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30/12/2005 | FRANCE | N°03PA00899

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2eme chambre - formation b, 30 décembre 2005, 03PA00899


Vu la requête, enregistrée le 27 février 2003, présentée pour la société MEDIA FUSION, par Me Y... ;

La société MEDIA FUSION demande à la Cour :

1) d'annuler le jugement n° 01-0279 en date du 7 novembre 2002 par lequel le tribunal administratif de Tribunal administratif de Nouvelle Calédonie a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1995, 1996 et 1997 et des pénalités y afférentes ;

2) de prononcer la décharge des imposition

s litigieuses ;

3) d'ordonner une expertise afin d'établir le montant du chiffre d'affair...

Vu la requête, enregistrée le 27 février 2003, présentée pour la société MEDIA FUSION, par Me Y... ;

La société MEDIA FUSION demande à la Cour :

1) d'annuler le jugement n° 01-0279 en date du 7 novembre 2002 par lequel le tribunal administratif de Tribunal administratif de Nouvelle Calédonie a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1995, 1996 et 1997 et des pénalités y afférentes ;

2) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3) d'ordonner une expertise afin d'établir le montant du chiffre d'affaires de la société et la réalité des prestations réalisées pour le compte de la société par MM. Z... et X... agissant en tant qu'agents commerciaux indépendants ;

4) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 10 000 au titre de l'article 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention fiscale franco-calédonienne des 31 mars et 5 mai 1983 ;

Vu la loi 99-209 du 19 mars 1999 organique et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999 relatives à la Nouvelle-Calédonie ;

Vu le code territorial des impôts applicable à l'espèce ;

Vu le code des impôts de la Nouvelle-Calédonie ;

Vu la loi n° 76-1121 du 28 décembre 1976 relative à l'organisation de la Nouvelle-Calédonie et dépendances ;

Vu le code de justice administrative dans sa version applicable en Nouvelle-Calédonie ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 décembre 2005 :

- le rapport de Mme de Lignières, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Bataille, commissaire du Gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, d'une part, que la société MEDIA FUSION soutient que les premiers juges lui ont opposé à tort le caractère prématuré de sa requête pour ce qui concerne les conclusions relatives à l'année 1997 ; qu'il résulte de l'instruction que les premiers juges ont opéré une confusion entre la date de mise en recouvrement de l'impôt sur le revenu relative à cette année et réclamé aux associés au titre de cette année et celle de l'impôt sur les sociétés ; qu'il y a donc lieu de ce fait d'annuler le jugement en tant qu'il a déclaré prématurées les conclusions relatives à l'impôt sur les sociétés dû par la société MEDIA FUSION au titre de l'année 1997 ;

Considérant, d'autre part, que la société conteste l'irrecevabilité qui lui a été opposée en première instance au motif que ses conclusions faisaient état d'une somme supérieure à celle qu'elle contestait dans sa réclamation préalable ; qu'il résulte de l'instruction que, bien que la réclamation en cause n'ait porté que sur les commissions versées aux gérants, l'admission de ces conclusions par l'administration qui a prononcé le dégrèvement correspondant ne permettait aux premiers juges d'opposer l'irrecevabilité tirée du dépassement des conclusions de la réclamation que dans la mesure où les conclusions de la demande relatives aux dépenses personnelles des gérants et aux frais de réception et de voyages conduisaient à des dégrèvements d'un montant supérieur, au titre de chaque exercice, à celui sollicité dans la réclamation, ce qui ne pouvait se faire sans examen préalable des dites conclusions ; qu'il y a donc lieu dans cette mesure, de prononcer l'annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur l'ensemble de la demande et de la requête de la société MEDIA FUSION ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant en premier lieu, que l'autonomie fiscale propre à la Nouvelle-Calédonie, dont l'article 223 de la loi organique du 19 mars 1999 susvisée dispose qu'elle succède au territoire d'outre-mer de la Nouvelle-Calédonie dans l'ensemble de ses droits, biens et obligations, déroge à la répartition des compétences découlant des article 34 et 37 de la Constitution, et s'exerce par des délibérations de l'organe délibératif compétent, à caractère réglementaire, dans la limite toutefois du domaine réservé par l'article 99 de la loi organique susvisée aux lois de ce pays ; que dès lors, la société requérante, n'est en tout état de cause, fondée ni à contester la compétence fiscale de la Nouvelle-Calédonie, ni le caractère réglementaire des délibérations précédemment intégrées dans le code territorial des impôts applicable à l'espèce, ni, par des allégations en tout état de cause trop imprécises pour être recevables, « l'anticonstitutionnalité » de ce dernier, devenu, depuis, le code des impôts de la Nouvelle-Calédonie ;

