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03/04/2006 | FRANCE | N°02PA01438

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5eme chambre - formation b, 03 avril 2006, 02PA01438


Vu la requête, enregistrée le 24 avril 2002, présentée pour M. Jacques X, demeurant ..., par Me Zamour ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9607545 du 5 mars 2002 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1990 et 1991 et des pénalités dont elles ont été assorties ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités dont elles ont été assorties ainsi que la décharge

des cotisations supplémentaires auxquelles il a été assujetti en 1990 et 1991 au titre...

Vu la requête, enregistrée le 24 avril 2002, présentée pour M. Jacques X, demeurant ..., par Me Zamour ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9607545 du 5 mars 2002 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1990 et 1991 et des pénalités dont elles ont été assorties ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités dont elles ont été assorties ainsi que la décharge des cotisations supplémentaires auxquelles il a été assujetti en 1990 et 1991 au titre du 1% social et du 1% fiscal ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mars 2006 :

- le rapport de M. Beaufaÿs, rapporteur,

- les observations de Me Zamour, pour M. X,

- et les conclusions de M. Adrot, commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par décision en date du 23 janvier 2004 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de Paris-Est a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, des suppléments de cotisations auxquelles il a été assujetti en 1990 et 1991 au titre du 1% social et du 1% fiscal ; que les conclusions de la requête de M. X relatives à ces impositions sont devenues sans objet ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que le tribunal, ayant rejeté la requête de M. X après avoir répondu à l'ensemble des moyens soulevés par l'intéressé relatifs à la procédure et au bien fondé des redressements ainsi que des pénalités dont ils ont été assortis, n'était pas tenu d'examiner la fin de non recevoir opposée par l'administration en ce qui concerne les impositions supplémentaires de l'année 1991 ; que, par suite, le jugement n'est pas entaché d'irrégularité ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non recevoir opposée par le ministre en ce qui concerne l'année 1991 ;

Sur la prescription du droit de reprise :

Considérant que M. X a fait l'objet de redressements en matière d'impôt sur le revenu au titre des années 1990 et 1991 ; que, devant la cour, il soutient que les droits supplémentaires qu'il conteste ont été mis en recouvrement après l'expiration du délai de répétition fixé par les dispositions de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 1658 du code général des impôts : « Les impôts directs ... sont recouvrés en vertu de rôles rendus exécutoires par arrêté du préfet » ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 1659 du même code : « La date de mise en recouvrement des rôles est fixée par l'autorité compétente pour les homologuer en application de l'article 1658, d'accord avec le trésorier-payeur général. Cette date est indiquée sur le rôle ainsi que sur les avis d'imposition délivrés aux contribuables » ; qu'il résulte de ces dispositions que la date de mise en recouvrement d'un impôt perçu par voie de rôle est celle de la décision administrative établissant le rôle ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la décision du 16 mai 1994 portant homologation du rôle, en vertu duquel a été mis en recouvrement les suppléments de cotisation d'impôt sur le revenu auquel M. X a été assujetti au titre des années 1990 et 1991, a fixé au 31 mai 1994 cette mise en recouvrement ; qu'à cette date le délai de prescription de l'action en recouvrement applicable aux-dites impositions en vertu des dispositions de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, n'était pas expiré eu égard à l'intervention, le 3 juin 1993, d'une notification de redressements qui avait interrompu jusqu'au 31 décembre 1996 le délai de prescription ; que, par suite, l'imposition contestée a été régulièrement établie ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'imposition de la somme de 5 000 000 F en tant que revenus distribués au titre de l'année 1990 :

Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : « 1. Sont considérés comme revenus distribués : ... 2. Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices » ; que, contrairement à ce que soutient M. X, en application de ces dispositions, les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associés ont le caractère de revenus de capitaux mobiliers et sont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, réputées mises à sa disposition du fait de cette seule inscription ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que dans le cadre de la vérification de la comptabilité de la SARL Renov BJH, entreprise générale de bâtiment, le vérificateur a constaté l'existence dans la comptabilité de la société d'un compte courant commun aux deux associés de la société MM. Bruno et Jacques X, qui détenaient chacun la moitié du capital de ladite société, présentant un solde créditeur à la clôture de l'exercice 1990 de 9 280 953 F ; qu'au cours dudit exercice, le livre journal de ladite société retraçait des écritures mettant en évidence que MM. Bruno et Jacques X avaient été respectivement crédités sur leur compte courant, pour le premier, d'une somme de 5 104 461 F et, pour le second, d'une somme de 5 000 000 F, par le débit des comptes, « clients », pour 5 000 000 F, « charges extérieures », pour 4 215 852 F, « TVA déductible » pour 784 148 F et « organismes sociaux » pour 104 461 F ; qu'après avoir interrogé M. Jacques X sur l'origine de la somme de 5 000 000 F créditée à son nom dans le livre journal, lequel a répondu que ladite écriture n'était pas justifiée, le vérificateur a imposé ladite somme entre les mains de l'intéressé sur le fondement du 2° de l'article 109-1 précité du code général des impôts ;

