Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif présentés par la société "Lilly France", dont le siège social est 203 bureaux de la Colline, 92213 Saint-Cloud Cedex, représentée par son président-directeur général ; ils ont été enregistrés au greffe de la cour les 14 avril 1989 et 3 juillet 1989 ; la société "Lilly France" demande à la cour ;
1°) d'annuler le jugement n° 71790/3 du 24 janvier 1989 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en réduction des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1977, 1978 et 1980 ;
2°) de lui accorder la réduction demandée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 mars 1991 :
- le rapport de M. Geneste, conseiller,
- et les conclusions de M. Bernault, commis-saire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts : "3° ... Les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice si ce cours est inférieur au prix de revient" ; qu'aux termes de l'article 38 nonies de l'annexe III au même code, dans sa rédaction applicable en l'espèce : "Les ... produits en stock au jour de l'inventaire sont évalués pour leur coût réel. Le coût réel est constitué ... pour les produits semi-ouvrés, les produits finis ..., par le coût d'achat des matières utilisées, augmenté de toutes les charges directes ou indirectes de production" ;
Considérant que, par une convention qui a pris effet le 1er janvier 1970, la société "Eli Lilly Genève" a accordé à la société "Eli Lilly France", d'une part, le droit de fabriquer, d'utiliser et de commercialiser en France des produits mettant en oeuvre un savoir-faire ou des brevets acquis ou détenus par leur société-mère et, d'autre part, le droit d'usage de diverses marques ; qu'en contrepartie des droits ainsi acquis, la société "Eli Lilly France" s'est engagée à verser à la société "Eli Lilly Genève", dans les trente jours suivant l'expiration de chaque trimestre, une redevance égale à 5 % du montant des ventes nettes réalisées au cours du trimestre, soit, selon les termes de la convention, du montant des recettes diminué de ceux des rabais consentis et des impôts assis sur les ventes ;
Considérant qu'il résulte des stipulations susanalysées que le fait générateur des redevances versées est la commercialisation des produits ; que, dès lors, et alors même qu'elles constituent la contrepartie du droit d'exploiter le savoir-faire, les brevets et les marques mentionnés ci-dessus, ces redevances présentent le caractère de charges d'exploitation nées au cours de l'exercice de réalisation des ventes et ne constituent pas une charge de production concourant à la détermination du coût réel des stocks existant à la clôture des exercices antérieurs aux ventes ; qu'ainsi, l'administration n'était pas en droit d'en retenir le montant pour déterminer la valeur de ces stocks ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante, venant aux droits de la société "Eli Lilly France", est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande en réduction des impositions litigieuses ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 24 janvier 1989 est annulé.
Article 2 : La société "Eli Lilly France" est déchargée de l'impôt sur les sociétés mis à sa charge à hauteur, en droits et pénalités de 197.663 F au titre de l'année 1977, de 98.690 F au titre de l'année 1978 et 58.413 F au titre de l'année 1980.