Considérant en deuxième lieu, que doivent également être rejetés comme inopérants, les moyens tirés du non respect des dispositions du livre des procédures fiscales métropolitain, non applicables en l'espèce ;

Considérant en troisième lieu, que compte tenu du caractère distinct des procédures, doivent être rejetés comme inopérants les moyens tirés de l'irrégularité alléguée de la procédure suivie à l'encontre du bénéficiaire désigné des commissions précitées, considérées comme revenus distribués ;

Considérant en quatrième lieu, que la société MEDIA FUSION soutient qu'elle n'a pu valablement présenter sa défense dans la mesure où la lettre du 18 août 1999, qui comporte, pour partie, une réponse aux observations du contribuable et, pour partie la notification à la contribuable des nouvelles bases d'impositions retenues par l'administration prenant en compte certaines observations de la société, était d'une confusion telle qu'elle n'aurait permis à la requérante, ni de faire le départ entre la réponse à ses observations et ce qui étaient les nouvelles bases notifiées, ni de connaître la motivation des redressements ; que cependant il résulte de l'instruction que cette lettre identifiait clairement chaque chef de redressements dans un paragraphe distinct et indiquant les motifs de chacun d'eux ; qu'à la suite de chacun des redressements nouvellement notifiés, était en outre précisé que la société disposait d'un délai de trente jour pour faire part à l'administration de ses observations ainsi que la possibilité de se faire assister d'un conseil ; que dans ces conditions ce moyen manque en fait ;

Considérant en cinquième lieu, que manquent en fait les allégations tirées de l'incompétence ou de l'absence de délégation de signature de la vérificatrice, qui ne dispose pas de délégation de pouvoir ; que n'est pas plus établie l'allégation de pressions auxquelles se serait livré le vérificateur, en réalité tenu à l'obligation légale découlant de l'article 40 du code de procédure pénale ;

Considérant en sixième lieu, que la société ne peut pas non plus utilement soutenir que l'emport, même en grand nombre, de photocopies de documents comptables a constitué en l'espèce un emport de documents, dès lors que le contribuable a conservé les originaux et n'a pas été privé du dialogue prescrit par les dispositions susmentionnées du code des impôts de la Nouvelle Calédonie ; qu'elle ne peut non plus ni invoquer le non respect de délais non prévus par le code précité, ni rejeter l'argumentation en défense de l'administration en tant qu'elle s'appuie en cours d'instance sur une motivation non contenue dans ses premières écritures du 26 octobre 2002, annulées et remplacées par les mémoires ultérieurs ; qu'il est également inopérant d'exciper de régularisation encaissée en 1997 à l'appui de conclusion subsidiaires relatives à l'année 1996 .

Considérant en septième lieu, que si la société requérante a entendu soutenir dans son moyen tiré de l'irrégularité du rôle que l'avis de mise en recouvrement n'était pas suffisamment explicité, il résulte de l'instruction que cet avis précisait tous les éléments de calcul, le montant et la nature des droits et des pénalités constituant la créance ; qu'au surplus et de façon surabondante il renvoyait la requérante à la lettre du 18 août 1999 qui comportait la récapitulation de tous les éléments fondant l'imposition ; que ce moyen manque donc en fait ;

