Vu la requête, enregistrée le 10 juin 2003, présentée pour M. Laurent X, élisant domicile ...), par la SCP Biolet de Buhren ; M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0002333 du 25 juin 2003 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'office public intercommunal d'habitations à loyer modéré (OPHLM) de Fontainebleau, devenu l'office public d'aménagement et de construction (OPAC) du pays de Fontainebleau, à lui verser une somme de 1 447,69 F HT à titre d'indemnité de résiliation d'un marché de maîtrise d'oeuvre pour l'opération de réhabilitation d'un ensemble de bâtiments d'habitation situés à Champagne-sur-Seine, une somme de 13 783,59 F TTC majorée des intérêts au taux légal à compter du 15 janvier 2000 et une somme de 663,56 F TTC avec intérêts aux taux légal à compter du 15 juillet 2000 au titre d'honoraires impayés et une somme de 50 000 F au titre du préjudice économique et moral qu'il a subi ;
2°) de dire que la décision de résiliation du 26 avril 2000, ensemble la décision n° 2000.003 désignant le CET Ingénierie titulaire du marché de maîtrise d'oeuvre, sont nulles et de nul effet ;
3°) de condamner l'OPAC du pays de Fontainebleau à lui payer une indemnité de résiliation de 1 447,69 F HT (220,70 euros), une somme de 13 783,59 F TTC (2 101,29 euros) et de 663,56 F TTC (101,16 euros) au titre d'honoraires et une somme de 7 622,45 euros au titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice économique et moral ;
4°) de mettre à la charge de l'OPAC du pays de Fontainebleau une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la lettre en date du 27 mars 2006, informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision à intervenir est susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de la construction et de l'habitation ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 avril 2006 :
- le rapport de M. Marino, rapporteur,
- les observations de Me Edou, pour M. X,
- et les conclusions de M. Coiffet, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par un marché conclu le 10 juillet 1998, l'office public intercommunal d'habitations à loyer modéré (OPHLM) de Fontainebleau, devenu l'office public d'aménagement et de construction (OPAC) du pays de Fontainebleau, a confié à un groupement conjoint constitué de M. Laurent X, architecte, et du bureau d'études CET Ingénierie, la maîtrise d'oeuvre d'une opération de réhabilitation de quatre bâtiments d'habitation comprenant 116 logements à Champagne-sur-Seine ; qu'à la suite d'une mise en demeure restée infructueuse en date du 31 mars 2000, le directeur de l'office a prononcé la résiliation du marché par une décision n° 2000-003 transmise le 26 avril 2000 et a désigné le bureau d'études CET Ingénierie seul titulaire du marché ; que, par le jugement dont M. X relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'OPAC du pays de Fontainebleau à réparer son préjudice ; que l'OPAC du pays de Fontainebleau présente un appel incident à l'encontre de ce jugement en tant que le tribunal a estimé que la décision de résiliation était illégale dès lors que le directeur de l'office n'avait pas reçu procuration du conseil d'administration pour la signer ;
Considérant, en premier lieu, que contrairement à ce que soutient M. X, la résiliation du marché dont s'agit a été prononcée par le directeur de l'office, par la décision susvisée n° 2000-003 ; que la lettre du 26 avril 2000 signée du directeur technique de l'office doit être regardée comme une simple lettre d'accompagnement de la décision de résiliation ; que, par suite, cette lettre ne constitue pas un acte faisant grief et que les conclusions de la requête tendant à ce que la cour la déclare nulle et de nul effet sont irrecevables et doivent être rejetées ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu de l'article R. 421-62 du code de la construction et de l'habitation, le directeur de l'office ne pouvait procéder à la résiliation du marché dont s'agit qu'à la condition d'avoir reçu une procuration du président de l'office avec l'assentiment du conseil d'administration ; qu'ainsi que l'a jugé à bon droit le Tribunal administratif de Melun, la procuration exigée par les dispositions précitées ne pouvait être remplacée par la délibération du conseil d'administration de l'office donnant délégation de signature à son directeur ; que, par suite, M. X est fondé à soutenir que la décision 2000-003 portant résiliation du contrat de maîtrise d'oeuvre a été signée par une personne incompétente et qu'elle est, de ce fait entachée d'illégalité ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions d'appel incident présentées par l'OPAC du pays de Fontainebleau demandant à la cour de constater que son directeur était compétent pour signer la décision dont s'agit ;
