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21/10/2005 | FRANCE | N°02PA01580

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2eme chambre - formation b, 21 octobre 2005, 02PA01580


Vu la requête enregistrée le 3 mai 2002 au greffe de la cour, présentée pour GEODIS LOGISTICS ILE DE FRANCE ayant son siège social ... la Garenne par Me X..., avocat ; GEODIS LOGISTICS ILE DE FRANCE demande à la cour

1°) d'annuler le jugement n° 9601228/1 en date du 5 mars 2002 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant au remboursement d'une somme de 18 763 668 F représentant le solde de la créance sur le Trésor dégagée au titre du report en arrière d'une partie de son déficit constaté au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1984 ain

si que les intérêts de droits courus depuis le 5 août 1991 et la capita...

Vu la requête enregistrée le 3 mai 2002 au greffe de la cour, présentée pour GEODIS LOGISTICS ILE DE FRANCE ayant son siège social ... la Garenne par Me X..., avocat ; GEODIS LOGISTICS ILE DE FRANCE demande à la cour

1°) d'annuler le jugement n° 9601228/1 en date du 5 mars 2002 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant au remboursement d'une somme de 18 763 668 F représentant le solde de la créance sur le Trésor dégagée au titre du report en arrière d'une partie de son déficit constaté au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1984 ainsi que les intérêts de droits courus depuis le 5 août 1991 et la capitalisation desdits intérêts ;

2°) de lui accorder le remboursement du solde de sa créance et des intérêts y afférents ;

3°) de condamner l'Etat au versement d'une somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu à l'audience publique du 7 octobre 2005 :

- le rapport de Mme Evgenas, rapporteur,

- et les conclusions de M. Bataille, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la société GEODIS LOGISTICS ILE DE FRANCE, anciennement SARTEC SERVICES A L'INDUSTRIE est issue de l'absorption par la SARL RECMO, le 31 décembre 1983, des sociétés MUNCH, SARTEC ENTREPRISE, SARTEC ENTREPRISE SUD-EST et TAILLEUR INDUSTRIE ; que par notification de redressements du 9 juin 1989, l'administration a estimé que la société SARTEC SERVICES A L'INDUSTRIE ne pouvait opter pour le report en arrière du déficit de l'exercice clos le 31 décembre 1984 sur les bénéfices antérieurs des sociétés absorbées ; qu'elle a ainsi limité l'imputation sur les seuls bénéfices antérieurs de la SARL RECMO dont la société SARTEC SERVICES A L'INDUSTRIE était la continuité juridique ; qu'elle a, en conséquence, fixé le montant de la créance née du report en arrière du déficit à la somme de 11 893 607 F au lieu de 30 597 275 F retenu par la société SARTEC SERVICES A L'INDUSTRIE ; que la demande de la société en date du 9 juillet 1991 tendant au remboursement de sa créance sur le Trésor présentée pour le montant qu'elle avait initialement déterminé n'a été satisfaite qu'à hauteur de 11 893 607 F ; que la société SARTEC SERVICES A L'INDUSTRIE devenue GEODIS LOGISTICS ILE DE FRANCE demande le remboursement d'une somme de 18 763 668 F représentant le solde de la créance qu'elle prétend détenir sur le Trésor ainsi que les intérêts de droits courus depuis le 5 août 1991 et la capitalisation desdits intérêts ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : ... une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ... d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix ; que l'article L. 171 A du même livre prévoit que pour l'application de l'article 220 quinquies du code général des impôts, l'administration est fondée à vérifier l'existence et la quotité de la créance et à en rectifier le montant, même si l'option pour le report en arrière du déficit correspondant a été exercé au titre d'un exercice prescrit ;

