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07/11/2005 | FRANCE | N°02PA03355

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5eme chambre - formation b, 07 novembre 2005, 02PA03355


Vu la requête, enregistrée le 10 septembre 2002, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me Ketchedjian ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 9513105 et 9513106 en date du 3 juillet 2002, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1986, 1987 et 1988, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à leur charge pour la période du 1er janvier 1986 au 31 octobre 1989, et des pénalités y afférentes e

t encore en litige ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litig...

Vu la requête, enregistrée le 10 septembre 2002, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me Ketchedjian ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 9513105 et 9513106 en date du 3 juillet 2002, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1986, 1987 et 1988, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à leur charge pour la période du 1er janvier 1986 au 31 octobre 1989, et des pénalités y afférentes et encore en litige ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 octobre 2005 :

- le rapport de M. Privesse, rapporteur,

- et les conclusions de M. Adrot, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. et Mme X font appel du jugement susmentionné du 3 juillet 2002 ayant rejeté leur demande de décharge des impositions sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels ils ont été assujettis sur la période correspondant aux années 1986, 1987 et 1988 ; qu'ils contestent la régularité de la procédure d'imposition, notamment s'agissant des redressements en matière de bénéfices industriels et commerciaux, ainsi que la reconstitution opérée du chiffre d'affaires de l'entreprise individuelle de M. X ;

Sur le droit de communication :

Considérant qu'il incombe à l'administration d'informer le contribuable dont elle envisage d'arrêter les bases d'imposition par voie de taxation ou d'évaluation d'office, de la teneur des renseignements qu'elle a pu recueillir dans l'exercice de son droit de communication et qu'elle a effectivement utilisés pour procéder aux redressements, afin que l'intéressé soit mis en mesure de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition ;

Considérant que, par les notifications de redressements qu'il a adressées à M. X les 19 décembre 1989 et 16 février 1990, le vérificateur a fait apparaître de façon suffisamment claire la nature et l'origine des documents à l'aide desquels il avait reconstitué les bénéfices industriels et commerciaux du contribuable pour que celui-ci ait été en mesure, s'il le souhaitait, d'en demander la communication, et a indiqué l'objet, le montant et les motifs des redressements de façon suffisante pour lui permettre d'engager une discussion ; que le requérant n'est dès lors pas fondé à contester l'exercice par l'administration de son droit de communication auprès des sociétés pour lesquelles il avait accompli des travaux en sous-traitance, non plus qu'à soutenir que cette notification serait entachée d'un défaut de motivation ;

Sur la régularité de la procédure de vérification :

Considérant qu'aux termes de l'article L.47 du livre des procédures fiscales : ... une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner, expressément, sous peine de la nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix ... ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X a été informé, par un avis en date du 7 novembre 1989, de l'engagement d'une vérification de sa comptabilité ; qu'en raison de difficultés d'acheminement du courrier, le vérificateur a reporté la date de sa première intervention le 30 novembre suivant ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne prescrit à l'administration, lorsqu'elle décide de reporter la date qui avait été initialement prévue pour la première intervention sur place du vérificateur, d'envoyer ou de remettre au contribuable un avis de vérification rectificatif ; qu'en outre, M. X n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a pas disposé d'un délai suffisant pour se faire assister d'un conseil de son choix, eu égard à la circonstance que le vérificateur a prévenu le contribuable du report des opérations par un courrier reçu dix jours avant la nouvelle date de première intervention ; qu'enfin, M. X ne peut se prévaloir des termes d'une doctrine administrative 13 L-1311, ainsi que de la réponse ministérielle à un parlementaire M. Poniatowski, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, dès lors que celles-ci ont trait à la procédure d'imposition ;

Sur la procédure d'imposition d'office au titre des années 1986 et 1987 :

