Vu la requête, enregistrée le 22 décembre 1999 au greffe de la Cour, présentée pour la SOCIETE IMTECH, dont le siège est ..., représentée par son président directeur général en exercice, par Me X..., avocat ; la SOCIETE IMTECH demande à la Cour :
- d'annuler le jugement n° 98 3305 en date du 7 octobre 1999 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande de décharge du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre des années 1991, 1992 et 1993 ;
- de prononcer la décharge de l'imposition contestée ;
- de condamner l'Etat à lui restituer l'imposition payée, assortie des intérêts moratoires prévus à l'article L.208 du livre des procédures fiscales ;
- de condamner l'Etat à lui verser une somme de 20 000 F au titre du décret n° 88-907 du 2 septembre 1988 ;
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Vu le jugement attaqué ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 novembre 2003 :
- le rapport de M. Jardin, premier conseiller,
- les observations de Me X..., avocat, pour la SOCIETE IMTECH ,
- et les conclusions de Mme Escaut, commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions à fin de décharge de l'imposition litigieuse :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 44 sexies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux faits de la cause, issue de l'article 14-A de la loi du 23 décembre 1988 : Les entreprises créées à compter du 1er octobre 1988 (...) qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l'article 3 sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés jusqu'au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création et déclarés (...). Ces dispositions ne s'appliquent pas aux entreprises qui exercent une activité bancaire, financière, d'assurances, de gestion ou de location d'immeubles (...) ; qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires auxquels elles ont donné lieu, que le législateur n'a entendu exclure du champ de l'exonération les entreprises nouvelles dont les bénéfices proviennent en partie d'activités bancaires, financières, d'assurances, de gestion ou de location d'immeubles ou de toute activité d'une autre nature qu'industrielle, commerciale ou artisanale, que dans la mesure où ces activités ne constituent pas le complément indissociable d'une activité exonérée ; qu'en particulier, ne demeurent exonérés les bénéfices d'une entreprise nouvelle qui perçoit des produits financiers tout en exerçant, à titre principal, une ou plusieurs activités entrant dans le champ de l'exonération, qu'à la condition que ces produits résultent exclusivement de la gestion de la trésorerie courante nécessaire à l'exercice de cette activité ;
Considérant que la SOCIETE IMTECH, alors qu'elle était en cours de création, a constitué le 16 juillet 1990 avec l'Institut Gustave Roussy, centre anti cancéreux, une société en participation dénommée Dosigray qui commercialise auprès des établissements de santé des consoles d'établissement de plans de traitement pour la radiothérapie utilisant un logiciel mis au point par l'Institut Gustave Roussy ; que la SOCIETE IMTECH assure la gestion de la société en participation, qui représente également son unique client, auquel elle revend le matériel informatique nécessaire à son activité après l'avoir choisi et acheté ; qu'eu égard à la nature des liens qui les unissent, les revenus de la SOCIETE IMTECH correspondant à sa quote-part des bénéfices de l'activité de la société en participation ne peuvent être regardés comme des produits financiers révélant l'exercice d'une activité financière, pour l'application de l'article 44 sexies du code général des impôts, ainsi que l'admet d'ailleurs le ministre en appel ;
Considérant que si le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie invoque par ailleurs l'existence de nombreux achats et cessions de valeurs mobilières, dont le montant cumulé représente 6 042 321 F en 1991, 10 413 760 F en 1992 et 22 318 475 F en 1993, ces chiffres, à eux-seuls, et en l'absence de toute précision sur la fréquence et la valeur des transactions, ne permettent pas d'évaluer le portefeuille de valeurs mobilières détenues par la SOCIETE IMTECH ; que, d'autre part, les gains de cessions de valeurs mobilières réalisés par la SOCIETE IMTECH, qui s'élèvent à 55 779 F en 1991, 364 299 F en 1992 et 479 946 F en 1993 ne constituent qu'une fraction limitée des bénéfices de la société d'un montant de 3 566 188 F en 1991, 3 3351 720 F en 1992 et 5 046 400 F en 1993 ; que, dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que la SOCIETE IMTECH a perçu des produits financiers excédant ceux qui seraient résultés du seul placement de la trésorerie courante nécessaire à l'exercice de l'activité au titre de laquelle elle a sollicité l'exonération d'impôt sur les sociétés prévue à l'article 44 sexies du code général des impôts ;
Considérant que si le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie fait valoir en appel que la SOCIETE IMTECH a été créée dans le cadre de l'extension d'activités préexistantes, ce qui l'exclut, en vertu du III de l'article 44 sexies du code général des impôts, du champ d'application de l'exonération d'impôt sur les sociétés prévue par ce texte, ce moyen de défense ne peut qu'être écarté dès lors que l'Institut Gustave Roussy n'avait avant la création de la société en participation aucune activité de la nature de celle exercée par cette dernière ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que c'est à tort que l'administration a remis en cause le régime fiscal de faveur sous lequel s'était placée la SOCIETE IMTECH en application de l'article 44 sexies du code général des impôts ; que la SOCIETE IMTECH est dès lors fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande de décharge du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre des années 1991, 1992 et 1993 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.208 du livre des procédures fiscales :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L.208 et de l'article R.208-1 du livre des procédures fiscales, lorsque qu'une juridiction prononce un dégrèvement d'impôt, le comptable chargé du recouvrement de l'impôt doit rembourser au contribuable les sommes perçues à tort par l'Etat et lui payer d'office en même temps des intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt légal ; que toutefois, à la date du présent arrêt, il n'existe aucun litige né et actuel entre la SOCIETE IMTECH et le comptable chargé du recouvrement quant au remboursement des sommes perçues à tort par l'Etat et au paiement des intérêts moratoires ; que les conclusions de la SOCIETE IMTECH tendant à l'application de l'article L.208 du livre des procédures fiscales ne peuvent dès lors qu'être rejetées comme irrecevables ;
Sur les conclusions de SOCIÉTÉ IMTECH tendant à l'application des dispositions du décret n° 88-907 du 2 septembre 1988 :
Considérant que ces conclusions doivent être regardées comme tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de condamner l'Etat à payer à la SOCIETE IMTECH la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 98 3305 en date du 7 octobre 1999 du tribunal administratif de MELUN est annulé.
Article 2 : La SOCIETE IMTECH est déchargée du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre des années 1991, 1992 et 1993.
Article 3 : L'Etat paiera la somme de 3 000 euros à la SOCIETE IMTECH au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE IMTECH est rejeté.
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N° 99PA04218