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18/12/1990 | FRANCE | N°89PA01120

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3e chambre, 18 décembre 1990, 89PA01120


VU l'ordonnance en date du 11 janvier 1989 par laquelle le président de la 7ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour administrative d'appel de Paris, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d'Etat par la société anonyme "SAUMON PIERRE CHEVANCE" ;
VU la requête sommaire et le mémoire ampliatif présentés pour la société "SAUMON PIERRE CHEVANCE" dont le siège social est ..., représentée par son président, par Me X..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassati

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VU l'ordonnance en date du 11 janvier 1989 par laquelle le président de la 7ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour administrative d'appel de Paris, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d'Etat par la société anonyme "SAUMON PIERRE CHEVANCE" ;
VU la requête sommaire et le mémoire ampliatif présentés pour la société "SAUMON PIERRE CHEVANCE" dont le siège social est ..., représentée par son président, par Me X..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; ils ont été enregistrés au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat les 16 août 1988 et 16 décembre 1988 ; la société "SAUMON PIERRE CHEVANCE" demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 8705746/4 du 15 juin 1988 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 11 juin 1987 refusant sa demande d'exonération de la taxe de 6°/°° instituée au profit de l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (I.F.R.E.M.E.R.) et, d'autre part, à l'annulation du titre de perception de 970.200 F émis à son encontre ;
2°) d'annuler les décision et titre de perception dont s'agit ;
3°) de prononcer la décharge de la taxe à laquelle elle a été assujettie pour 970.200 F ;
4°) subsidiairement, de prononcer la décharge de la somme de 516.499,50 F correspondant au trop perçu et de condamner l'I.F.R.E.M.E.R. à lui rembourser cette somme ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le traité du 25 mars 1957 instituant la Communauté économique européenne ;
VU l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 ;
VU le décret n° 55-241 du 10 février 1955 ;
VU le décret n° 84-1296 du 31 décembre 1984 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience du 4 décembre 1990 :
- le rapport de M. GENESTE, conseiller,
- les observations de Me X..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour la société SAUMON PIERRE CHEVANCE, et celles de la S.C.P. de CHAISEMARTIN, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer,
- et les conclusions de M. BERNAULT, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions de la société "SAUMON PIERRE CHEVANCE" :
En ce qui concerne la légalité de la taxe parafiscale :
Considérant, en premier lieu, que la société "SAUMON PIERRE CHEVANCE" ne saurait utilement invoquer une incompatibilité entre des dispositions réglementaires applicables à la taxe parafiscale instituée au profit de l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (I.F.R.E.M.E.R.) destinée à financer la participation de cet institut aux études, analyses et contrôles de qualité sur les fabrications des conserves et semi-conserves de poissons, crustacés et autres animaux marins au sens de l'article 1er du décret n° 84-1296 du 31 décembre 1984 avec les stipulations de l'alinéa premier de l'article 9 du traité en date du 25 mars 1957 instituant la Communauté économique européenne en développant une argumentation fondée sur les dispositions du décret n° 84-1297 du même jour relatif à une autre taxe parafiscale instituée au profit de l'I.F.R.E.M.E.R. ; qu'au demeurant, il n'est pas établi que la taxe, qui s'applique aux produits nationaux et au importations, frapperait ces dernières de façon discriminatoire ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 2 du décret n° 84-1296 du 31 décembre 1984, la taxe parafiscale en litige est "assise sur la valeur hors taxes des poissons, crustacés et autres animaux marins destinés à la mise en conserve ou en semi-conserve ; cette valeur est : a) Soit le prix d'achat par les conserveurs et semi-conserveurs en criée, au débarquement ou à la frontière française ; b) Soit, dans la mesure où les assujettis capturent ou produisent eux-mêmes leurs matières premières, un pourcentage du chiffre d'affaires découlant de la vente des conserves ou semi-conserves fabriquées à partir de ces matières premières. Ce pourcentage est fixé pour tenir compte de la part des matières premières dans le prix de chaque type de conserve ou semi-conserve, par arrêté conjoint du ministre chargé de l'économie, des finances et du budget et du ministre chargé des pêches maritimes" ;
Considérant que la seule circonstance que la taxe dont s'agit soit, dans la seule hypothèse du b) de l'article 2 précité, proportionnelle au chiffre d'affaires découlant de la vente des conserves ou semi-conserves fabriquées à partir des produits de la mer n'est pas de nature à permettre de considérer que sont réunis les éléments constitutifs d'une taxe sur le chiffre d'affaires au sens de l'article 33 de la sixième directive adoptée par le Conseil des communautés européennes le 17 mai 1977 et concernant l'harmonisation des législations des Etats-membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires ; que, par suite, la société "SAUMON PIERRE CHEVANCE" n'est pas fondée à soutenir que les dispositions du décret n° 84-1296 du 31 décembre 1984 seraient contraires aux objectifs définis par l'article 33 susmentionné de la sixième directive qui interdit aux Etats-membres d'introduire des droits et taxes ayant le caractère de taxes sur le chiffre d'affaires ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 4 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 : " ... Les taxes parafiscales, perçues dans un intérêt économique ou social au profit d'une personne morale de droit public ou privé autre que l'Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics administratifs, sont établies par décret en Conseil d'Etat ... La perception de ces taxes au-delà du 31 décembre de l'année de leur établissement doit être autorisée chaque année par une loi de finances" ;
Considérant que, conformément aux dispositions de l'article 2 du décret n° 84-428 du 5 juin 1984 qui l'a créé, l'I.F.R.E.M.E.R. est un établissement public industriel et commercial placé sous la tutelle du ministre chargé de la recherche et du ministre chargé de la mer ; que le fait que certaines des activités auxquelles l'office est habilité à se livrer pour l'excécution de sa mission revêtent un caractère administratif n'a pas pour conséquence de modifier, à lui seul, la nature de cet établissement public ; que, par suite, la société requérante n'est fondée à soutenir ni que l'I.F.R.E.M.E.R. ne saurait être habilité à percevoir la taxe parafiscale en litige, ni que le décret en Conseil d'Etat du 31 décembre 1984 déterminant l'assiette et les modalités de recouvrement de la taxe en litige et l'arrêté du 28 mai 1985 en fixant le taux sont entachés d'illégalité ;
En ce qui concerne l'assujettissement de la société "SAUMON PIERRE CHEVANCE" à la taxe parafiscale :
Considérant que la taxe en litige instituée par l'article 1er du décret n° 84-1296 du 31 décembre 1984 est assise, en vertu de l'article 2 du même décret, sur la valeur des produits de la mer destinés à la mise en conserve ou en semi-conserve au sens du décret n° 55-241 du 10 février 1955 ; qu'aux termes de l'article 2 de ce dernier décret : " ... sont considérées comme semi-conserves ... les denrées alimentaires d'origine végétale ou animale, périssables, conditionnées en récipients étanches aux liquides, et ayant subi, en vue d'assurer une conservation plus limitée, un traitement autorisé par arrêté ..." ; que le traitement par voie de fumage est au nombre de ceux qui sont prévus par l'arrêté publié au journal officiel le 9 juillet 1982 pour la préparation des semi-conserves d'animaux marins ; que cet arrêté précise dans son article 1er : "Dans tous les cas, le traitement appliqué doit être tel qu'après conditionnement en récipient étanche aux liquides, le produit présente une durée de conservation d'au moins deux semaines ..." ; qu'aux termes de l'article 5 du même arrêté : "Le fumage est l'opération qui consiste à exposer des animaux marins ou parties d'animaux marins à la fumée obtenue par combustion lente de produits ligneux de façon à abaisser leur teneur en eau et à y introduire divers composants de la fumée. Il y a fumage à chaud lorsque, au cours de l'opération de fumage, les animaux marins ou parties d'animaux marins se trouvent exposés à une température provoquant leur cuisson. Dans le cas contraire, le fumage est dit à froid. Sont dits fumés les produits qui ont été soumis à un fumage pendant un temps suffisant pour acquérir le goût de fumée" ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société "SAUMON PIERRE CHEVANCE" commercialise, en récipients étanches aux liquides, du saumon ayant subi un traitement de conservation par fumage à froid et dont la durée de conservation est d'au moins deux semaines ; qu'un tel produit présente le caractère de saumon fumé à froid au sens de l'article 5 de l'arrêté précité ; que, par suite, la société a été assujettie à bon droit à la taxe en litige au titre de l'année 1985 ;
En ce qui concerne le montant de la taxe parafiscale :
Considérant que la société "SAUMON PIERRE CHEVANCE" n'apporte aucune justification à l'appui de son allégation selon laquelle le montant de la taxe à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1985 serait exagéré au regard des quantités produites ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société "SAUMON PIERRE CHEVANCE" n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande de décharge de la taxe en litige ;
Sur les conclusions de l'I.F.R.E.M.E.R tendant du remboursement des frais de procédure exposés :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande présentée par l'I.F.R.E.M.E.R. tendant à la condamnation de la société requérante au remboursement des frais qu'il a exposés ;
Article 1er : La requête de la société "SAUMON PIERRE CHEVANCE" est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'I.F.R.E.M.E.R. sont rejetées.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 89PA01120
Date de la décision : 18/12/1990
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - PRELEVEMENTS AUTRES QUE FISCAUX ET PARAFISCALITE - TAXES PARAFISCALES - Taxe parafiscale prélevée au profit de l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer - Légalité.

