VU la requête, enregistrée au greffe de la cour, le 8 mars 1993, présentée pour la société à responsabilité limitée BURETEC dont le siège social est, ..., représentée par son gérant en exercice, par Me LAURENT de X... SOJURIS, avocat à la cour ; la société à responsabilité limitée BURETEC demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du 21 mai 1992 par lequel le tribunal administratif de Paris ne lui a accordé qu'une décharge partielle du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre des années 1978, 1979, 1980, 1981 et 1982, dans les rôles de la ville de Paris, sur les bénéfices des exercices clos les 30 septembre 1978, 1979, 1980, 1981 et 1982 ;
2°) de lui accorder la décharge de l'imposition restant en litige et des pénalités dont elle a été assortie, ainsi que la prorogation du sursis de paiement ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le livre des procédures fiscales ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 juin 1994 :
- le rapport de Mme MARTEL, conseiller,
- et les conclusions de Mme de SEGONZAC, commissaire du Gouvernement ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par décision en date du 23 février 1994, postérieure à l'introduction de la requête, le chef des services fiscaux de Paris-Nord a prononcé un dégrèvement en droits et pénalités, à concurrence des sommes respectives de 209.337 F, 40.916 F et 53.180 F, des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels la société BURETEC a été assujettie au titre des années 1980, 1981 et 1982 ; que les conclusions de la requête de la société BURETEC relatives à ces impositions et en particulier celles relatives aux pénalités auxquelles le service a substitué l'intérêt de retard sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur les impositions restant en litige :
Considérant que la société BURETEC, bureau d'études techniques et financières, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, portant en matière d'impôt sur les sociétés sur les exercices clos le 30 septembre des années 1978 à 1982 ; que par notification en date du 8 juillet 1983, la société a fait l'objet de redressements, le vérificateur rapportant notamment aux résultats des différents exercices, d'une part, le montant d'honoraires versés à une tierce société et, d'autre part, le montant de commissions versées à un intermédiaire ; que des compléments d'impôt sur les société ont été mis en recouvrement le 31 décembre 1987, malgré l'avis contraire de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires en ce qui concerne les honoraires susmentionnés et la partie des commissions versées en contrepartie d'une mission de représentation de la société BURETEC au Nigéria ; que, par jugement en date du 21 mai 1992, le tribunal administratif de Paris a accordé à la société BURETEC la décharge des impositions procédant de la réintégration des honoraires versés à la tierce société ; que, dans le dernier état de la procédure la société BURETEC conteste en appel l'ensemble des impositions et les pénalités résultant de la réintégration dans ses résultats des commissions versées ;
Sur la procédure d'imposition et la charge de la preuve :
Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions du livre des procédures fiscales relatives aux opérations de vérification de comptabilité que celles-ci se déroulent chez le contribuable ou au siège de l'entreprise vérifiée ; que si, sur la demande écrite du contribuable, le vérificateur peut emporter certains documents dans les locaux de l'administration qui en devient ainsi dépositaire, et ce après avoir remis à l'intéressé un reçu détaillé, cette pratique ne doit pas avoir pour effet de priver le contribuable des garanties qu'il tient des article L.47 à L.52 du livre des procédures fiscales et qui ont notamment pour objet de lui assurer, sur place, des possibilités de débat oral et contradictoire ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, que dans son courrier en date du 5 août 1993, en réponse à la notification de redressements la société BURETEC a fait valoir, qu'au cours de la vérification de comptabilité effectuée dans ses bureaux, elle avait établi la sincérité des rapports contractuels noués avec les entreprises auxquelles elle versait des honoraires ou commissions ; que, dans ces conditions, la société ne peut plus utilement soutenir devant la cour que les opérations de vérification ne se seraient pas déroulées dans ses locaux et que le vérificateur n'aurait pas été suffisamment présent sur place pour qu'un débat oral et contradictoire puisse être engagé ; que l'emport, même en grand nombre, de photocopies de documents comptables, n'a, ainsi, en l'espèce, pas privé le contribuable du dialogue prescrit par les dispositions susmentionnées du livre des procédures fiscales ; que, par suite la société BURETEC n'est pas fondée à soutenir que la procédure d'imposition était entachée d'irrégularité ;
