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09/02/2006 | FRANCE | N°01PA02268

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6eme chambre, 09 février 2006, 01PA02268


Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2001, présentée pour Mme Michelle X, demeurant ..., par Me Bernier ;Dupréelle ; Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°9818500/5 du 5 avril 2001 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 31 août 1998 par laquelle elle a été placée à la retraite, à sa réintégration dans ses fonctions jusqu'à l'acquisition d'une ancienneté suffisante pour prétendre au régime spécial de retraite de la Banque de France, à la régularisation de sa situation

au regard des caisses de retraite, notamment en ce qui concerne les sommes ver...

Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2001, présentée pour Mme Michelle X, demeurant ..., par Me Bernier ;Dupréelle ; Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°9818500/5 du 5 avril 2001 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 31 août 1998 par laquelle elle a été placée à la retraite, à sa réintégration dans ses fonctions jusqu'à l'acquisition d'une ancienneté suffisante pour prétendre au régime spécial de retraite de la Banque de France, à la régularisation de sa situation au regard des caisses de retraite, notamment en ce qui concerne les sommes versées par la Banque à l'IRCANTEC ; à titre subsidiaire, à la condamnation de la Banque de France à lui verser des dommages et intérêts sous forme de rente à vie de 2 000 F par mois ou de capital de 500 000 F en réparation de son préjudice ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision contenue dans la lettre du 11 août 1998 par laquelle la gouverneur de la Banque de France a refusé de lui accorder une dérogation à la suite de la décision prononçant sa mise à la retraite d'office ;

3°) de condamner la Banque de France à lui verser la somme de 500 000 F à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;

4°) de condamner la Banque de France à lui verser une somme de 30 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 93 ;980 du 4 août 1993, modifiée relative au statut de la Banque de France et à l'activité et au contrôle des établissements de crédit ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 janvier 2006 :

- le rapport de M. Piot, rapporteur,

- les observations de Me Bernier-Dupréelle pour Mme X, et celles de Me Delvolve pour la Banque de France,

- et les conclusions de M. Coiffet, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant que si Mme X soutient que le jugement est entaché d'irrégularité en ce que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de « l'engagement contractuel » qui aurait été pris le 25 février 1986 par la Banque de France, il résulte de l'examen du dossier de première instance que ce moyen n'a pas été soulevé par l'intéressée devant les premiers juges ; que, par suite, le jugement attaqué, qui a répondu à l'ensemble des conclusions et des moyens présentés par Mme X, n'est entaché d'aucune omission à statuer de nature à entraîner son annulation ;

Au fond :

Sur la légalité de la décision plaçant Mme X à la retraite, à compter du 1er juin 1998 :

En ce qui concerne l'exception d'illégalité des dispositions du statut du personnel de la Banque de France relatives à la retraite à l'âge de 60 ans :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la loi du 4 août 1993 susvisée : « La Banque de France est une institution dont le capital appartient à l'Etat » ; qu'elle constitue une personne publique chargée par la loi de missions de service public qui, ayant principalement pour objet la mise en oeuvre de la politique monétaire, le bon fonctionnement des systèmes de compensation et de paiement et la stabilité du système bancaire, sont pour l'essentiel de nature administrative ; qu'elle n'a pas le caractère d'un établissement public mais revêt une nature particulière et présente des caractéristiques propres ;

Considérant qu'au nombre des caractéristiques propres à la Banque de France figure l'application à son personnel des dispositions du code du travail qui ne sont incompatibles ni avec son statut, ni avec les missions de service public dont elle est chargée ;

