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08/11/2005 | FRANCE | N°01PA02661

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4eme chambre, 08 novembre 2005, 01PA02661


Vu la requête, enregistrée le 8 août 2001, présentée pour la Société EXOFARM, dont le siège est ... B3 Fruileg 751 à Rungis (94594), par la SCP Rambaud Martel ; la Société EXOFARM demande à la cour ;

1°) d'annuler le jugement n° 9905177 du 29 mars 2001 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 septembre 1997, confirmée le 29 octobre 1997, du directeur de l'office de développement de l'économie agricole des départements d'outre-mer (l'ODEADOM) rejetant sa demande tendant au versement d'une aide commu

nautaire, et à la condamnation de l'ODEADOM à lui verser la somme de 357 3...

Vu la requête, enregistrée le 8 août 2001, présentée pour la Société EXOFARM, dont le siège est ... B3 Fruileg 751 à Rungis (94594), par la SCP Rambaud Martel ; la Société EXOFARM demande à la cour ;

1°) d'annuler le jugement n° 9905177 du 29 mars 2001 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 septembre 1997, confirmée le 29 octobre 1997, du directeur de l'office de développement de l'économie agricole des départements d'outre-mer (l'ODEADOM) rejetant sa demande tendant au versement d'une aide communautaire, et à la condamnation de l'ODEADOM à lui verser la somme de 357 325 F (54 473 euros) en règlement d'aides communautaires dues à raison de l'importation de fruits du département de la Réunion ;

2°) d'annuler les décisions susvisées et de condamner l'ODEADOM à lui verser l'aide en cause, avec intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 1997, dans un délai de trois mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 5 000 F (762 euros) par jour de retard, 50 000 F (7 622 euros) de dommages et intérêts et 30 000 F (4 573 euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement (CEE) n° 3763/91 du 16 décembre 1991 portant mesures spécifiques concernant certains produits agricoles en faveur des départements français d'outre-mer ;

Vu le règlement (CEE) n° 667/92 du 16 mars 1992 fixant les modalités d'application relatives aux mesures spécifiques adoptées en faveur des départements français d'outre-mer dans le secteur des fruits, des légumes, des plantes et des fleurs ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 18 octobre 2004 :

- le rapport de Mme Corouge, rapporteur,

- les observations de Me Y..., pour la Société EXOFARM et celles de Me X..., pour l'ODEADOM,

- et les conclusions de M. Trouilly, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, selon l'article 15 du règlement CEE n° 3763/91 du 16 décembre 1991, une aide communautaire est octroyée pour la conclusion de contrats de campagne ayant pour objet l'écoulement et la commercialisation de produits agricoles récoltés dans les départements d'outre-mer ; que cette aide, d'un montant de 10 % de la valeur de la production commercialisée, est accordée à l'acheteur après commercialisation desdits produits ; qu'aux termes de l'article 8 du règlement (CEE) n° 667/92 du 16 mars 1992 : (...) 2. l'opérateur qui entend introduire une demande d'aide adresse aux services compétents français le contrat de campagne, avant le début de la période de commercialisation...5. La demande d'aide est introduite par l'acheteur qui a souscrit l'engagement de commercialisation du produit dans le mois qui suit la fin de la période de commercialisation ;

Considérant que la Société EXOFARM, qui a pour objet la commercialisation de fruits et légumes exotiques, a, les 30 août 1996, 15 novembre 1996 et 14 mars 1997, adressé aux organismes compétents, une demande d'aide correspondant à des importations d'ananas, intervenues au 2ème, 3ème et 4ème trimestres de l'année 1996, en provenance de l'île de la Réunion d'un fournisseur local dénommé Ferme Alizé ; que, par décision du 12 septembre 1997, confirmée les 29 octobre 1997 et 29 janvier 1998, le directeur de l'office de développement de l'économie agricole des départements d'outre-mer (ODEADOM) a rejeté ces demandes au double motif que la société EXOFARM, en n'adressant pas son contrat de campagne à l'administration avant le début de la période de commercialisation et en présentant ses demandes d'aide plus d'un mois après la période de commercialisation, avait méconnu les paragraphes 2. et 5. précités de l'article 8 ; qu'en jugeant que l'administration était tenue de refuser l'aide à raison de la production tardive du contrat de campagne, alors que les dispositions de l'article 8 paragraphe 2 ne prescrivent pas l'accomplissement de cette formalité sous peine du déchéance du droit à l'aide, le tribunal a commis une erreur de droit ; que dès lors la Société EXOFARM est fondée à en demander l'annulation ;

Considérant qu'il appartient à la Cour administrative d'appel de Paris, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la Société EXOFARM devant le Tribunal administratif de Paris ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Considérant que, selon l'article 8.1 du règlement (CEE) n° 667/92 du 16 mars 1992, on entend par contrat de campagne , le contrat par lequel un opérateur s'engage à acheter tout ou partie de la production d'un producteur des départements français d'outre-mer en vue de sa commercialisation ; que selon le 2 du même article, le contrat de campagne comprend le calendrier de commercialisation ; que selon le 5 du même article, la demande d'aide est introduite par l'acheteur dans le mois qui suit la fin de la période de commercialisation ;

