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05/10/1995 | FRANCE | N°94PA00429

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3e chambre, 05 octobre 1995, 94PA00429


Vu la requête présentée par la société anonyme BANQUE SUDAMERIS dont le siège social est ... ; elle a été enregistrée le 12 avril 1994 au greffe de la cour administrative d'appel ; la société BANQUE SUDAMERIS demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 8901078/2 et 8901218/2 en date du 2 juin 1993 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 1984 ainsi que les pénalités y afférentes et à la réduction des cotisations de

taxe sur les salaires dues au titre des années 1982, 1983 et 1984 ;
2°) de ...

Vu la requête présentée par la société anonyme BANQUE SUDAMERIS dont le siège social est ... ; elle a été enregistrée le 12 avril 1994 au greffe de la cour administrative d'appel ; la société BANQUE SUDAMERIS demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 8901078/2 et 8901218/2 en date du 2 juin 1993 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 1984 ainsi que les pénalités y afférentes et à la réduction des cotisations de taxe sur les salaires dues au titre des années 1982, 1983 et 1984 ;
2°) de lui accorder les décharges ou réduction sollicitées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code générai des impôts ;
Vu la loi n° 93-1353 du 30 décembre 1993 portant loi de finances rectificative pour 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 septembre 1995 :
- le rapport de Mme MARTIN, conseiller,
- et les conclusions de Mme MARTEL, commissaire du Gouvernement ;

Sur le prorata de déduction de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 1984 :
En ce qui concerne les éléments du prorata :
Sur le terrain de la loi fiscale :
Considérant qu'aux termes de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts dans sa rédaction issue du décret du 29 décembre 1979 : "Les assujettis qui ne réalisent pas exclusivement des opérations ouvrant droit à déduction sont autorisés à déduire une fraction de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les biens constituant des immobilisations égale au montant de cette taxe multipliée par le rapport existant entre le montant annuel des recettes afférentes à des opérations ouvrant droit à déduction et le montant annuel des recettes afférentes à l'ensemble des opérations réalisées" ; que ces dispositions, prises pour l'adaptation de la réglementation nationale à la directive n° 77/388/CEE du 17 mai 1977, dont l'article 19 paragraphe 1 prévoit que le prorata de déduction résulte "d'une fraction comportant - au numérateur, le montant total déterminé par année du chiffre d'affaires, taxe sur la valeur ajoutée exclue, afférent aux opérations ouvrant droit à déduction conformément à l'article 17 paragraphes 2 et 3, - au dénominateur, le montant total déterminé par année du chiffre d'affaires, taxe sur la valeur ajoutée exclue, afférent aux opérations figurant au numérateur ainsi qu'aux opérations qui n'ouvrent pas droit à déduction", doivent être interprétées en ce sens que le terme "opérations" ne concerne que les activités situées dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant que la BANQUE SUDAMERIS a porté au numérateur et au dénominateur, de la fraction servant au calcul de son pourcentage définitif de déduction de l'année 1983, déterminé en mars 1984, les intérêts de prêts perçus auprès de ses succursales d'Amérique latine ; que les intéréts de prêts perçus d'une succursale sont des mouvements de fonds en provenance d'une succursale à destination du siège qui constitue avec elle une même personne morale ; qu'en pareil cas, le fait générateur de l'impôt fait défaut dès lors qu'il ne s'agit pas de sommes versées par un tiers en contrepartie de services qui seraient rendus ; que, par suite, ces recettes sont placées hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée et doivent être exclues du dénominateur comme du numérateur de la fraction servant au calcul du prorata de déduction ; qu'en conséquence, les dispositions de l'article 271-4-b du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur, et qui - se rapportent à des opérations exonérées ouvrant droit à déduction, ne sont pas applicables en l'espèce ; qu'il résulte de ce qui précède que c'est par une exacte application de la loi fiscale que l'administration a exclu les intérêts perçus par la requérante des termes du rapport servant à déterminer le prorata de déduction et ramené celui-ci, pour l'année 1983, de 33 % à 31 % ;
Sur le terrain de l'interprétation administrative :

