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07/07/2005 | FRANCE | N°05PA00948

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Juge des reconduites a la frontiere, 07 juillet 2005, 05PA00948


Vu la requête, enregistrée le 8 mars 2005, présentée pour M. Mohamed X, élisant domicile chez Mme Awa Y ..., par la SCP Sand et Bapt, société d'avocats ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0319028 du 2 février 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 décembre 2003 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de police

de lui délivrer un titre de séjour temporaire mention « vie privée et familiale » sous astreinte...

Vu la requête, enregistrée le 8 mars 2005, présentée pour M. Mohamed X, élisant domicile chez Mme Awa Y ..., par la SCP Sand et Bapt, société d'avocats ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0319028 du 2 février 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 décembre 2003 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour temporaire mention « vie privée et familiale » sous astreinte de cinquante euros par jour de retard, à compter de la notification de la décision ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 14 avril 2005, admettant M. X au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le mémoire, enregistré le 13 mai 2005, présenté pour M. X, par Me Nemri, avocat, tendant à :

1°) l'annulation du jugement et de l'arrêté susvisés ;

2°) ce qu'il soit enjoint au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer son dossier sous astreinte de cent euros par jour de retard ;

Il fait valoir les mêmes moyens que la requête ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision par laquelle le président de la cour a délégué les pouvoirs qui lui sont attribués par l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, à Mme HELMLINGER ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 juin 2005 :

- le rapport de Mme HELMLINGER,

- les observations de Me Nemri pour M. X,

- et les conclusions de M. BATAILLE, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête :

Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article 25 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945, alors en vigueur, des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : …7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X vit en concubinage, au moins depuis la fin de l'année 1999, avec Mme Fatoumata Z qui est titulaire d'une carte de résident de 10 ans ; qu'ils ont eu ensemble 3 enfants âgés, à la date de l'arrêté attaqué, respectivement de 8 ans, 4 ans et 4 mois ; que si l'intéressé n'a reconnu le premier de ses trois enfants, né le 7 juillet 1995, que le 12 décembre 1998, il a alors effectué les démarches nécessaires pour lui transmettre son nom et exercer conjointement avec sa concubine l'autorité parentale ; qu'ainsi, eu égard aux liens familiaux de M. X constitués sur le territoire français, il doit être regardé comme pouvant prétendre de plein droit à la délivrance d'une carte de séjour en application des dispositions précitées du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que, par suite, le préfet de police ne pouvait, sans méconnaître ces dispositions, prendre à son encontre l'arrêté attaqué ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin de régularisation de la situation administrative de l'intéressé :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé » ; que l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : « Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au titre V du présent livre et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas » ;

Considérant qu'à la suite de l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions précitées de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour et, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prescrire au préfet de police de se prononcer sur la situation de M. X dans le délai d'un mois suivant la notification de la présente décision ; qu'il n'y a pas lieu, toutefois, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 2 février 2005 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du préfet de police en date du 5 décembre 2003 décidant la reconduite à la frontière de M. X sont annulés.

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N°05PA00948


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Juge des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05PA00948
Date de la décision : 07/07/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Laurence HELMLINGER
Rapporteur public ?: M. BATAILLE
Avocat(s) : SAND

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-07-07;05pa00948 ?
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