19-08-01, 33-01-03-02 Il résulte des dispositions de l'article 2 du décret n° 84-428 du 5 juin 1984 qui l'a créé que l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer constitue un établissement public de caractère industriel et commercial. Le fait que certaines des activités auxquelles l'institut est habilité à se livrer pour l'exécution de sa mission présentent un caractère administratif n'a pas pour conséquence de modifier, à lui seul, la nature de cet établissement public (1). Par suite, le décret n° 84-1296 du 31 décembre 1984 instituant une taxe parafiscale au profit de cet institut et déterminant l'assiette et les modalités de recouvrement de la taxe n'est pas illégal.

- RJ1 ETABLISSEMENTS PUBLICS - NOTION D'ETABLISSEMENT PUBLIC - CARACTERE DE L'ETABLISSEMENT - CARACTERE INDUSTRIEL ET COMMERCIAL - Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer - Perception de taxes parafiscales - Légalité (1).


Références :

CEE Directive 388-77 du 17 mai 1977 Conseil Sixième directive art. 33
Décret 55-241 du 10 février 1955 art. 2
Décret 84-1296 du 31 décembre 1984 art. 1, art. 2
Décret 84-1297 du 31 décembre 1984
Décret 84-428 du 05 juin 1984 art. 2
Ordonnance 59-2 du 02 janvier 1959 art. 4
Traité du 25 mars 1957 Rome art. 9

1.

Cf. CE, 1985-12-20, Syndicat national des industriels de l'alimentation animale, p. 656


Composition du Tribunal
Président : M. Chanel
Rapporteur ?: M. Geneste
Rapporteur public ?: M. Bernault

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1990-12-18;89pa01120 ?
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