Considérant enfin que le litige ayant été soumis à la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires le 15 octobre 1987, l'administration supporte, en vertu des dispositions de l'article L.192 du livre des procédures fiscales dans la rédaction que lui a donnée l'article 10-I de la loi n° 87-502 du 8 juillet 1987 la charge de la preuve, quel que soit l'avis rendu par la commission ; que, toutefois, lorsque le différend entre l'administration et le contribuable porte, comme en l'espèce, sur le caractère de charges déductibles du résultat imposable de dépenses effectuées par le contribuable, ce dernier conserve, quelle que soit la dévolution de la preuve résultant des règles de procédure, l'obligation de justifier le principe et le montant de la charge qu'il entend déduire de ses résultats ; qu'en revanche, l'intervention de la commission départementale des impôts a pour effet, de mettre à la charge de l'administration la preuve, qu'en réalité, la dépense litigieuse n'a pas été exposée dans l'intérêt de l'activité imposable ;
Sur les commissions versées :
Considérant, en premier lieu, que la société produit un contrat conclu avec un intermédiaire et aux termes duquel, ce dernier assurait la représentation de la société au Nigéria ; qu'il n'est pas contesté que ledit intermédiaire occupait des fonctions au Nigéria lui permettant de remplir les fonctions de recherche de contrats que lui confiait la société BURETEC ; qu'enfin la société produit quelques courriers et notamment une lettre du 3 décembre 1982 attestant de démarches effectuées dans le cadre de l'éxécution du contrat ; qu'ainsi la société BURETEC justifie le principe des charges résultant de ce contrat ; qu'en se bornant à soutenir que cette collaboration ne s'est traduit par la signature d'aucun marché en faveur de la société BURETEC, l'administration n'établit pas l'absence de travail effectif de son intermédiaire au Nigéria ; qu'il suit de là, que la société est fondée à demander la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés procédant de la réintégration dans ses bénéfices imposables des commissions versées à son intermédiaire du fait de l'accord de représentation passé avec la société pour le Nigéria ;
Considérant, en deuxième lieu, que la société requérante soutient que les autres sommes versées au même intermédiaire rémunèrent l'intervention de celui-ci dans le cadre de l'aboutissement d'un contrat de vente à un établissement public de bureaux sis à la Défense ;
Considérant que la société requérante sans produire aucun contrat se borne à verser au dossier une lettre du 28 juillet 1978 signée de son gérant et adressée à la société gérante d'une société civile immobilière, indiquant que le même intermédiaire a interrogé les services d'un établissement public qui sont disposés à rencontrer la société venderesse pour fixer les modalités d'une option d'achat de l'immeuble de bureaux sis à la Défense ; que, ni une autre lettre en date du 26 septembre 1978 relative au montant de ses honoraires, ni la note d'honoraires pour un montant de 1.537.134 F en date du 14 mars 1980, n'apportent la preuve du principe et du montant des engagements pris par la société BURETEC envers ledit intermédiaire de nature à générer des charges pour l'entreprise ; qu'en conséquence l'administration doit être regardée comme apportant la preuve du bien-fondé de son redressement ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le tribunal a rejeté sa demande tendant à être déchargée des compléments d'impôts sur les sociétés résultant de la réintégration dans ses résultats des sommes versées à son intermédiaire pour ses interventions au Nigéria ;
Article 1er : A concurrence des sommes respectives de 209.337 F, 40.916 F et 53.180 F, en ce qui concerne les compléments d'impôt sur les sociétés auxquels la société BURETEC a été assujettie au titre des années 1980, 1981 et 1982, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société BURETEC.
Article 2 : La société BURETEC est déchargée des compléments d'impôt résultant de la réintégration dans ses bénéfices imposables des charges afférentes à des honoraires versés à l'intermédiaire qui la représentait au Nigéria au cours des exercices 1979 à 1982.
Article 3 : Le jugement en date du 21 mai 1992 du tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions est rejeté.