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28/12/2005 | FRANCE | N°03PA00657

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3eme chambre - formation a, 28 décembre 2005, 03PA00657


Vu la requête, enregistrée le 10 février 2003, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE VILLENEUVE SAINT GEORGES, par la SCP d'avocats Dumont-Bortolotti-Combes ; le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE VILLENEUVE SAINT GEORGES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 7 novembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Melun l'a déclaré responsable des conséquences dommageables du retard avec lequel le diagnostic du cancer dont souffrait Mme X a été posé, l'a condamné à verser à cette dernière la somme de 33 000 euros au titre de ses diff

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Vu la requête, enregistrée le 10 février 2003, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE VILLENEUVE SAINT GEORGES, par la SCP d'avocats Dumont-Bortolotti-Combes ; le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE VILLENEUVE SAINT GEORGES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 7 novembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Melun l'a déclaré responsable des conséquences dommageables du retard avec lequel le diagnostic du cancer dont souffrait Mme X a été posé, l'a condamné à verser à cette dernière la somme de 33 000 euros au titre de ses différents préjudices et à l'Etat la somme de 90 641, 04 euros au titre du préjudice matériel et à mis à sa charge les frais d'expertise ;

2°) de rejeter les demandes de Mme X et de l'Etat présentées devant le Tribunal administratif ;

3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise afin de déterminer l'étendue des préjudices réparables consécutifs au seul retard de diagnostic reproché au centre hospitalier ;

4°) à titre infiniment subsidiaire, de réduire les demandes de Mme X et de l'Etat à de plus justes proportions ;

5°) de condamner Mme X à lui payer la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 décembre 2005 :

- le rapport de M. Boulanger, rapporteur,

- les observations de Me Dumont pour le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE VILLENEUVE SAINT GEORGES,

- et les conclusions de Mme Folscheid, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme X, qui était suivie depuis 1984 par le docteur Y, chef du service de gynécologie du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE VILLENEUVE SAINT GEORGES, se plaignait régulièrement de douleurs mammaires ; qu'après que la réapparition d'un kyste au niveau du quadrant supéro-externe droit eut été révélée par une échographie mammaire le 22 décembre 1990, le docteur Y demanda une nouvelle exploration par mammographie et échographie qui fut réalisée le 18 mai 1993, suivie d'un deuxième examen le 21 novembre 1994 ; que Mme X, qui n'était pas entièrement satisfaite de la prise en charge dont elle faisait l'objet au sein du service du centre hospitalier, a subi le 23 mai 1996, à la demande d'un autre gynécologue, une nouvelle exploration mammographique et échographique avant de consulter à l'institut Gustave Roussy de Villejuif, où fut pratiquée, le 9 juillet 1996, une tumorectomie bilatérale avec examen extemporané ; que fut alors porté le diagnostic d'un cancer invasif des deux côtés ; qu'une chimiothérapie a été entreprise dès le mois d'août 1996 ; que le 13 janvier 1997, une reprise chirurgicale fut réalisée du côté droit ; que depuis, la patiente est suivie en consultation à l'institut Gustave Roussy de Villejuif et se trouve sous surveillance régulière clinique, biologique et radio-échographique ;

Considérant que, par le jugement attaqué du 7 novembre 2002, le Tribunal administratif de Melun a estimé le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE VILLENEUVE SAINT GEORGES responsable, du fait du retard apporté dans le diagnostic de la maladie, de la perte de chance de survie pour la patiente et de l'aggravation des interventions, des traitements et des autres conséquences de tout ordre, consécutives à l'évolution, entre les mois de mai 1993 et de juillet 1996, du cancer dont l'intéressée est atteinte ; que les premiers juges ont condamné l'établissement à verser à Mme X la somme de 33 000 euros au titre de ses différents préjudices et à l'Etat, son employeur, la somme de 90 641, 04 euros au titre du préjudice matériel après avoir fixé à la moitié la part des préjudices imputables au retard de diagnostic ; que le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE VILLENEUVE SAINT GEORGES fait appel du jugement en tant qu'il prononce ces condamnations à son encontre, tandis que l'Etat et Mme X concluent à la confirmation du jugement entrepris ;

En ce qui concerne la responsabilité :

