(3ème chambre B)
VU le mémoire, enregistré au greffe de la cour le 18 juillet 1997, présenté pour Mme Z..., par Me X..., avocat ; Mme Z... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9607308/7 du tribunal administratif de Paris en date du 28 mai 1997 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande d'indemnité en date du 27 octobre 1995 tendant à réparer le préjudice occasionné par un receveur-percepteur de la comptabilité publique ;
2 ) de condamner l'Etat à lui verser une somme de deux millions de francs assortie des intérêts de droit ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n°87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 février 2000 :
- le rapport de M. GAYET, premier conseiller,
- les observations de Me X..., avocat, pour Mme Z...,
- et les conclusions de M. LAURENT, commissaire du Gouvernement ;
Considérant qu'il est constant que M. Y..., receveur-percepteur a détourné à Beaumont-le-Roger du 28 novembre 1985 au mois de décembre 1991, au préjudice de trente deux personnes des sommes d'un montant de 8 millions de francs dont 1.480.000 F au détriment de Mme Z... ; que M. Y... se faisait remettre ces sommes, soit en espèces, soit sous forme de chèques qu'il faisait établir par ses victimes sans ordre ou à un ordre qu'il transformait ;
Sur la responsabilité de l'Etat :
Considérant qu'il ressort des constatations de faits opérés par le juge pénal, que M. Y... s'est servi de sa fonction de receveur-percepteur pour mettre en confiance ses victimes, la plupart de ces méfaits ayant été commis par M. Y... dans les bureaux des recettes-perceptions où il exerçait ses fonctions de comptable public, en sorte que son appartenance à l'administration du Trésor public a contribué à lui permettre de poursuivre ses activités criminelles pendant une période prolongée ; que, dans ces conditions, la faute, alors même qu'elle a été commise en dehors des écritures de la comptabilité publique et se trouve détachable du service, n'est pas dépourvue de liens avec le service et engage la responsabilité de l'Etat ;
Considérant, toutefois, qu'il appartenait à Mme Z... eu égard à l'importance des sommes qu'elle confiait à M. Y... d'exiger des reçus pour les sommes qu'elle déposait en espèces ou de libeller nominalement les chèques qu'elle remettait à M. Y... ; qu'en s'abstenant de le faire, Mme Z... a commis une imprudence de nature à atténuer la responsabilité de l'Etat ; qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'affaire en mettant à la charge de l'Etat le quart des conséquences dommageables pour Mme Z... ;
Sur le préjudice :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le montant des sommes possédées par Mme Z... et détournées par M. Y..., comme il a été dit s'élève à 1.480.000 F ; que compte tenu du partage de responsabilité susmentionné, l'Etat doit être condamné à verser, à Mme Z..., une somme de 370.000 F ;
Sur la subrogation :
Considérant qu'il y a lieu de subordonner le versement de l'indemnité allouée par la présente décision à la subrogation de l'Etat dans les droits que détiendrait Mme Z... sur M. Y... ;
Sur les intérêts :
Considérant que la somme de 370.000 F portera, conformément à la demande du requérant, intérêts au taux légal à compter du 27 octobre 1995 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme Z... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Article 1er : Le jugement n 9607308/7 du tribunal administratif de Paris en date du 28 mai 1997 est annulé.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à Mme Z... la somme de 370.000 F. Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 27 octobre 1995.
Article 3 : Le paiement des sommes allouées par la présente décision est subordonné à la subrogation de l'Etat à concurrence de leur montant.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme Z... est rejeté.