Considérant, en premier lieu, que la BANQUE SUDAMERIS, au soutien de sa thèse tendant à voir incluses les sommes litigieuses dans les termes du rapport en tant qu'elles correspondraient à des opérations exonérées ouvrant droit à déduction, invoque l'instruction du 18 février 1991 publiée au BODGI sous le n° 3 D 81, aux termes de laquelle, pour le calcul du prorata, "il n'y a pas lieu de prendre en compte les recettes suivantes : ... - les recettes relatives aux opérations financières exonérées en vertu de l'article 261 C du code général des impôts (intérêts de prêts, produite de portefeuille, dividendes, jetons de présence) lorsque leur montant n'excède pas 5 % des recette totale de l'entreprise, toutes taxes comprises..." ; qu'elle fait valoir que, dès lors que le montant des sommes litigieuses excède le seuil de 5 %, elles devraient être prises en compte dans le prorata ; que, toutefois, il est constant que la partie invoquée de la circulaire s'insère dans les "cas d'application du régime des secteurs distincts ... Activités financières accessoires" ; que les activités financières constituant l'essentiel de l'activité de la banque, ceux-ci ne saurait se prévaloir des dispositions susmentionnées qui prévoient d'ailleurs, "lorsque le montant excède 5 %, il est admis de considérer les opérations financières en cause comme relevant d'un secteur distinct d'activité sous réserve que l'entreprise se soumette à l'ensemble des obligations résultant de la constitution de secteurs distincts" ; que si la requérante invoque l'instruction du 31 janvier 1979 publiée au BODGI Bous le n° 13 L-1-79 p. 14, celle-ci ne s'applique pas au cas d'espèce et ne comporte pas de prise de position formelle dans la citation qu'elle en fait dans ses écritures ;
Considérant, en second lieu, que si la société invoque une réponse ministérielle à M. X..., député, publi ée au Journal officiel des débats du 21 octobre 1979, p. 8680 n° 17054, celle-ci n'était plus en vigueur à compter du 4 avril 1983, date d'une instruction publiée au BODGI sous le numéro 3.D.683 ;
Sur les autres moyens :
Considérant, enfin, que le moyen tiré de ce que le vérificateur aurait réintégré, dans le cadre de redressements opérés en matière d'impôt sur les sociétés des intérêts non réclamés à une succursale de Miami est sans influence sur un litige en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; que le moyen tiré d'un manque d'équité du fait du traitement différent d'opérations réalisées par le siège avec ses propres succursales de celles effectuées avec des tiers est, en tout état de cause, inopérant ;
En ce qui concerne le pourcentage provisoire de déduction pour 1984 :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 214 de l'annexe II au code général des impôts : "Le rapport prévu à l'article 212 est déterminé provisoirement en fonction des recettes réalisées l'année précédente ou des recettes prévisionnelles de l'année en cours. Le montant des taxes déductibles est définitivement arrêté avant le 25 avril de l'année suivante" ; que ces dispositions, prises pour l'adaptation de la réglementation nationale à la directive n° 77/388/CEE du 17 mai 1977, dont l'article 19 paragraphe 3 prévoit que "la prorata provisoirement applicable pour une année est celui calculé sur la base des opérations de l'année précédente, Lorsqu'une telle référence fait défaut ou n'est pas significative, le prorata est estimé provisoirement sous contrôle de l'administration, par l'assujetti, d'après ses prévisions", doivent être interprétées en ce sens que la possibilité de se référer aux recettes prévisionnelles de l'année en cours n'est ouverte aux redevables qu'en cas de changement de leur situation au regard de la taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant que la requérante a déterminé son prorata provisoire pour 1984 en fonction des recettes prévisionnelles de cette même année ; qu'il n'a été constaté aucun changement dans sa situation à l'occasion de la vérification de comptabilité ; que la BANQUE SUDAMERIS n'a d'ailleurs invoqué aucun changement de situation lors du choix du calcul du prorata prévisionnel ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a retenu pour le calcul du prorata de l'année 1984 le prorata de 31 % tel qu'il résulte de l'application de l'article 212 de l'annexa II au code ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la BANQUE SUDAMERIS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions relatives à la taxe sur la valeur ajoutée ; sur la taxe sur les salaires due au titre des années 1982, 1983 et 1984 :
Considérant, ainsi que le fait valoir à bon droit la société requérante, que la tribunal administratif a omis de répondre à sa demande tendant à la réduction de ses cotisations de taxe sur les salaires dues au titre dos années 1982, 1983 et 1984 ; qu'il y a lieu, dans cette mesure, d'annuler le jugement, d'évoquer et de statuer sur les conclusions de la demande ;