Considérant, en premier lieu, que si M. Jacques X soutient que la somme de 5 000 000 F portée au crédit de son compte courant dans la société Renov BJH résulterait d'écritures fictives effectuées à son insu par le comptable de cette société et que l'administration aurait reconnues comme telles, dès lors qu'elle avait écarté la comptabilité de ladite société comme irrégulière et non probante, il n'établit pas, en tout état de cause, que cette somme n'a pas été effectivement mise à sa disposition alors au surplus que le compte courant dont il s'agit est resté créditeur à la clôture des exercices 1990, 1991 et 1992 et qu'il a pu être établi que l'intéressé avait effectué en 1992 des prélèvements sur ce compte d'un montant total de 700 000 F ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. Jacques X prétend qu'en raison du caractère commun du compte courant qu'il partageait avec son co-associé dans la société Renov BJH, la preuve de la mise à disposition de la somme de 5 000 000 F ne serait pas rapportée faute pour l'administration de pouvoir individualiser l'utilisation effective qu'il aurait personnellement faite de ce compte par rapport à celle de son co-titulaire ; que, toutefois, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que c'est à M. X qu'il incombe d'apporter la preuve qu'il n'a pas eu la disposition de ladite somme ; que si M. X fait valoir à cet égard que les co-titulaires d'un compte courant commun d'associés doivent être regardés comme disposant chacun de la faculté de prélever la totalité des soldes créditeurs d'un tel compte, cette argumentation n'est pas de nature à démontrer qu'il n'aurait pas eu la disposition de la somme litigieuse, alors que l'administration a établi en l'espèce que les écritures du livre journal avaient nominativement crédité M. Jacques X dans le compte courant commun aux deux associés d'une somme de 5 000 000 F par le débit du compte « client » ;

Considérant, en troisième lieu, que contrairement à ce que soutient M. X, l'administration pouvait, sur le fondement du 2° de l'article 109-1 précité du code général des impôts, imposer entre ses mains la somme de 5 000 000 F sans qu'il lui soit nécessaire de faire la preuve d'un quelconque désinvestissement comptable de la société Renov BJH ;

Considérant, en quatrième lieu, que si M. X prétend que les sommes inscrites au crédit d'un compte courant ne peuvent être imposées qu'au titre de l'année de leur mise à disposition effective, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le compte courant d'associés qu'il détenait en commun avec son frère était crédité d'un montant de plus de 9 millions de Francs à la clôture de l'exercice 1990 ; que faute de tout élément probant apporté par le requérant de nature à établir que la situation de trésorerie de la société Renov BJH était telle qu'elle l'aurait empêché réellement de procéder au prélèvement de la somme litigieuse, celle-ci doit être réputée avoir été mise à sa disposition au titre de l'année 1990 ;

En ce qui concerne l'imposition de la somme de 1 000 000 F en tant que revenus distribués au titre de l'année 1991 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le redressement de la somme de 1 000 000 F taxée en revenus distribués sur le fondement des dispositions précitées du 2° de l'article 109-1 du code général des impôt ne résulte pas, comme le prétend à tort M. X, du constat par le vérificateur d'un crédit de même montant inscrit sur son compte courant d'associés mais du constat par ce dernier d'un débit sur le compte bancaire de la société Renov BJH inscrit en comptabilité dans le compte « banque » en tant que contrepartie de l'achat de valeurs mobilières de placement, alors que les pièces de banque correspondant à cette opération en date du 25 juillet 1991 montrent que la société a en réalité procédé à un virement de ladite somme au compte bancaire personnel de M. Jacques X ; que, par suite, le moyen évoqué par ce dernier selon lequel il ne saurait être imposé à deux reprises pour la même somme, dès lors que ce montant de 1 000 000 F aurait déjà été imposé au titre de la mise à disposition en 1990 de la somme de 5 000 000 F sur son compte courant évoquée ci-dessus, est inopérant ; qu'il résulte de ce qui précède que l'administration apporte la preuve que la somme de 1 000 000 F virée au compte bancaire personnel de M. X a été appréhendée par ce dernier ;

Sur les pénalités :

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : « Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40% si la mauvaise foi de l'intéressé est établie... » ; qu'aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au présent litige : « Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. Toutefois, lorsque la pénalité mise en recouvrement ne constitue pas l'accessoire d'une imposition ou lorsqu'elle sanctionne une infraction dont la qualification est fondée sur l'appréciation du comportement du contribuable, la motivation est portée à sa connaissance au moins trente jours avant la notification du titre exécutoire ou de son extrait. Durant ce délai, le contribuable peut présenter ses observations. » ;

Considérant, en premier lieu, qu'en indiquant dans sa réponse aux observations du contribuable du 26 juillet 1993, que la mauvaise foi de M. X était établie en raison de l'importance des redressements et des montants prélevés sur le compte courant de la société Renov BJH et la non déclaration des revenus distribués ni lors de l'inscription des sommes sur le compte courant ni au titre des années où des sommes ont été retirées du compte bancaire de ladite société, l'administration a suffisamment motivé sa décision d'appliquer aux droits mis à la charge du contribuable la pénalité pour mauvaise foi au taux de 40 % prévue par le 1 précité de l'article 1729 du code général des impôts ;

Considérant, en deuxième lieu, que, contrairement à ce que soutient M. X, la réponse aux observations du contribuable du 26 juillet 1993 lui indiquait qu'il disposait d'un délai de trente jours pour faire valoir ses observations sur les sanctions fiscales dont les redressements étaient assortis ; que dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme ayant invité M. X à produire ses observations ;

Considérant, en troisième lieu, que les faits relatés ci-dessus mettent en évidence la gravité et le caractère répétitif des omissions constatées et traduisent, en l'espèce, la volonté délibérée de M. X d'éluder l'impôt dû ; que l'administration doit, dès lors, être regardée comme apportant la preuve de la mauvaise foi du contribuable ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. X la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

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N° 02PA01438


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 02PA01438
Date de la décision : 03/04/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés SOUMET
Rapporteur ?: M. Frédéric BEAUFAYS
Rapporteur public ?: M. ADROT
Avocat(s) : ZAMOUR

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-04-03;02pa01438 ?
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