Considérant que Mme X, alors âgée de 46 ans, a subi une première exploration par mammographie et échographie le 18 mai 1993 ; qu'à la suite de cette investigation, au vu de laquelle le docteur Z, radiologue ayant réalisé les clichés, concluait à la présence d'une polykystose mammaire avec un gros kyste du quadrant supéro-externe du sein droit, sans signe de suspicion, le docteur Y a reçu Mme X le 25 mai 1994 ; qu'il a constaté alors la persistance du kyste droit qui a été ponctionné et dont la cytologie se révèlera négative ; que l'hormonothérapie substitutive par Trisequens, mise en place quelques années auparavant, a été poursuivie et un nouveau contrôle écho-mammographique prescrit pour la fin de l'année ; qu'après cette nouvelle exploration, réalisée le 21 novembre 1994, le radiologue a conclu à l'absence d'image suspecte ; que lors d'une consultation du 4 avril 1995, le docteur Y n'a pas demandé d'examens complémentaires de contrôle, compte tenu du caractère récent des précédentes explorations pratiquées et malgré la persistance de douleurs de plus en plus constantes ; que, lors d'une consultation postérieure, le 20 décembre 1995, le docteur Y a prescrit à Mme X la poursuite du traitement par Trisequens ; que, toutefois, ordonnée par un autre gynécologue consulté spontanément par cette dernière, une nouvelle exploration mammographique et échographique a été réalisée le 23 mai 1996, à l'issue de laquelle a été conseillé un contrôle histologique ; que, lors d'une tumorectomie bilatérale avec examen extemporané pratiquée le 9 juillet 1996 à l'institut Gustave Roussy de Villejuif, l'existence d'un cancer invasif des deux côtés a été constaté qui a requis une intervention par un curage axillaire bilatéral ; que l'examen définitif des pièces opératoires a révélé à droite, l'existence d'un cancer invasif avec atteinte lymphatique et, à gauche, un cancer invasif sans atteinte lymphatique ;

Considérant que le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE VILLENEUVE SAINT GEORGES fait valoir que le rapport déposé par les experts le 20 septembre 1998 ne précise pas si ou dans quelle mesure Mme X aurait subi des dommages directement imputables à la faute qu'aurait commise le docteur Y, chef du service de gynécologie du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE VILLENEUVE SAINT GEORGES, en ne diagnostiquant pas plus précocement le cancer dont a été atteinte Mme X ; que l'état du dossier ne permet pas à la cour d'apprécier le bien fondé de ces allégations, ni par suite de se prononcer sur l'éventuelle responsabilité du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE VILLENEUVE SAINT GEORGES non plus que de déterminer le montant des préjudices subis par Mme X ; qu'il y a lieu dès lors, avant de statuer sur les conclusions présentées par le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE VILLENEUVE SAINT GEORGES et la demande d'indemnité de Mme X, d'ordonner une nouvelle expertise en vue de dire si, en l'état des connaissances scientifiques à la date des examens (mammographies et échographies) pratiqués les 18 mai 1993 et 21 novembre 1994 par le docteur Z et abstraction faite de toute étude rétrospective de ces explorations à la lumière des examens ultérieurs, ces mammographies et échographies permettaient, à ces dates successives, de poser le diagnostic du cancer ; de dire si l'analyse des clichés réalisés par le docteur Z rendait ou non nécessaire la prescription par le docteur Y d'examens complémentaires ; de rechercher si l'éventuel retard d'établissement du diagnostic du cancer dont a été atteinte Mme X a causé à l'intéressée des préjudices dont cette dernière est fondée à demander réparation et, dans l'affirmative, d'évaluer le montant de ces préjudices ;

D E C I D E :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur la demande d'indemnité de Mme X, procédé à une expertise aux fins précisées ci-dessus, par un expert désigné par le Président de la cour.

Article 2 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621 ;2 à R. 621 ;14 du code de justice administrative. Le rapport d'expertise sera déposé au greffe de la cour dans le délai de trois mois suivant la prestation de serment.

Article 3 : Les frais d'expertise seront avancés par le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE VILLENEUVE SAINT GEORGES.

Article 4 : Tous les droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

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N° 03PA00657


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3eme chambre - formation a
Numéro d'arrêt : 03PA00657
Date de la décision : 28/12/2005
Sens de l'arrêt : Avant dire-droit - expertise
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme CARTAL
Rapporteur ?: M. Christian BOULANGER
Rapporteur public ?: Mme FOLSCHEID
Avocat(s) : SCPA DUMONT BORTOLOTTI COMBES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-12-28;03pa00657 ?
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