Considérant qu'aux termes de dispositions de l'article L. 122-14-12 du code du travail : « Les dispositions relatives au départ à la retraite des salariés prévues par une convention collective, un accord collectif de travail ou un contrat de travail sont applicables sous réserve qu'elles ne soient pas contraires aux dispositions légales. Sont nulles et de nul effet toute disposition d'une convention ou d'un accord collectif de travail et toute clause d'un contrat de travail prévoyant une rupture de plein droit du contrat de travail d'un salarié en raison de son âge ou du fait qu'il serait en droit de bénéficier d'une pension de vieillesse. » et qu'aux termes de dispositions de l'article L. 122-14-13 du même code : « (...) La mise à la retraite s'entend par la possibilité donnée à l'entreprise de rompre le contrat de travail d'un salarié qui peut bénéficier d'une pension de vieillesse à taux plein, au sens du chapitre Ier du titre V du livre III du code de la sécurité sociale, et qui remplit les conditions d'ouverture à la pension de vieillesse, ou, si elles existent, les conditions d'âge prévues par la convention ou l'accord collectif, ou le contrat de travail. Si les conditions de mise à la retraite ne sont pas remplies, la rupture du contrat de travail par l'employeur constitue un licenciement » ; qu' enfin, en vertu des dispositions combinées des articles 241, 242 et 468 du statut du personnel de la Banque de France, les secrétaires comptables de la Banque, dont Mme X faisait partie, doivent prendre leur retraite dès l'âge de 60 ans ;

Considérant que les dispositions du code du travail précitées étant contraires au statut du personnel de la Banque, ne s'appliquent pas, conformément aux principes sus rappelés, sans même qu'il y ait lieu de rechercher si cette incompatibilité résulterait de nécessités impérieuses liées à l'accomplissement par la Banque de France des missions de service public dont elle est chargée ; que Mme X n'est, de ce fait, pas fondée à s'en prévaloir ; qu'ainsi, à supposer même que l'intéressée ait pu demander l'application des dispositions de l'article L. 122-14-13 du code du travail précitées, elle n'établit pas s'être trouvée dans une situation empêchant la Banque de France de la mettre légalement à la retraite à compter de 60 ans ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l'impossibilité d'appliquer le décret du 23 décembre 1970 :

Considérant que si Mme X soutient que la décision litigieuse serait illégale en ce qu'elle implique nécessairement pour elle de devoir faire valider ses années de service auprès de l'IRCANTEC, caisse de retraite des agents non titulaires, alors même qu'elle ne dépend pas d'un tel régime de retraite complémentaire dans la mesure où elle est titulaire depuis le 1er décembre 1985, un tel moyen qui ne se rattache qu'aux conséquences de la décision attaquée ne peut utilement être invoqué ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la violation du principe de l'égalité de traitement entre agents :

Considérant que la circonstance que d'autres employés de la Banque de France auraient bénéficié de dérogations leur permettant de continuer de travailler au-delà de soixante ans, est sans influence sur la légalité de la décision plaçant Mme X à la retraite d'office ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision la plaçant à la retraite à compter du 1er juin 1998 ;

Sur la responsabilité de la Banque de France pour manquement à ses engagements contractuels :

Considérant, d'une part, que si Mme X soutient que la Banque de France s'était, par une lettre en date du 25 février 1986, engagée à ce qu'elle puisse poursuivre son activité jusqu'à 62 ans, un tel moyen est nouveau en appel et, par suite, irrecevable ;

Considérant, d'autre part, que contrairement à ce que soutient l'intéressée, son recrutement ne comportait, à la date à laquelle il est intervenu, aucun engagement de la maintenir en activité jusqu'à l'âge de 62 ans ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Considérant qu'en l'absence de toute illégalité ou agissement fautifs de la Banque de France, les conclusions de la requête tendant au versement de dommages et intérêts doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Banque de France, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à verser à Mme X la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner Mme X, par application des mêmes dispositions, à payer à la Banque de France la somme qu'elle demande, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE

Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la Banque de France tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 01PA02268


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6eme chambre
Numéro d'arrêt : 01PA02268
Date de la décision : 09/02/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés MOREAU
Rapporteur ?: M. Jean-Marie PIOT
Rapporteur public ?: M. COIFFET
Avocat(s) : DELVOLVE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-02-09;01pa02268 ?
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