Vu le recours, enregistré le 17 juillet 2002, du MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES, DU TRAVAIL ET DE LA SOLIDARITE ; le MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES, DU TRAVAIL ET DE LA SOLIDARITE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9112530 en date du 15 mai 2002 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de la société Valérie Stern, l'arrêté en date du 30 juin 1997 par lequel le préfet de Paris lui a refusé une dérogation à la règle du repos dominical pour le personnel du magasin de vente de prêt-à-porter féminin qu'elle exploitait au ... dans le quatrième arrondissement de Paris ;
2°) de rejeter la demande présentée par la société Valérie Stern devant le Tribunal administratif de Paris ;
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Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 novembre 2005 :
- le rapport de M. Jarrige, rapporteur,
- les observations de Me *, pour *,
- et les conclusions de Mme Folscheid, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 221-5 du code du travail : «Le repos hebdomadaire doit être donné le dimanche» ; qu'aux termes de l'article L. 221-6 dudit code : «Lorsqu'il est établi que le repos simultané, le dimanche, de tout le personnel d'un établissement serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de cet établissement, le repos peut être donné, soit toute l'année, soit à certaines époques de l'année seulement suivant l'une des modalités ci-après : a) Un autre jour que le dimanche à tout le personnel de l'établissement ; b) Du dimanche midi au lundi midi ; c) Le dimanche après-midi avec un repos compensateur d'une journée par roulement et par quinzaine ; d) Par roulement à tout ou partie du personnel. Les autorisations nécessaires ne peuvent être accordées que pour une durée limitée. Elles sont données après avis du conseil municipal, de la chambre de commerce et d'industrie et des syndicats d'employeurs et de travailleurs intéressés de la commune» ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 221-8-1 du même code : «Sans préjudice des dispositions de l'article L. 221-6, dans les communes touristiques ou thermales et dans les zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente, le repos hebdomadaire peut être donné par roulement pour tout ou partie du personnel, pendant la ou les périodes d'activités touristiques, dans les établissements de vente au détail qui mettent à disposition du public des biens et des services destinés à faciliter son accueil ou ses activités de détente ou de loisirs d'ordre sportif, récréatif ou culturel. La liste des communes touristiques ou thermales concernées est établie par le préfet, sur demande des conseils municipaux, selon des critères et des modalités définis par voie réglementaire. Pour les autres communes, le périmètre des zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente est délimité par décision du préfet prise sur proposition du conseil municipal. Les autorisations nécessaires sont accordées par le préfet après avis des instances mentionnées au sixième alinéa de l'article L. 221-6» ;
Considérant que, pour se prononcer sur la demande de dérogation présentée par la société Valérie Stern pour le personnel du magasin de vente de prêt-à-porter féminin qu'elle exploitait au 33 de la rue des Francs Bourgeois à Paris, et notamment apprécier si le fonctionnement normal de cet établissement serait compromis par le repos simultané de l'ensemble de son personnel, le préfet de Paris n'était tenu de prendre en compte que les détournements de clientèle dont étaient responsables des établissements concurrents régulièrement ouverts le dimanche ; qu'il n'est pas contesté qu'aucun commerce de vêtement, dans la rue des Francs Bourgeois ou dans toute autre rue de Paris, n'avait, à la date de sa décision, obtenu une dérogation à la règle du repos dominical sur le fondement des dispositions susrappelées des articles L. 221-6 et L. 221-8-1 du code du travail, à l'exception de ceux situés à proximité immédiate d'un marché dominical ; que, par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté préfectoral en date du 30 juin 1997 rejetant la demande de l'intéressée au motif qu'en se fondant sur les seules circonstances que les produits vendus ne correspondraient pas à une «nécessité quotidienne avérée» et que la clientèle pourrait être reportée sur les autres jours de la semaine, sans s'interroger sur le respect des principes de la liberté du commerce et de l'industrie et de la libre concurrence, le préfet de Paris devait être regardé comme ayant commis une erreur d'appréciation ;
Considérant qu'il appartient toutefois à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Valérie Stern devant le Tribunal administratif de Paris ;
Considérant qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêté préfectoral du 30 juin 1997 précité qu'il comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait en constituant le fondement ; qu'ainsi, il satisfait aux exigences de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ;
Considérant que, par un arrêté en date du 14 octobre 1994, le préfet de Paris a, en application des dispositions précitées de l'article L. 221-8-1 du code du travail, reconnu à la place des Vosges et à la rue des Francs Bourgeois le caractère d'une zone touristique d'affluence exceptionnelle au motif qu'elles constituent une aire d'attraction importante, tant pour les touristes que pour les promeneurs, en raison notamment de leur caractère prestigieux ou de leur situation au coeur même de la partie historique de Paris ; que les articles de prêt-à-porter classique et de lingerie commercialisés par la société Valérie Stern dans son établissement de la rue des Francs Bourgeois ne peuvent être regardés comme des biens destinés à faciliter l'accueil tant de ces touristes que de ces promeneurs ou leurs activités de détente ou de loisirs d'ordre sportif, récréatif ou culturel ; que, par suite, l'intéressée ne pouvait prétendre à l'octroi pour cet établissement d'une dérogation à la règle du repos dominical sur le fondement des dispositions de l'article L. 221-8-1 du code du travail ;
Considérant que de tels articles ne sont pas au nombre des biens que les touristes s'attendent à trouver, même le dimanche, dans des lieux de grande fréquentation touristique ; que, pour le reste du public, leur achat peut s'effectuer sans difficulté au cours de la semaine ; que, par suite, le repos simultané le dimanche de tout le personnel dudit établissement ne peut pas plus être regardé comme «préjudiciable au public» au sens des dispositions précitées de l'article L. 221-6 du code du travail ;
Considérant enfin que, pour justifier que le fonctionnement normal de son établissement serait compromis par sa fermeture le dimanche, la société Valérie Stern ne peut se prévaloir de l'importance de son chiffre d'affaires ce jour là, qui a été réalisé grâce à son maintien en situation irrégulière ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES, DU TRAVAIL ET DE LA SOLIDARITE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 30 juin 1997 du préfet de Paris refusant à la société Valérie Stern une dérogation à la règle du repos dominical ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 15 mai 2002 du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la société Valérie Stern devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.
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