Vu I) enregistrée le 17 mai 1990 sous le n° 90PA00463, la requête présentée pour M. Alain X... demeurant ... et Cuire, par Me RIVA, avocat à la cour ; M. X... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 89-2141 en date du 27 mars 1990 par lequel le tribunal administratif de Papeete a rejeté comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser l'allocation pour jeune enfant ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser cette allocation, multipliée par le coefficient de majoration de 1,84 pour la période du 1er janvier 1988 au 3 août 1989, puis au taux nominal à compter du 4 août 1989, ainsi que les intérêts moratoires à compter du 27 avril 1989 ;
Vu II) enregistrée le 26 juin 1990 sous le n° 90PA00576, la requête présentée pour Mme Danielle Y..., dont l'adresse est ..., par la SCP Riche, Blondel, Thomas-Raquin, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; Mme Y... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 90-00086 en date du 15 mai 1990 par lequel le tribunal administratif de Papeete a rejeté comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser l'allocation pour jeune enfant ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser cette allocation, ainsi que les intérêts à compter du 12 janvier 1990 ; Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi du 30 juin 1950 ;
Vu le décret n° 67-600 du 23 juillet 1967 relatif au régime de rémunération des magistrats et des fonctionnaires de l'Etat en service dans les territoires d'outre-mer ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 20 juin 1991 :
- le rapport de M. Brotons, conseiller,
- et les conclusions de M. Loloum, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;
Sur la compétence de la juridiction administrative :
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 5 de la loi du 30 juin 1950 et de celles de l'article 5 du décret du 23 juillet 1967 que les avantages dont bénéficient, en matière de prestations familiales, les fonctionnaires de l'Etat en service dans les territoires d'outre-mer leur sont attribués en application de leur statut ; que par suite le juge administratif est compétent pour statuer sur les litiges nés du refus de l'octroi de tels avantages, sans qu'en tout état de cause puissent trouver application les dispositions de l'article L.142-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction alors en vigueur ; que c'est par suite à tort que le tribunal administratif de Papeete s'est déclaré incompétent pour connaître des requêtes dont l'avaient saisi M. X... et Mme Y... ;
Sur la compétence de la cour administrative d'appel :
Considérant que les demandes formées par M. X... et Mme Y... devant le tribunal administratif de Papeete tendaient à l'annulation des décisions par lesquelles le Haut-Commissaire de la République en Polynésie française leur a refusé le bénéfice de l'allocation pour jeune enfant ; qu'en demandant la condamnation de l'Etat à leur verser cette allocation, les intéressés ont donné à l'ensemble de leurs demandes le caractère de demandes de plein contentieux ;
Considérant que les appels formés contre les jugements par lequel le tribunal administratif de Papeete a rejeté ces demandes revêtent nécessairement le même caractère et relèvent, en vertu des dispositions de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1987, de la compétence de la cour administrative d'appel ;
Au fond :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les jugements attaqués doivent être annulés ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par M. X... et par Mme Y... devant le tribunal administratif de Papeete ;
Considérant qu'aux termes de l'article 5 du décret du 23 juillet 1967 relatif au régime de rémunération des magistrats et des fonctionnaires de l'Etat en service dans les territoires d'outre-mer : "Le régime des prestations familiales auquel les magistrats et fonctionnaires ... sont soumis est celui en vigueur dans le territoire de service. Toutefois, lorsque les intéressés proviendront de la métropole, d'un département ou d'un territoire d'outre-mer où ils résident habituellement et où ils auraient vocation à bénéficier d'un régime d'allocations plus favorable, ils recevront à titre personnel les prestations pour charges de famille prévues par ce régime. Ceux provenant de la métropole recevront à titre personnel les prestations pour charges de famille qu'ils percevraient s'ils étaient en service à Paris" ;
Considérant que ces dispositions, qui ne se réfèrent pas expressément à la détermination d'un plafond de ressources à prendre en compte, ont pour objet et pour effet de conférer aux fonctionnaires en provenance de la métropole, soit directement, soit après avoir servi dans une autre collectivité d'outre-mer, le droit au bénéfice, aux taux applicables à Paris, de prestations qui ne sont pas attribuées dans le territoire d'affectation ; qu'elles n'ont pas pour effet de faire exception, pour ces fonctionnaires, aux dispositions législatives codifiées aux articles L.531-1-2 et L.531-2 du code de la sécurité sociale selon lesquelles, dans la situation qui est celle des requérants, l'octroi de l'allocation est subordonné à la condition que ne soit pas dépassé le plafond de ressources fixé à l'article R.531-10 du même code, par référence au revenu net imposable ; que le coefficient de majoration dont est affectée la rémunération des personnels en service dans les territoires d'outre-mer constitue une modalité de liquidation des sommes versées aux intéressés, destinée à tenir compte des différences existant entre les conditions économiques de la métropole et celles des territoires d'outre-mer, notamment en ce qui concerne le niveau des prix ; que, par suite, c'est à bon droit que, pour comparer les rémunérations perçues en Polynésie française par les requérants au plafond de ressources fixé par les articles précités du code de la sécurité sociale, l'administration a retenu les sommes résultant de l'application de ce coefficient de majoration aux éléments de leur traitement ;
Considérant qu'il est constant que ces sommes excèdent ledit plafond de ressources ; que, dès lors, M. X... et Mme Y... ne sont pas fondés à demander l'annulation des décisions par lesquelles le Haut-Commissaire de la République en Polynésie française a rejeté leurs demandes tendant à obtenir le bénéfice de l'allocation pour jeune enfant ;
Article 1er : Les jugements susvisés du tribunal administratif de Papeete en date des 27 mars et 15 mai 1990 sont annulés.
Article 2 : Les demandes présentées par M. X... et par Mme Y... devant le tribunal administratif de Papeete sont rejetées.