VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 10 février 1995, présentée pour Mme Y... demeurant ... par Me X..., avocat ; elle demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 7 juin 1994 rejetant sa demande tendant à déclarer l'Etat responsable du préjudice que lui ont causé les dispositions de l'article 8 de la loi n° 89-906 du 19 décembre, qui ont eu pour effet de supprimer les bourses communes de résidence des commissaires-priseurs
2°) et de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 113.138,10 F assortie des intérêts légaux ainsi qu'une somme de 20.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU l'ordonnance n° 45-2593 du 2 novembre 1945 ;
VU la loi n° 89-906 du 19 décembre 1989 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 mars 1996 :
- le rapport de Mme HEERS, conseiller,
- les observations de Me X..., avocat, pour Mme Y...,
- et les conclusions de Mme BRIN, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que Mme Y... demande réparation du préjudice résultant pour elle de la suppression par l'article 8 de la loi susvisée du 19 décembre 1989 de l'institution des bourses communes de résidence des commissaires-priseurs ; qu'elle fait valoir que la prise en compte des revenus provenant de la bourse dans la détermination de la valeur des parts sociales qu'elle a acquises en 1987 dans le capital d'une société civile professionnelle titulaire d'un office a eu pour conséquence de surévaluer ces parts par rapport à leur valeur patrimoniale réelle ; qu'elle expose qu'elle a subi de ce fait une perte en capital dans la mesure où cette acquisition est intervenue peu de temps avant cette réforme législative brutale, intervenue sans concertation avec les professionnels concernés et que ce préjudice présente un caractère spécial et anormalement grave ; qu'elle recherche la responsabilité sans faute de l'Etat du fait des lois sur le fondement de la rupture de l'égalité devant la loi des membres d'une même profession ;
Considérant que si la loi du 18 juin 1843 prévoyait que les fonds recueillis par les bourses étaient destinés principalement à garantir le paiement des produits des ventes, il est constant que cet objectif a perdu sa raison d'être depuis l'intervention de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 qui a institué des bourses spécifiques de garantie entre les membres de la profession ; que s'agissant de l'autre objectif poursuivi par la loi susvisée, à savoir la répartition des sommes restant disponibles entre les commissaires-priseurs d'une même résidence, il présentait l'avantage de permettre une compensation de la prise en charge des activités d'intérêt général moins rentables par certains d'entre eux mais se révélait constituer à terme un frein à la croissance et à l'investissement pour les commissaires-priseurs désireux de développer leur office ; qu'il ressort en particulier des travaux préparatoires de l'article 8 de la loi du 19 décembre 1989 que le législateur a entendu créer pour la profession un cadre juridique lui permettant de procéder à une modernisation nécessaire et de se préparer dans des conditions optimales à l'ouverture à la concurrence internationale et qu'il n'a pas entendu accompagner cette mesure d'un régime d'indemnisation spécifique ; qu'eu égard à l'objet de la disposition législative contestée et à l'objectif d'intérêt général prééminent ainsi poursuivi par le législateur et -non seulement, contrairement à ce que soutient Mme Y... d'intérêt d'une profession, voire de certains de ses membres- la responsabilité de l'Etat ne saurait être engagée sur le fondement de la rupture de l'égalité entre les citoyens ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme Y... dont le préjudice au demeurant ne saurait être regardé comme anormalement grave, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 113.138,10 F en réparation dudit préjudice ; que sa requête doit, par suite, être rejetée ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que Mme Y..., partie perdante, n'est pas fondée à demander l'application à son profit des dispositions susvisées ;
Article 1er : La requête de Mme Y... est rejetée.