Considérant qu'il en résulte que l'article 8 du règlement communautaire distingue, d'une part, le contrat de campagne, qui constitue un contrat général d'achat de la production d'un fermier, d'autre part, le calendrier de commercialisation ; que par suite et contrairement à ce que soutient la Société EXOFARM, l'aide doit être demandée à l'issue de chaque période de commercialisation , telle que fixée par le calendrier de commercialisation, et non à l'issue du contrat de campagne ; que si le contrat de campagne souscrit par la Société EXOFARM ne comprend pas de calendrier de commercialisation en méconnaissance du 2 de l'article 8, la Société EXOFARM a, en présentant ses demandes d'aides à l'issue de chaque trimestre, entendu définir le trimestre comme période de commercialisation ; qu'il est constant qu'elle a présenté ses demandes d'aide, sans motif légitime, après l'expiration du délai d'un mois imparti par les dispositions de l'article 8.5 ; qu'il suit de là que l'ODEADOM a fait une exacte application de l'article 8.5 du règlement CEE du 16 mars 1992, en rejetant, par les décisions attaquées, qui ne sont pas entachées d'insuffisance de motivation, les demandes de la Société EXOFARM en raison de leur tardiveté ; que la Société EXOFARM n'est par suite pas fondée à demander l'annulation de ces décisions ; que ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'ODEADOM de lui verser les aides correspondantes doivent être rejetées par voie de conséquence ;

Sur la responsabilité :

Considérant que si l'ODEADOM a fait une exacte application des dispositions de l'article 8.5 du règlement (CEE) du 16 mars 1992, il n'est pas contesté que, d'une part, l'Oniflhor, qui était chargée jusqu'au 31 décembre 1996 du versement de l'aide, n'avait jamais rejeté les demandes de la Société EXOFARM pour non respect du délai imparti par la réglementation communautaire et que, d'autre part, l'ODEADOM, chargé du versement de l'aide à compter du 1er janvier 1997, avait, par une circulaire du 6 mai 1997, admis qu'à titre dérogatoire et temporaire, les dossiers transmis à l'office avant la date de diffusion de la circulaire, qui ne seraient pas en mesure de respecter les conditions relatives aux délais, seraient pris en considération ;

Considérant que la Société EXOFARM fait valoir qu'en mettant fin à une pratique antérieure sans en avertir les opérateurs, l'ODEADOM a méconnu le principe de confiance légitime ; que le fait, pour un organisme national, d'adopter une pratique non conforme au droit communautaire ne saurait donner lieu à une situation juridique protégée pour les opérateurs ; que le non-respect du délai imparti par l'article 8.5 par l'organisme chargé de l'octroi de l'aide n'était pas conforme au droit communautaire ; qu'il suit de là que la société requérante ne peut utilement faire valoir qu'en abandonnant une pratique non conforme au droit communautaire, l'ODEADOM aurait méconnu le principe de confiance légitime ;

Mais considérant qu'en opérant un revirement par rapport aux pratiques antérieures du précédent organisme sans en informer préalablement les opérateurs et en ne tenant pas son engagement formellement exprimé par écrit d'aménager une période transitoire, l'ODEADOM a commis une faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard de la Société EXOFARM ; que toutefois, le non respect du délai d'un mois imparti par la réglementation communautaire résultait d'une simple tolérance à laquelle il pouvait être mis fin à tout moment ; qu'une telle situation juridique ne pouvait être ignorée par la Société EXOFARM ; qu'ainsi, cette dernière a elle-même commis une faute de nature à atténuer la responsabilité de l'ODEADOM dans la proposition de la moitié du préjudice subi ;

Sur le préjudice :

Considérant que si la Société EXOFARM est fondée à demander réparation, pour moitié, du préjudice qui est résulté pour elle de la perte de l'aide pour les fruits importés entre le 1er mars 1996 et le 31 décembre 1996, elle ne peut prétendre à une indemnisation égale au montant des aides non versées mais a seulement droit à être indemnisée des pertes de bénéfices qu'elle a subies par rapport aux résultats qu'elle aurait normalement obtenus si elle avait été mise en mesure de respecter la réglementation communautaire ; qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en fixant ce préjudice à 200 000 F (30 489 euros) tous intérêts compris au jour du présent arrêt ; que, compte tenu du partage de responsabilité, l'ODEADOM doit être condamné à lui verser la moitié de cette somme ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

Considérant que le présent arrêt est exécutoire de plein droit ; qu'il en résulte que les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que la Société EXOFARM, qui n'est pas dans la présente instance la partie principalement perdante, soit condamnée à verser à l'ODEADOM la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu de condamner l'ODEADOM à verser à la Société EXOFARM, sur le fondement du même article, une somme de 1 500 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 29 mars 2001 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : L'ODEADOM est condamné à verser à la Société EXOFARM, d'une part, une somme de 15 245 euros tous intérêts compris au jour du présent arrêt, d'autre part, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

2

N° 01PA02661


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4eme chambre
Numéro d'arrêt : 01PA02661
Date de la décision : 08/11/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. MERLOZ
Rapporteur ?: Mme la Pré Elise COROUGE
Rapporteur public ?: M. TROUILLY
Avocat(s) : ANCEL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-11-08;01pa02661 ?
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