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16/06/2004 | FRANCE | N°99PA00720

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2eme chambre - formation a, 16 juin 2004, 99PA00720


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 15 mars 1999, présentée pour Mme Denise X, demeurant ..., par Me DUBAULT, avocat ; Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 21 décembre 1998 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels elle a été assujettie au titre des années 1984 et 1985 mises en recouvrement le 31 mai 1990 ainsi que des pénalités dont elles ont été assorties et, d'autre part, à la restitution des cotisations d'impôt s

ur le revenu acquittées à tort en 1986 et 1987 ;

2°) de prononcer la déch...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 15 mars 1999, présentée pour Mme Denise X, demeurant ..., par Me DUBAULT, avocat ; Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 21 décembre 1998 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels elle a été assujettie au titre des années 1984 et 1985 mises en recouvrement le 31 mai 1990 ainsi que des pénalités dont elles ont été assorties et, d'autre part, à la restitution des cotisations d'impôt sur le revenu acquittées à tort en 1986 et 1987 ;

2°) de prononcer la décharge demandée des impositions litigieuses ;

3°) de décider qu'il sera sursis à l'exécution du jugement attaqué ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 50 000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juin 2004 :

- le rapport de M. ALFONSI, premier conseiller,

- et les conclusions de M. MAGNARD, commissaire du Gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par une décision datée du 24 mars 2003 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de l'Essonne a prononcé le dégrèvement, en droits et intérêts de retard à concurrence d'une somme de 368 181 F (56 128,23 euros) des compléments d'impôt sur le revenu auxquels Mme X a été assujettie au titre des années 1984 et 1985 ; que par une décision du 26 septembre 2003, la même autorité a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence d'une somme de 1 258,94 euros du complément d'impôt sur le revenu auquel Mme X a été assujettie au titre de l'année 1987 ; que les conclusions de la requête de Mme X relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L.47 du livre des procédures fiscales : Une vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité, que le contribuable a la faculté de se faire assister d'un conseil de son choix... ; qu'il n'est pas contesté que Mme X a reçu le 28 juillet 1986, deux avis de vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble datés du 25 juillet 1986 et mentionnant la faculté pour le contribuable de se faire assister par un conseil de son choix, l'un adressé à M. ou Mme X concernant les revenus perçus par eux en 1983 et du 1er janvier 1984 au 12 novembre 1984, date du jugement prononçant leur divorce et l'autre, adressé à son seul nom concernant ses revenus pour la période du 12 novembre 1984 au 31 décembre 1985 ; que, lors de sa première entrevue avec le vérificateur qui a eu lieu le 10 septembre 1986, celui-ci a il est vrai remis à la requérante, pour tenir compte d'une ordonnance judiciaire produite par celle-ci et prononçant la séparation de M. et Mme X dès le 16 janvier 1984 dans l'attente du jugement de divorce, un nouvel avis de vérification daté du même jour précisant que la vérification des revenus de Mme X portait sur l'ensemble des années 1984 et 1985 ; que si Mme X soutient que, pour la période comprise entre le 1er janvier 1984 et le 12 novembre 1984, elle n'a pas été avisée de la vérification dont elle a fait l'objet avant le commencement des opérations de contrôle dans des conditions lui permettant de se faire assister d'un conseil, il est constant que les compléments d'impôt restant en litige ne résultent pas de redressements concernant des revenus perçus au cours de ladite période ; qu'ainsi, à supposer même que cet avis de vérification rectificatif aurait été remis à Mme X dans des conditions irrégulières au regard des dispositions précitées de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, une telle irrégularité ne peut en tout état de cause être utilement invoquée à l'encontre d'impositions qui ne trouvent pas leur origine dans des opérations de contrôle concernant la période comprise entre le 1er janvier 1984 et le 12 novembre 1984 ;

Considérant en revanche qu'il ressort des dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales que l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements et des justifications lorsqu'elle a réuni les éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés et qu'est taxé d'office à l'impôt sur le revenu tout contribuable qui s'est abstenu de répondre aux demandes de justifications de l'administration ; que, par deux lettres successives en date des 22 mai et 28 mai 1987, il a été demandé à Mme X de fournir dans un délai de trente jours des explications concernant l'origine et la nature des crédits figurant sur ses comptes ; qu'au total, ces demandes concernaient environ 80 opérations bancaires ; que la requérante a donné des explications estimées satisfaisantes par l'administration pour une très grande partie de ces opérations ; qu'eu égard au délai de trente jours dans lequel elle était appelée à répondre à ces demandes et au nombre élevé des questions qu'elles comportaient, le fait que, pour le reste, les explications qu'elle a fournies pour l'année 1985 n'étaient pas suffisamment précises, n'était pas de nature à les faire regarder, dans les circonstances de l'espèce, comme un défaut de réponse, au sens de l'article L.16 du livre des procédures fiscales et à justifier, sans demande de justifications complémentaires, le recours immédiat à la procédure de taxation d'office ; que, dès lors, Mme X est fondée à soutenir que les compléments d'impôt sur le revenu auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 1985 dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée pour un montant de 15.000 F ont été irrégulièrement établis selon cette procédure, et que c'est donc à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en décharge de ces impositions ; qu'il y a lieu, dès lors, d'accorder à Mme X la décharge du complément d'impôt sur le revenu pour 1985 demeurant en litige devant la cour et résultant de la taxation d'office d'une somme de 15. 000 F ;