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 231 du code général des impôts, l'assiette de la taxe sur les salaires due par les entreprises partiellement assujetties à le taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année civile précédant celle du paiement des rémun6rations "est constituée par une partie des rémunérations versées déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et la chiffre d'affaires total" ; qu'aux termes de l'article 18 de la loi de finances rectificative pour 1993 : "1. Le premier alinéa du 1 de l'article 231 du code général des impôts est complété par deux phrases ainsi rédigées : "Le chiffre d'affaires qui n'a pas été assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée en totalité ou sur 90 % au moins de son montant, ainsi que le chiffre d'affaires total mentionné au dénominateur du rapport s'entendent du total des recettes et autres produits, y compris ceux correspondant à des opérations qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée mentionné au numérateur du rapport s'entend du total des recettes et autres produits qui n'ont pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée," II. - Les dispositions du I ont un caractère interprétatif et s'appliquent aux instances en cours sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour déterminer la partie des rémunérations servant d'assiette à la taxe sur les salaires due par elle au titre des années 1982, 1983 et 1984, la société requérante a exclu du numérateur et inclus au dénominateur du rapport les revenus que lui ont procurés, au cours des années civiles précédentes, les titres de participation de ses filiales situées en dehors de la communauté économique européenne ; que, pour demander la restitution d'une partie de la taxe versée par elle sur cette base, elle soutient que les intérêts en cause devaient figurer au numérateur comme au dénominateur ;
Considérant que la perception de dividendes résultant de la détention par une entreprise de participations financières dans d'autres entreprises n'entre pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'il résulte des dispositions précitées, à caractère interprétatif, du 1 de l'article 231 du code général des impôts que les sommes en cause devaient figurer au dénominateur et également au numérateur du rapport ;
Considérant qu'ii résulte de ce qui précéde que la BANQUE SUDAMERIS est fondée à soutenir que le montant de la taxe professionnelle dont elle est redevable au titre des années 1982, 1983 et 1984 soit déterminé en incluant, au numérateur du rapport servant au calcul de la taxe le montant des dividendes perçus par elle à raison des titres de participation de sas filiales situées en dehors de la Communauté économique européenne ;
Article 1er : Le jugement n° 8901078/2 - 8901218/2 du tribunal administratif de Paris en date du 2 juin 1993 est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions de la société BANQUE SUDAMERIS relatives à la taxe sur les salaires.
Article 2 : Les dividendes des titres de participation provenant des filiales de la BANQUE SUDAMERIS établies en dehors de la communauté économique européenne sont compris dans le numérateur du rapport servant au calcul de la taxe sur les salaires due par ladite banque au titre des années 1982, 1983 et 1984.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société BANQUE SUDAMERIS est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 94PA00429
Date de la décision : 05/10/1995
Sens de l'arrêt : Annulation partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS ASSIS SUR LES SALAIRES OU LES HONORAIRES VERSES - VERSEMENT FORFAITAIRE DE 5 % SUR LES SALAIRES ET TAXE SUR LES SALAIRES - Calcul de l'assiette de la taxe sur les salaires due par les entreprises partiellement assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée (article 231-1 du code général des impôts).

19-05-01 Pour le calcul de la taxe sur les salaires due par les entreprises partiellement assujetties le rapport prévu à l'article 231-1 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 93-1353 du 30 décembre 1993, dont les dispositions ont un caractère interprétatif, doit comprendre tant au numérateur qu'au dénominateur les recettes qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée.

- RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE - PERSONNES ET OPERATIONS TAXABLES - OPERATIONS TAXABLES - Absence - Intérêts de prêts d'une société à ses succursales (1).

19-06-02-01-01 Les intérêts de prêts consentis par le siège d'une société française à ses succursales ne sont pas passibles de la taxe sur la valeur ajoutée (1).

CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE - LIQUIDATION DE LA TAXE - DEDUCTIONS - CAS DES ENTREPRISES QUI N'ACQUITTENT PAS LA TVA SUR LA TOTALITE DE LEURS AFFAIRES - Calcul du prorata de déduction de la taxe - Opérations entrant dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée (article 212 de l'annexe II au code général des impôts) - Exclusion des intérêts de prêt versés au siège d'une société par ses succursales.

19-06-02-08-03-03, 19-06-02-09 Les dispositions de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts, dans sa rédaction issue du décret n° 79-1163 du 29 décembre 1979, prises pour l'adaptation de la réglementation nationale à la directive n° 77/388/CEE du 17 mai 1977 dont l'article 19 paragraphe 1 définit les modalités de calcul du prorata de déduction, doivent être interprétées comme ne visant que les recettes situées dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, qu'elles soient taxables ou exonérées. Par suite, sont exclus du dénominateur comme du numérateur de la fraction servant au calcul de ce prorata, les intérêts de prêts perçus par la requérante de ses succursales situées dans un Etat non membre de la Communauté économique européenne, lesquels n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE - CALCUL DE LA TAXE - Cas des entreprises qui n'acquittent pas la taxe sur la valeur ajoutée sur la totalité de leurs affaires - Calcul du prorata de déduction (article 212 de l'annexe II au code général des impôts).


Références :

CEE Directive 388-77 du 17 mai 1977 Conseil Sixième Directive art. 19, art. 17
CGI 271, 231
CGIAN2 212, 214
Décret 79-1163 du 29 décembre 1979
Instruction 13L-1-79 du 31 janvier 1979
Instruction 3D-6-83 du 04 août 1983
Instruction 3D-81 du 18 février 1981
Loi 93-1353 du 30 décembre 1993 art. 18 Finances rectificative pour 1993

1.

Rappr. CE, Plénière, 1981-01-09, Société Timex Corporation, p. 8


Composition du Tribunal
Président : M. Rivière
Rapporteur ?: Mme Martin
Rapporteur public ?: Mme Martel

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1995-10-05;94pa00429 ?
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