Vu l'ordonnance en date du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 9ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour administrative d'appel de Paris, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d'Etat par la société "L'indicateur Lagrange" ;
Vu la requête et le mémoire complémentaire présentés pour la société à responsabilité limitée "L'indicateur Lagrange", dont le siège est situé ... à Paris 75008, représentée par son gérant en exercice, par la société civile professionnelle Tiffreau-Thouin Palat, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; ils ont été enregistrés au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat les 14 juin 1988 et 14 octobre 1988 ; la société demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 65467/1 du 3 mai 1988 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période du 1er novembre 1978 au 30 octobre 1981 ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de lui accorder la décharge demandée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu la sixième directive du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience du 4 décembre 1989 :
- le rapport de Mme Ducarouge, président-rapporteur,
- les observations orales de Maître de Montbrial, avocat à la cour, pour la société à responsabilité limitée "L'indicateur Lagrange",
- et les conclusions de M. Bernault, commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'affaire est en état d'être jugée ; qu'il n'y a pas lieu d'en reporter l'examen ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que si la société requérante soutient que le jugement attaqué serait intervenu à la suite d'une procédure irrégulière, elle ne produit aucune précision à l'appui de cette allégation ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant qu'aux termes de l'article 266 du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur jusqu'au 1er janvier 1979 : "1- Le chiffre d'affaires imposable est constitué : a) pour les ventes et les échanges de biens, par le montant de la vente ou la valeur des biens ou services reçus en paiement" ; qu'aux termes du même article, dans sa rédaction en vigueur à compter du 1er janvier 1979 : "1- La base d'imposition est constituée : a) pour les livraisons de biens, par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur en contrepartie de la livraison" ;
Considérant qu'au cours de la période du 1er novembre 1978 au 30 octobre 1980, la société requérante, qui édite la revue mensuelle "L'indicateur Lagrange", a calculé la taxe sur la valeur ajoutée dont elle était redevable à raison de cette activité en déduisant du montant des ventes celui des sommes versées aux "Nouvelles Messageries de la Presse Parisienne", qui assurent la diffusion de ce périodique ; que les droits litigieux résultent de la réintégration desdites sommes dans la base d'imposition ; qu'il résulte de l'instruction que les "Nouvelles Messageries de la Presse Parisienne" assurent seulement la diffusion du périodique et doivent être regardées non comme propriétaires à un moment quelconque des exemplaires qu'elles distribuent, mais seulement comme rémunérées pour les prestations de services qu'elles fournissent à la société "L'indicateur Lagrange" en qualité de mandataire de celle-ci ; que dès lors, en application des dispositions précitées de l'article 266 du code général des impôts, le chiffre d'affaires de la société requérante a été à bon droit regardé par l'administration comme constitué par le montant total du produit des ventes de la revue "L'indicateur Lagrange" ;
Considérant d'une part qu'à l'appui de ses con-clusions tendant à la décharge des droits litigieux, la société "L'indicateur Lagrange" soutient que ne seraient pas compatibles avec les objectifs définis par la sixième directive du Conseil des communautés européennes en date du 17 mai 1977 les dispositions, issues de la loi du 29 décembre 1976, de l'article 298 undecies du code général des impôts, aux termes duquel : "Les opérations d'entremise accomplies par des personnes justifiant de la qualité de mandataire régulièrement inscrit au Conseil supérieur des messageries de presse ne donnent pas lieu au paiement de la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'elles concernent des écrits périodiques au sens de la loi du 29 juillet 1881. Les éditeurs des périodiques ainsi diffusés acquittent la taxe sur la valeur ajoutée sur la prix de vente total au public. Pour le calcul des droits à déduction, les opérations ci-dessus sont considérées comme ayant été effectivement taxées" ; que toutefois, en ce qui concerne l'assiette des droits litigieux, le moyen ainsi invoqué est inopérant, dès lors qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, ces droits ont été établis conformément aux dispositions précitées de l'article 266 du code général des impôts ; qu'en outre, en ce qui concerne le droit de l'éditeur de déduire la taxe qu'il a acquittée, ce moyen n'est pas fondé puisque les dispositions précitées de l'article 298 undecies du code général des impôts, si elles exonèrent de la taxe sur la valeur ajoutée les opérations accomplies par des mandataires de presse en rappelant que les éditeurs acquittent cette taxe sur le prix total de vente au public, précisent aussi que, pour le calcul des droits à déduction, les opérations en cause sont considérées comme ayant été effectivement taxées ; qu'assurant ainsi la neutralité de l'impôt, elles ne sont pas incompatibles avec les objectifs définis par la sixième directive du conseil des communautés européennes ; que d'ailleurs la société requérante n'établit pas avoir été privée de ses droits à déduction ;
Considérant d'autre part qu'il résulte de l'instruction que l'assiette de la taxe a été établie par le service en déduisant du prix de vente total au public le montant de la taxe exigible sur les opérations de vente correspondantes qui constituait un élément du prix de ces opérations ; que dès lors le moyen tiré de ce que l'administration aurait appliqué la taxe sur la valeur ajoutée au prix toutes taxes comprises manque en fait ;
Considérant enfin que la taxe acquittée sur les encaissements a donné lieu à déduction du montant des taxes rappelées ; qu'aucune autre taxe n'ayant été facturée à la société "L'indicateur Lagrange" à raison de la vente de son périodique, cette dernière ne saurait, sur le fondement des dispositions des articles 223, 224 et 242 OA de l'annexe II au code général des impôts, se prévaloir d'un droit à déduction supplémentaire ou au remboursement d'un crédit de taxe déductible non imputable ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société "L'indicateur Lagrange" n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête de la société "L'indicateur Lagrange" est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société "L'indicateur Lagrange" et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.