Considérant, en troisième lieu, que, nonobstant l'illégalité entachant la décision de résiliation du marché, M. X n'était en droit d'obtenir le versement d'une indemnité qu'à la condition que cette résiliation ait été justifiée au fond ; qu'ainsi, c'est à tort que le requérant soutient qu'en rejetant sa demande indemnitaire au motif que la résiliation était fondée, le tribunal n'a pas tiré toutes les conséquences de l'illégalité affectant la décision en cause ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 37.1 du cahier des clauses administratives générales « prestations intellectuelles » applicable au marché : « la personne publique peut résilier le marché aux torts exclusifs du titulaire, après mise en demeure restée infructueuse lorsque : … b) le titulaire ne s'est pas acquitté de ses obligations dans les délais contractuels » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en cours de chantier, l'office a demandé à plusieurs reprises à M. X de modifier son projet pour des raisons soit de sécurité, soit d'économie, soit d'esthétique ; qu'il lui a été notamment demandé de remplacer un mur de soutènement par un terrassement et de supprimer des corniches pour empêcher les enfants d'accéder à la toiture, de ne pas réaliser la construction de certains garages ou accès direct à des logements et enfin, de modifier le choix des coloris des façades ainsi que des claustras pour tenir compte des souhaits des locataires ; que M. X a refusé de procéder aux modifications demandées alors qu'elles étaient de faible ampleur et ne remettaient pas en cause l'économie du marché et de déposer un permis de construire modificatif ; qu'il a également manqué à son obligation d'assistance du maître d'ouvrage pour rechercher une alternative à la défaillance de l'entreprise titulaire du lot de peinture ; qu'enfin, il s'est régulièrement abstenu de venir aux réunions de chantier ; qu'en ne s'acquittant pas de ses obligations dans les délais fixés par le contrat, M. X a retardé l'avancement du chantier ; que ces différents manquements, dont il n'est pas établi qu'ils seraient imputables au maître d'ouvrage, étaient de nature à justifier la résiliation du contrat de maîtrise d'oeuvre ;
Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que si la résiliation du contrat litigieux est intervenue sur une procédure irrégulière, elle était justifiée au fond ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que le tribunal a jugé que M. X n'était pas fondé à demander la condamnation de l'office à lui verser une indemnité de résiliation et des dommages et intérêts pour préjudice économique et moral ;
Considérant, en cinquième lieu qu'aux termes de l'article 12.9 du cahier des clauses administratives générales précité : « En cas de résiliation du marché, quelle qu'en soit la cause, une liquidation des comptes est effectuée… » ; que l'article 35.4 du même cahier dispose : « La résiliation fait l'objet d'un décompte qui est arrêté par la personne publique et notifié au titulaire. Les stipulations du 32 de l'article 12 sont applicables à ce décompte » et l'article 37.5 : « Sauf stipulations particulière du marché, le décompte de liquidation comprend : (…) b) Au crédit du titulaire : La valeur contractuelle des prestations reçues, y compris, s'il y a lieu les intérêts moratoires… » ;
Considérant, ainsi que l'a jugé a bon droit le tribunal, que les honoraires dont le titulaire réclame le paiement pour des prestations effectuées avant la résiliation du marché, doivent être intégrés dans le décompte de liquidation et portés à son crédit ; qu'en l'absence d'un tel décompte, la demande de M. X tendant au paiement des honoraires restant dus est prématurée et ne peut être accueillie ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que l'appel incident présenté par l'OPAC du pays de Fontainebleau doit également être rejeté ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de la juridiction administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'OPAC du pays de Fontainebleau, qui ne peut être regardé comme étant la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. X une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par l'OPAC du pays de Fontainebleau et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. X et l'appel incident de l'office public d'aménagement et de construction du pays de Fontainebleau sont rejetés.
Article 2 : M. X versera à l'office public d'aménagement et de construction du pays de Fontainebleau, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 03PA02336