Vu la requête, enregistrée le 28 mai 2002, présentée pour la société anonyme BANQUE D'ESCOMPTE, dont le siège social est sis ..., par Me X... ; la SA BANQUE D'ESCOMPTE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement nº 9600980/1 en date du 7 mai 2002 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à obtenir le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 1989 à 1991, pour un montant global de 1 066 184,94 F, soit 162 538,85 euros ;
2°) de prononcer le remboursement sollicité ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 000 euros, au titre des frais irrépétibles ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2006 :
- le rapport de M. Privesse, rapporteur,
- et les conclusions de M. Adrot, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la société anonyme BANQUE D'ESCOMPTE relève régulièrement appel du jugement susmentionné du Tribunal administratif de Paris qui a rejeté sa demande tendant à obtenir le remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée, dont elle avait limité la portée aux seuls crédits afférents aux années 1990 et 1991, pour un montant total de 936 768 F, soit 142 809,36 euros ;
Considérant que, par une première décision du 24 janvier 1994, le directeur des services fiscaux de Paris ;Centre a rejeté la demande que la SA BANQUE D'ESCOMPTE lui avait présentée le 23 juillet 1993, en vue d'obtenir le remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée afférents à la période comprise entre le 1er octobre 1989 et le 30 avril 1993, à la suite de deux demandes d'information des 6 août et 18 octobre 1993 émises par le service, auxquelles la banque a répondu le 27 octobre 1993 ; que la BANQUE D'ESCOMPTE n'a alors pas contesté cette décision devant la juridiction, mais a introduit une seconde demande par une lettre datée du 15 avril 1994, dont il n'est pas contesté qu'elle portait sur une part seulement de la période visée par la précédente demande, à savoir sur la période du 1er octobre 1989 au 31 décembre 1991, en reprenant précisément pour chaque période, les mêmes montants de crédits de taxes que ceux faisant l'objet de la première demande du 23 juillet 1993, et en faisant valoir l'ouverture à son profit d'un délai spécial de réclamation en raison d'une procédure de redressement dont elle faisait l'objet ; qu'à défaut de décision dans le délai de six mois en ce qui concerne cette seconde demande, portant réclamation, la société a porté le litige devant le tribunal, qui, par le jugement susmentionné, a rejeté celle-ci en se fondant sur sa tardiveté ;
En ce qui concerne la péremption du droit à déduction :
Considérant qu'aux termes de l'article 224 de l'annexe II au code général des impôts pris sur le fondement de l'article 273 dudit code : « 1. Les entreprises doivent mentionner le montant de la taxe dont la déduction leur est ouverte sur les déclarations qu'elles déposent pour le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée. - Cette mention doit figurer sur la déclaration afférente au mois qui est désigné aux articles 208 et 217. Toutefois, à condition qu'elle fasse l'objet d'une inscription distincte, la taxe dont la déduction a été omise sur cette déclaration peut figurer sur les déclarations ultérieures déposées avant le 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de l'omission. 2. Lorsque le montant de la taxe déductible ainsi mentionné sur une déclaration excède le montant de la taxe due d'après les éléments qui figurent sur cette déclaration, l'excédent de taxe dont l'imputation ne peut être faite est reporté, jusqu'à épuisement, sur la ou les déclarations suivantes. Toutefois, cet excédent peut faire l'objet de remboursements dans les conditions fixées par les articles 242-0 A à 242-0 K et par le V de l'article 271 du code général des impôts (…) » ;
Considérant qu'il n'est pas utilement contesté que la SA BANQUE D'ESCOMPTE n'avait pas mentionné de façon distincte sur ses déclarations les montants de taxes déductibles qu'elle aurait omis de déclarer, et qu'elle n'a pas davantage réparé cette omission avant le 31 décembre 1992 en ce qui concerne le montant de la taxe dont elle estimait que la déduction lui était ouverte au titre de l'année 1990, ni avant le 31 décembre 1993 pour la déduction de la taxe afférente à l'année 1991 ; que par suite, la société requérante n'était plus en mesure de réclamer le remboursement des crédits de taxes litigieux sur le fondement des dispositions précitées ; qu'elle ne pouvait dès lors qu'être soumise, en tout état de cause, aux conditions et délais fixés par les articles 242-0 A à 242-0 L de l'annexe II au code général des impôts ;