Considérant enfin que le moyen tiré de la réponse insuffisante aux arguments justifiant la réalité des services rendus par les agents commerciaux est inopérant à l'encontre de la régularité de la procédure ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article 21-1 du code territorial des impôts de la Nouvelle-Calédonie applicable à l'espèce : «Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges à condition : de se rattacher à la gestion normale de l'entreprise ou d'être exposées dans l'intérêt de l'exploitation ; de se traduire par une diminution de l'actif net de l'entreprise ; de correspondre à une charge effective et d'être appuyées de justifications suffisantes ; de ne pas être exclues par une disposition particulière…/ Toutefois les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Cette disposition s'applique à toute les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursements de frais » ;

Considérant que, s'il appartient à l'administration de démontrer le caractère anormal d'un acte de gestion, il appartient tout d'abord à l'entreprise de justifier de la réalité, de l'intérêt pour son activité et de l'exactitude de ses écritures comptables de charges ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que lors de l'assemblée générale ordinaire annuelle du 30 juin 1992, composée exclusivement de deux associés gérants qui perçoivent des dividendes de la société MEDIA FUSION, a été prise une décision de gestion, opposable à cette société, mais ne la dispensant pas de la charge de la preuve ci-dessus rappelée ; que cette décision concernant les modalités de rémunération des associés en qualité d'agents commerciaux patentés fixait la commission qui leur serait versée à trente pour cent du chiffre d'affaires qu'ils auraient chacun réalisé ; qu'il est par ailleurs démontré par l'administration que les commissions déduites en charges par la société et déclarées comme telles se montaient en réalité à trente pour cent de l'ensemble du chiffre d'affaires réalisé par la société ;

Considérant d'une part, que la société requérante qui produit une facture très sommaire établie par ses associés portant la mention « commissions sur divers supports » sans autre précision ainsi que des contrats conclus entre elle-même et différents clients et excipe du montant de son chiffre d'affaires total alors qu'elle emploie également d'autres agents commerciaux payés à la commission et rémunère une secrétaire en commun avec d'autres sociétés ne justifie pas ainsi de la réalité, de l'intérêt pour son activité et de l'exactitudes de ses écritures comptables de charges au titre des commissions litigieuses ; que dans ces circonstances c'est à bon droit que l'administration a réintégré dans les exercices clos en 1995, 1996 et 1997 l'intégralité des sommes en cause indûment portées en charges déductibles faute de justificatifs suffisants ;

Considérant d'autre part, que la société ne saurait justifier par ses seules allégations que la prise en charge des frais engagés par ses deux associés pour leur logement, leur électricité et leur téléphone constituait un complément de salaire en nature ; qu'elle n'établit pas non plus que les frais de réception et de voyages qu'elle a remboursés à MM X... et Z... avaient été engagés dans l'intérêt de l'entreprise ; que dans ces conditions c'est à bon droit que l'administration a refusé la déduction des sommes correspondant à ces remboursements du chiffre d'affaires de la société ;

Considérant enfin que l'administration ayant abandonné en 1999 les redressements issus des pertes sur créances irrécouvrables, le moyen tiré de ce que ces pertes résultaient d'une erreur comptable est inopérant à l'encontre des impositions maintenues par l'administration ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société MEDIA FUSION n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nouvelle Calédonie a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à ce que la cour ordonne une expertise :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce d'ordonner l'expertise sollicitée par la requérante ;

Sur les conclusions de la société MEDIA FUSION tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le territoire de la Nouvelle Calédonie qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la société MEDIA FUSION la somme qu' elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie est annulé en ce qu'il a déclaré prématurées les conclusions de la société MEDIA FUSION relatives à l'impôt sur les sociétés de l'année 1997 et en tant qu'il a déclaré que les conclusions de la société excédaient le quantum de sa réclamation préalable sans examiner le montant du quantum restant en litige en fonction du dégrèvement prononcé par l'administration.

Article 2 : La requête de la société MEDIA FUSION est rejetée.

4

N° 03PA00899


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 03PA00899
Date de la décision : 30/12/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ESTEVE
Rapporteur ?: Mme Frédérique DE LIGNIERES
Rapporteur public ?: M. BATAILLE
Avocat(s) : CHASSARD

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-12-30;03pa00899 ?
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