Considérant qu'en application des dispositions susvisées, l'administration a adressé à la société GEODIS LOGISTICS ILE DE FRANCE, le 8 mars 1989, un avis de vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 1986 au 31 décembre 1987 ; que si la société requérante fait valoir que l'administration ne pouvait, à l'occasion de ce contrôle, vérifier l'existence et la quotité de la créance comptabilisée au bilan de l'exercice clos le 31 décembre 1984 et née du report en arrière du déficit de cet exercice faute de lui avoir adressé, au préalable, un avis de vérification de comptabilité mentionnant l'année 1984, il résulte de l'instruction que cette créance figurait toujours aux bilans des exercices vérifiés des années 1986 et 1987 ; que par suite, le vérificateur qui était en droit de vérifier l'exactitude des écritures comptables de ces exercices pouvait régulièrement procéder au contrôle des modalités de détermination de la créance en litige ; que le moyen tiré de ce qu'il aurait ainsi méconnu les dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales doit donc être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L .57 du livre des procédures fiscales : L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation... ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient la société GEODIS LOGISTICS ILE DE FRANCE, la notification de redressements en date du 9 juin 1989 indique la période vérifiée, du 1er janvier 1986 au 31 décembre 1987, et précise que l'administration est également en droit de vérifier les déficits reportés par une entreprise sur les résultats d'exercices non prescrits ; qu'elle précise également la période concernée par le redressement portant sur la créance née du report en arrière du déficit de l'exercice clos le 31 décembre 1984 ; que par suite, la société requérante ne saurait soutenir que cette notification de redressements serait imprécise sur la période vérifiée ;

Considérant que si la société GEODIS LOGISTICS ILE DE FRANCE fait valoir que le redressement portant sur la créance née du report en arrière du déficit de l'exercice 1984 est insuffisamment motivé, il ressort des mentions même de la notification de redressements du 9 juin 1989 qu'elle expose les conditions du report en arrière des déficits prévues par l'article 220 quinquies du code général des impôts et indique que la société SARTEC SERVICES A L'INDUSTRIE n'était pas en droit d'imputer le déficit de l'exercice clos le 31 décembre 1984 sur les bénéfices antérieurs des autres sociétés ayant participé à l'opération de fusion du 29 décembre 1983 dès lors qu'avant la fusion, ces sociétés ne lui étaient pas fiscalement liées ; qu'elle précise également les modalités de détermination de la créance sur le Trésor résultant de l'imputation du déficit réalisé sur les seuls bénéfices antérieurs de la SARL RECMO, société dont la société SARTEC SERVICES A L'INDUSTRIE était la continuité juridique ; que par ces éléments, la société a donc été mise à même de contester utilement le redressement notifié ; que le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales doit donc être écarté ;

Sur le bien fondé :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article 209 du code général des impôts, relatif à la détermination des bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés, dans sa rédaction applicable au présent litige : I...3° Sous réserve de l'option prévue à l'article 220 quinquies, en cas de déficit subi pendant un exercice, ce déficit est considéré comme une charge de l'exercice suivant et déduit du bénéfice réalisé pendant ledit exercice. Si ce bénéfice n'est pas suffisant pour que la déduction puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur les exercices suivants jusqu'au cinquième exercice qui suit l'exercice déficitaire ... II. Sous réserve d'un agrément préalable délivré par le ministre de l'économie et des finances et dans la mesure définie par cet agrément, les fusions de sociétés et opérations assimilées qui entrent dans les prévisions de l'article 210 A peuvent ouvrir droit, dans la limite édictée au troisième alinéa du I, au report des déficits antérieurs non encore déduits soit par les sociétés apporteuses, soit par les sociétés bénéficiaires des apports, sur les bénéfices ultérieurs de ces dernières. ; qu'aux termes de l'article 220 quinquies du même code, dans sa rédaction applicable en l'espèce : I.Par dérogation aux dispositions des troisième et quatrième alinéas du I de l'article 209, le déficit constaté au titre d'un exercice ouvert à compter du 1er janvier 1984 par une entreprise soumise à l'impôt sur les sociétés peut, sur option, être considéré comme une charge déductible du bénéfice de l'antépénultième exercice et, le cas échéant, de celui de l'avant-dernier exercice puis de celui de l'exercice précédent, dans la limite de la fraction non distribuée de ces bénéfices... Cette option porte, pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 1985, sur les déficits reportables à la clôture d'un exercice en application des troisième et quatrième alinéas du I de l'article 209 . Le déficit imputé dans les conditions prévues au premier alinéa cesse d'être reportable sur les résultats des exercices suivant celui au titre duquel il a été constaté. L'excédent d'impôt sur les sociétés résultant de l'application du premier alinéa fait naître au profit de l'entreprise une créance d'un égal montant... La créance est remboursée au terme des cinq années suivant celle de la clôture de l'exercice au titre duquel l'option visée au premier alinéa a été exercée. Toutefois, l'entreprise peut utiliser la créance pour le paiement de l'impôt sur les sociétés dû au titre des exercices clos au cours de ces cinq années( ...) ; qu'il résulte des dispositions précitées du I de l'article 220 quinquies de ce code que les déficits sur lesquels peut porter l'option de report en arrière prévue par ce texte sont ceux qui sont reportables en application des troisième et quatrième alinéas du I de l'article 209 ;

