VU le recours du ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget ; il a été enregistré au greffe de la cour le 2 mai 1989 ; le ministre demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 63974/2 du 15 décembre 1988 par lequel le tribunal administratif de Paris a accordé à la SOCIETE GENERALE la décharge des compléments de taxe sur les encours de crédits auxquels elle a été assujettie au titre des années 1979 et 1980 ;
2°) de remettre intégralement l'imposi-tion contestée à la charge de la SOCIETE GENERALE, en principal et pénalités ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU la loi de finances n° 78-1239 du 29 décembre 1978, et le décret n° 79-318 du 19 avril 1979 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n°87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du
9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'au-dience du 4 décembre 1989 :
- le rapport de Mme DUCAROUGE, président-rapporteur,
- et les conclusions de M. BERNAULT, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du IV de l'article 13 de la loi de finances du 29 décembre 1978 : "Les encours de crédits de toute nature non libellés en devises effectivement accordés à leur clientèle par les personnes mentionnées au V sont soumis à une taxe annuelle ... Pour l'établissement de la taxe, les crédits passibles de celle-ci sont retenus pour la totalité de leur montant comptabilisé au 31 décembre de l'année précédant celle de l'imposition" ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 19 avril 1979, pris pour l'application des dispositions législatives précitées : "Les crédits mentionnés au premier alinéa du IV de l'article 13 de la loi susvisée du 29 décembre 1978 s'entendent des crédits définis à la classe 2 de l'annexe au règlement comptable des banques établi par la commission de contrôle des banques. Ces crédits sont comptabilisés à la date du 31 décembre de l'année précédant celle de l'imposition après règlement de l'échéance" ;
Considérant qu'il résulte des disposi-tions législatives précitées que le législateur a entendu inclure dans l'assiette de la taxe la totalité des créances bancaires non libellées en devises, y compris celles dont le recouvrement serait douteux ou litigieux ; que les dispositions précitées du décret du 19 avril 1979 n'ont pu avoir pour objet ou pour effet d'autoriser que les créances douteuses et litigieuses soient exclues de l'assiette de la taxe ; que d'ailleurs les créances de cette nature sont au nombre des comptes définis à la classe 2 de l'annexe au règlement comptable des banques, auquel renvoie ce décret ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SOCIETE GENERALE a exclu des bases de calcul de la taxe dont elle était redevable au titre des années 1979 et 1980 le montant des sommes correspondant à des provisions pour créances douteuses ou litigieuses qu'elle avait constituées ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que lesdites sommes devaient être incluses dans l'assiette de la taxe ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que cette assiette devait être déterminée en déduisant du montant des encours de crédits celui des sommes correspondant à ces provisions ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par la SOCIETE GENERALE devant le tribunal administratif ;
Considérant que l'instruction 4 L-6-79 du 5 juillet 1979 a précisé, au sujet du montant des crédits imposables et sous la rubrique "cas particuliers", qu'en ce qui concerne les créances douteuses ou litigieuses, "les sommes à retenir au titre des créances douteuses ou litigieuses sont celles inscrites au débit du compte 24, sous déduction des provisions portées au sous-compte 249" ; qu'une telle indication, qui doit être interprétée strictement, n'autorise la déduction que des seules provisions pour créances douteuses et litigieuses répondant aux conditions de déductibilité qu'énoncent les dispositions de l'article 39.1.5° du code général des impôts ; qu'il résulte de l'instruction que les provisions constituées par la SOCIETE GENERALE dans les conditions rappelées ci-dessus ont été rapportées à bon droit par l'administration aux résultats imposables, et que cette réintégration n'a d'ailleurs pas été contestée ; que, dans ces conditions, la SOCIETE GENERALE ne peut utilement, sur le fondement de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts, repris à l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, se prévaloir de l'instruction précitée du 5 juillet 1979 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a accordé à la SOCIETE GENERALE la décharge des compléments de taxe sur les encours de crédits auxquels elle a été assujettie dans les conditions rappelées ci-dessus ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 15 décembre 1988 est annulé.
Article 2 : Les impositions supplémen-taires auxquelles la SOCIETE GENERALE a été assujettie au titre de la taxe sur les encours de crédit afférentes aux années 1979 et 1980 sont remises intégralement à sa charge, en droits simples et pénalités.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget et à la SOCIETE GENERALE.