Sur les bénéfices industriels et commerciaux :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors en vigueur : Peuvent être évalués d'office : 1° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus provenant d'entreprises industrielles, commerciales ou artisanales lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 53 A du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal (...) Les dispositions de l'article L. 68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux 1° et 2° ; qu'aux termes de l'article L.68 du même livre dans sa rédaction alors en vigueur : La procédure de taxation d'office (...) n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure. Toutefois, il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure si le contribuable (...) ne s'est pas fait connaître d'un centre de formalités des entreprises ou du greffe du tribunal de commerce ou d'un organisme consulaire (...) ;

Considérant que M. X, qui n'établit pas avoir déposé dans les délais légaux ses déclarations de revenus commerciaux des exercices 1986 et 1987, fait valoir que la procédure d'évaluation d'office dont il a fait l'objet au titre de ces mêmes années, n'a pas été précédée de mises en demeure régulières ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment d'une attestation de la chambre des métiers de Seine-Saint-Denis du 11 octobre 1990, dont l'authenticité n'est pas contestée, que le contribuable s'y était fait connaître au titre d'un établissement principal situé à Aubervilliers, cette attestation précisant le début et la fin d'activité de l'entreprise, à savoir les 24 novembre 1975 et 31 décembre 1989, avec radiation du répertoire des métiers le 7 septembre 1990 ; que si l'administration fait valoir que l'intéressé, exerçant désormais son activité sur la commune de Stains, n'avait pas pris soin de modifier son adresse d'activité, elle ne conteste pas ne pas lui avoir régulièrement notifié à l'adresse d'Aubervilliers, les mises en demeure exigées par les textes susmentionnés ; que par suite, la procédure ayant conduit à l'évaluation d'office des bénéfices industriels et commerciaux des exercices 1986 et 1987, ne peut qu'être irrégulière ; qu'il y a donc lieu d'accorder à M. X la décharge des impositions correspondantes ;

Sur les taxes sur le chiffre d'affaires :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : Sont taxés d'office : ... 3° Aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en qualité de redevables des taxes... ; que l'administration ne peut être regardée, en l'absence de disposition législative en ce sens, comme tenue d'adresser au redevable une mise en demeure avant de procéder à son imposition à la taxe sur la valeur ajoutée par voie de taxation d'office pour défaut de déclaration du chiffre d'affaires passible de cette taxe ; que dès lors, l'administration était en droit de taxer d'office les chiffres d'affaires de M. X au cours de la période couverte par les deux exercices 1986 et 1987, sans procéder au préalable à l'envoi de mises en demeure ;

Considérant par ailleurs que M. X ne saurait se prévaloir, s'agissant de la procédure d'imposition, du bénéfice de la doctrine administrative contenue dans l'instruction 4 G 3326 reprenant la note du 6 mai 1988, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

Sur la notification de redressements du 22 mai 1990 :

Considérant qu'aux termes du III de l'article 3 de la loi n° 77-1453 du 29 décembre 1977 accordant des garanties de procédure aux contribuables en matière fiscale et douanière, codifié aux articles 181 A et 181 B du code général des impôts puis aux articles L. 76 et L. 76 A du livre des procédures fiscales : Les bases ou les éléments servant au calcul des impositions d'office sont portées à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d'une notification qui précise les modalités de leur détermination. Cette notification est interruptive de prescription. Les contribuables peuvent obtenir par la voie contentieuse la décharge ou la réduction de l'imposition mise à leur charge en démontrant son caractère exagéré ; qu'il résulte de ces dispositions que l'administration n'est pas tenue, s'agissant de redressements affectant le revenu global en conséquence de l'évaluation d'office d'un revenu catégoriel, d'adresser au contribuable une notification de redressements particulière ; que par suite, la notification datée du 22 mai 1990 présentait le caractère d'une simple information des contribuables ;

Considérant dès lors, que les moyens tirés par M. et Mme X de ce que la notification de redressements du revenu global des années en litige serait entachée d'illégalité, car elle ne comporte ni les catégories de rattachement des revenus, ni le type de procédure appliquée en ce qui concerne la seule année 1988, sont inopérants ;