Sur le bien fondé des impositions litigieuses :

En ce qui concerne l'année 1984 :

Considérant que Mme X a déclaré en 1984 une somme de 143 000 F au titre de la pension alimentaire de 13 000 F par mois dont onze mensualités lui ont été versées par son mari dans l'attente du jugement de divorce ; que, par ce jugement, rendu le 9 octobre 1984, le tribunal de grande instance d'Evry lui a accordé une pension alimentaire de 6 500 F par mois, dont elle a perçu la première échéance le 6 décembre 1984 ; que, dans ces circonstances, contrairement à ce que soutient la requérante, ladite somme de 6 500 F, dont l'administration établit qu'elle n'a pas été déclarée, n'a pas été imposée deux fois ;

En ce qui concerne l'année 1985 :

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 12, 13, 83 et 156 du code général des impôts que les sommes à retenir, au titre d'une année déterminée, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires, sont celles qui, au cours de ladite année, ont été mises à la disposition du contribuable, soit par voie de paiement, soit par voie d'inscription à un compte courant, ou, s'agissant d'un dirigeant de société, à un compte de charges à payer ouvert dans les écritures de celle-ci, sur lequel l'intéressé aurait pu, en droit ou en fait, opérer un prélèvement avant le 31 décembre ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a réintégré dans les revenus imposables de Mme X au titre de l 'année 1985 dans la catégorie des traitements et salaires la somme de 61 118,16 F correspondant à sa rémunération pour les mois de juin à septembre 1985 inscrite à son compte dans les écritures de la société Clip'Sun dont elle était le dirigeant et principal actionnaire ; que, pour contester ce chef de redressement, la requérante soutient que ladite somme ne pouvait être réintégrée dès lors qu'elle ne lui a pas été payée en raison des difficultés de trésorerie de la société ; que, toutefois, la circonstance que la SARL Clip'Sun a été mise en règlement judiciaire par un jugement du tribunal de commerce de Pontoise rendu le 6 avril 1987 n'est pas de nature à établir l'impossibilité matérielle dans laquelle se serait trouvée la société de procéder au versement de ladite somme avant le 31 décembre 1985 ; qu'ainsi, Mme X doit être regardée comme ayant volontairement laissé à la disposition de la société Clip'Sun les rémunérations dont s'agit ; que, par suite, c'est à bon droit que Mme X a été imposée sur ladite somme au titre de l'année 1985 ;

En ce qui concerne les années 1986 et 1987 :

Considérant que Mme X a également demandé que soient déduits de ses revenus imposables dans la catégorie des traitements et salaires au titre des années 1986 et 1987, en application des articles 13 et 156-1 du code général des impôts, les versements qu'elle aurait effectués en exécution d'engagements de caution souscrits antérieurement par elle envers la Banque populaire de la région ouest de Paris et l'Union de banques pour l'équipement pour garantir des emprunts contractés en 1985 lors de l'achat du fonds de commerce de la société Clip'Sun ; que, toutefois, si elle a établi la réalité des engagements de caution allégués, Mme X ne justifie pas de la date et de la réalité des versements qu'elle prétend avoir effectués en exécution de ces engagements au cours des deux années d'imposition susmentionnées ; que ni les copies de talons de chèques ni les autres pièces produites par la requérante devant la cour ne suffisent pas à établir que les sommes dont elle demande la déduction et restant en litige auraient été remboursées aux établissements de crédit concernés en exécution de tels engagements ;

Considérant qu'il suit de là, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non- recevoir opposée par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie à sa demande en réduction de l'impôt sur le revenu auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1986, que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes tendant à la décharge des impositions restant en litige qui lui ont été assignées au titre des années 1986 et 1987 ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions susvisées et de condamner l'Etat à payer à Mme X une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : A concurrence de la somme de 56. 128,23 euros et de la somme de 1258,94 euros en ce qui concerne les compléments d'impôt sur le revenu, en droits et pénalités, auxquels Mme X à été assujettie au titre des années 1984 et 1985 et au titre de l'année 1987, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme X.

Article 2 : La base de l'impôt sur le revenu assignée à Mme X au titre de l'année 1985 est réduite d'une somme de 15. 000 F.

Article 3 : Mme X est déchargée des droits et pénalités correspondant à la réduction de base d'imposition définie à l'article 2.

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 21 décembre 1998 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera à Mme X la somme de 2. 000 euros en applications de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X est rejeté.

2

N° 99PA00720

Classement CNIJ : 19-04-01-02-05-02-02

C


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2eme chambre - formation a
Numéro d'arrêt : 99PA00720
Date de la décision : 16/06/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés FARAGO
Rapporteur ?: M. Jean ALFONSI
Rapporteur public ?: M. MAGNARD
Avocat(s) : SCP DUBAULT-BIRI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2004-06-16;99pa00720 ?
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