Sur la recevabilité de la réclamation :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales : « Les réclamations relatives aux impôts, contributions, droits, taxes, redevances, soultes et pénalités de toute nature, établies ou recouvrés par les agents de la direction générale des impôts, relèvent de la juridiction contentieuse lorsqu'elles tendent à obtenir ... le bénéfice d'un droit résultant d'une disposition législative ou réglementaire... » ; qu'aux termes de l'article L.199 du même livre : « En matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires ou de taxes assimilées, les décisions rendues par l'administration sur les réclamations contentieuses et qui ne donnent pas entièrement satisfaction aux intéressés peuvent être portées devant le tribunal administratif. » ; qu'aux termes de l'article R. 199 ;1 du même livre : « L'action doit être introduite devant le tribunal compétent dans le délai de deux mois à partir du jour de la réception de l'avis par lequel l'administration notifie au contribuable la décision prise sur sa réclamation … » ; qu'aux termes de l'article 271-3 du code général des impôts de l'annexe II audit code : « La taxe déductible dont l'imputation n'a pu être opérée peut faire l'objet d'un remboursement dans les conditions, selon les modalités et dans les limites fixées par décret en Conseil d'Etat » ; qu'aux termes de l'article 242 ;0 A de l'annexe II au code général des impôts : « Le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée déductible dont l'imputation n'a pu être opérée doit faire l'objet d'une demande des assujettis. Le remboursement porte sur le crédit de taxe déductible constaté au terme de chaque année civile » ; qu'aux termes de l'article 242-0 C de l'annexe II au code général des impôts : « 1. Les demandes de remboursement doivent être déposées au cours du mois de janvier et porter sur un montant au moins égal à 1 000 F. » ; qu'une demande de remboursement de taxe déductible constitue une réclamation contentieuse, au sens de l'article L. 199 précité du livre des procédures fiscales ;
Considérant d'une part, qu'il résulte de ces dispositions, qu'il appartenait à la SA BANQUE D'ESCOMPTE, à la suite de la première décision du 24 janvier 1994, dont il n'est pas contesté qu'elle lui a été notifiée le même jour, de porter tout ou partie de son litige avec l'administration fiscale directement devant le tribunal administratif, ce qu'elle n'a pas fait ; que, d'autre part, si la BANQUE D'ESCOMPTE a cru pouvoir saisir à nouveau le directeur des services fiscaux le 18 avril 1994, par une seconde demande contenue dans son courrier daté du 15 avril précédent, cette demande ne pouvait qu'être tardive dès lors qu'elle aurait dû être déposée, s'agissant d'une demande de remboursement de taxe déductible portant sur les années 1990 et 1991, au plus tard le 31 janvier 1992 ;
Considérant qu'à cet égard, la circonstance que la BANQUE D'ESCOMPTE a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 1989 au 31 décembre 1991, n'était pas de nature à lui permettre de se prévaloir à ce titre de l'ouverture d'un délai spécial de réclamation, alors qu'en tout état de cause, ce contrôle n'a donné lieu qu'à des redressements en matière d'impôts sur les sociétés ;
Sur le surplus :
Considérant que la demande de remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont dispose un contribuable, laquelle constitue une réclamation contentieuse, est soumise aux conditions et aux délais particuliers aux demandes de remboursement de crédit prévus par les dispositions des articles 242-0 A et suivants de l'annexe II au code général des impôts et, subsidiairement, au délai général de réclamation contentieuse prévu par les dispositions de l'article R.199-1 du livre des procédures fiscales ; que ces articles 242-0 A et suivants constituent la codification du décret nº 72-102 du 4 février 1972, lui-même pris sur l'habilitation de l'article 7 de la loi de finances pour 1972 nº 71-1061 du 29 décembre 1971, et non sur le fondement de l'article 18 de la loi du 6 janvier 1966 nº 66-10 ; que ces mêmes articles ont eu pour effet d'instituer un régime de prescription spécial à une catégorie déterminée de créances exclues du champ d'application de la loi du 31 décembre 1968 ; que par suite, les moyens tirés de ce que les crédits de taxe dont le remboursement a été réclamé, n'étaient pas atteints par la prescription quadriennale des créances sur l'Etat prévue par cette dernière loi, sont inopérants ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, qu'il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la BANQUE D'ESCOMPTE visant à obtenir le remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée au titre des périodes correspondant aux années 1990 et 1991 ;
Sur les conclusions tendant au versement de frais irrépétibles :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante soit condamné à payer à SA BANQUE D'ESCOMPTE la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la société anonyme BANQUE D'ESCOMPTE est rejetée.
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N° 02PA01910