversement des sommes perçues par lui au titre de la pension d'invalidité qui lui a été servie, il n'y a pas lieu de déduire ces sommes de l'indemnité due à l'intéressé en application du présent arrêt au titre des pertes de rémunérations qu'il a subies ; que par suite l'administration ayant versé à M. X la somme de 32 635,91 euros, les conclusions du requérant sont devenues sans objet à hauteur de ce montant ; que l'administration versera à ce dernier un complément d'indemnité correspondant à la pension d'invalidité perçue pour la période susmentionnée et qu'il a dû rembourser ;

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. X aurait subi des troubles dont la réparation nécessiterait l'octroi d'une indemnité excédant celle susdéfinie par l'administration ;

Sur les conclusions tendant à la réparation du préjudice résultant de la perte de chance d'accéder à un poste de la catégorie A :

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. X aurait, du fait des comportements fautifs de l'administration, sanctionnés tant par le tribunal dans son jugement que par le présent arrêt, été privé d'une chance sérieuse d'accéder à un poste de catégorie A de la fonction publique ; que les conclusions susanalysées reprises en appel par le requérant ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant au remboursement des frais de formation engagés et supportés par M. X durant la période d'éviction illégale :

Considérant que comme l'ont estimé les premiers juges, les débours faits par M. X ne sont pas directement ni certainement imputables aux illégalités commises par l'administration ; que par suite, celui-ci n'est pas fondé à demander la condamnation de l'administration à lui rembourser lesdites sommes ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à payer à M. X une somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 7 février 2002 est annulé en tant qu'il a refusé d'annuler pour la période du 22 mai 1997 au 9 décembre 1997, le refus de réintégration opposé à M. X par le ministre de la défense, et est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 2 : La décision implicite du ministre de la défense refusant de réintégrer M. X pour la période du 22 mai 1997 au 9 décembre 1997 est annulée.

Article 3 : L'Etat (ministre de la Défense) versera à M. X, en réparation du préjudice subi par lui pour la période du 22 mai 1997 au 8 décembre 1997, une indemnité calculée sur les bases définies par le présent arrêt. Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 1er septembre 1998. Les intérêts échus à la date du 18 juin 2003, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer à hauteur de la somme de 32 635,91 euros sur les conclusions de M. X tendant à la réparation du préjudice correspondant aux pertes de rémunération subies du 13 août 1999 au 2 février 2003.

L'administration versera à M. X pour cette période un complément d'indemnité correspondant aux sommes reversées par lui à l'administration au titre de la pension d'invalidité indûment perçue.

Article 5 : L'Etat (ministre de la Défense) versera à M. X une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

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N° 02PA01320


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ere chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 02PA01320
Date de la décision : 16/05/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE-OTANI
Rapporteur public ?: Mme GIRAUDON
Avocat(s) : ASSOULINE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-05-16;02pa01320 ?
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