Sur le bien-fondé de la reconstitution opérée du chiffre d'affaires :

Considérant que M. et Mme X soutiennent que la méthode de reconstitution suivie par le vérificateur aurait été excessivement sommaire dès lors qu'elle aurait été unique ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen dès lors qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au vérificateur de suivre plusieurs méthodes de reconstitution des résultats ; que la doctrine administrative invoquée par M. et Mme X ne constitue qu'une simple recommandation ; que n'apparaît pas sommaire la méthode de reconstitution mise en oeuvre d'une part, à l'aide des factures et des encaissements constatés chez les donneurs d'ordres, leurs dates et leurs montants étant chaque fois indiqués et d'autre part, en prenant en compte les déclarations de M. X ;

Considérant en outre, que si M. X soutient que cette reconstitution aboutirait à des résultats excessifs dès lors que certaines données seraient inexactes, notamment sa qualité de sous-traitant de plusieurs entreprises ou le nombre de journées travaillées, il n'apporte à l'appui de ses allégations, aucun élément de preuve ; que s'agissant des charges, il ne produit non plus aucune justification de celles-ci, ne proposant en outre aucune autre méthode de reconstitution de son chiffre d'affaires ; que par suite, les moyens de la requête de M. X relatifs au caractère vicié et sommaire de la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires utilisée par l'administration, doivent être rejetés ;

Considérant qu'il résulte ainsi de tout ce qui précède qu'il n'y a lieu d'accueillir que les conclusions de M. et Mme X relatives à la décharge sollicitée des bénéfices industriels et commerciaux réalisés au titre des exercices 1986 et 1987, des impositions sur le revenu correspondantes, ainsi que des pénalités y afférentes ;

Sur les pénalités :

Considérant que compte tenu de ce qui précède et de ce que les pénalités afférentes à l'impôt sur le revenu de l'année 1988 ont été dégrevées, ne restent en litige que les pénalités résultant de la taxation d'office de la taxe sur la valeur ajoutée due sur la période 1986-1989 ;

Considérant que par une lettre n° 751 datée du 2 juillet 1990, régulièrement reçue par les contribuables au plus tard le 18 juillet 1990, l'administration leur a indiqué son intention de faire application, en ce qui concerne les années en litige, des intérêts de retard et des majorations prévues aux articles 1728 et 1733 du code général des impôts alors en vigueur, au motif qu'ils n'avaient pas déposé leurs déclarations de résultats ; qu'elle n'était tenue d'informer les contribuables des pénalités encourues qu'avant la mise en recouvrement des impositions, et non pas seulement au stade de la notification de redressements ; que l'exemplaire produit par l'administration de la lettre du 2 juillet 1990 est lisible en ce qui concerne le chapitre des taxes sur le chiffre d'affaires et précise qu'un délai de 30 jours est laissé aux contribuables pour présenter leurs observations ; qu'enfin, la circonstance que le service vérificateur n'aurait pas lui-même expédié cette lettre aux contribuables, est sans influence sur la régularité de celle-ci ; que dès lors, M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que les pénalités encore en litige ont été irrégulièrement mises à leur charge ;

D E C I D E :

Article 1er : Il est accordé décharge à M. et Mme X des impositions supplémentaires provenant des bénéfices industriels et commerciaux et des pénalités y afférentes, dont ils demeurent redevables au titre des exercices 1986 et 1987.

Article 2 : Le jugement n°s 9513105 et 9513106 en date du 3 juillet 2002 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus de la requête de M. et Mme X est rejeté.

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N° 02PA03355


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 02PA03355
Date de la décision : 07/11/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés SOUMET
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PRIVESSE
Rapporteur public ?: M. ADROT
Avocat(s) : SCP KETCHEDJIAN et BAYLE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-11-07;02pa03355 ?
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