Considérant que la mise en oeuvre du droit au report déficitaire prévu par ces dispositions est subordonnée à la condition d'identité d'entreprise ; que par suite, la société GEODIS LOGISTICS ILE DE FRANCE ne saurait prétendre que la SARL SARTEC SERVICES A L'INDUSTRIE était en droit d'imputer sur les bénéfices antérieurs des sociétés absorbées, sociétés juridiquement distinctes, le déficit qu'elle avait subi au cours de l'exercice suivant celui au cours duquel est intervenue la fusion ; qu'est sans incidence la circonstance qu'elle appartenait à un même groupe économique que les sociétés absorbées ; que si la société requérante fait valoir que, dans plusieurs cas, la société absorbante peut user des bénéfices de l'absorbée , aucune disposition législative ou réglementaire, alors que le report en arrière revêt un caractère dérogatoire, n'autorise une société absorbante à imputer le déficit d'un exercice sur les bénéfices antérieurs des sociétés absorbées ; que dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause l'imputation du déficit constaté au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1984 sur les bénéfices antérieurs des société absorbées et a limité cette imputation aux seuls bénéfices dégagés par la SARL RECMO dont la SARL SARTEC SERVICES A L'INDUSTRIE était la continuité juridique ; que la société GEODIS LOGISTICS ILE DE FRANCE ne saurait donc prétendre au remboursement d'un complément de 18 763 668 F au titre de sa créance sur le Trésor ;

En ce qui concerne l'application de la doctrine administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. (...) ; qu'aux termes de l'article L. 80 B du même livre : La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ; (...) ;

Considérant, en premier lieu, que la société GEODIS LOGISTICS ILE DE FRANCE ne saurait utilement se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des paragraphes 28 et 29 de l'instruction du 26 mars 1985 4 H.1.85 qui, se bornant à commenter les dispositions de l'article 46 quater- O T 2° de l'annexe III au code général des impôts relatives à la neutralisation des investissements en biens amortissables en cas de fusion, question qui au demeurant n'est pas en litige dans la présente affaire, ne contiennent aucune interprétation formelle opposable à l'administration ;

Considérant, en deuxième lieu que la circonstance que le comité interministériel des restructurations industrielles, CIRI, appelé à examiner la situation financière au 31 décembre 1984 de la SARL SARTEC SERVICES A L'INDUSTRIE n'ait formulé aucune observation sur la validité de la créance en cause telle que déterminée par la société ne constitue pas une prise de position formelle sur une situation de fait opposable à l'administration fiscale ; que la lettre du 25 juillet 1990 du secrétaire général du CIRI selon laquelle la créance faisait partie du bouclage financier du projet ne saurait, en tout état de cause, valoir interprétation formelle opposable à l'administration fiscale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société GEODIS LOGISTICS ILE DE FRANCE ne peut pas prétendre à un remboursement complémentaire de 18 763 668 F au titre de sa créance sur le Trésor et par voie de conséquence, en tout état de cause, au versement d'intérêts et à la capitalisation desdits intérêts ; que par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions de la société GEODIS LOGISTICS ILE DE FRANCE tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante soit condamné à payer à la société GEODIS LOGISTICS ILE DE FRANCE la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société GEODIS LOGISTICS ILE DE FRANCE est rejetée.

2

N° 02PA01580


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 02PA01580
Date de la décision : 21/10/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ESTEVE
Rapporteur ?: Mme Janine EVGENAS
Rapporteur public ?: M. BATAILLE
Avocat(s) : LAGRANGE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-10-21;02pa01580 ?
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