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21/11/1989 | FRANCE | N°89PA00870;89PA00876

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3e chambre, 21 novembre 1989, 89PA00870 et 89PA00876


VU 1°) sous le n° 89PA00870, l'ordonnance du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 7e sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d'Etat par la "Société des grands magasins Galeries Lafayette" ;
VU la requête présentée par la "Société des grands magasins Galeries Lafayette", représentée par un de ses gérants ; elle a été enregistrée au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat le 6 octobre 1988 ; la so

ciété requérante demande au Conseil d'Etat :
1°) de réformer le jugement...

VU 1°) sous le n° 89PA00870, l'ordonnance du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 7e sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d'Etat par la "Société des grands magasins Galeries Lafayette" ;
VU la requête présentée par la "Société des grands magasins Galeries Lafayette", représentée par un de ses gérants ; elle a été enregistrée au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat le 6 octobre 1988 ; la société requérante demande au Conseil d'Etat :
1°) de réformer le jugement n° 67635/1 du 4 juillet 1988 du tribunal administratif de Paris en tant que, par ce jugement, le tribunal a décidé la réintégration dans ses résultats imposables des exercices 1979 à 1981 du montant d'une provision de pertes et charges ;
2°) de lui accorder la réduction correspon-dante des impositions contestées ;
VU 2°) sous le n° 89PA00876 l'ordonnance du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 7e sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d'Etat par le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et du budget ;
VU la requête présentée par le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et du budget ; elle a été enregistrée le 2 décembre 1988 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'Etat :
1°) de réformer le jugement n° 67 635/1 du 4 juillet 1988 du tribunal administratif de Paris en tant que, par ce jugement, le tribunal a fait droit à la demande de la "Société des grands magasins Galeries Lafayette" en ce qui concerne la provision pour charges sociales afférentes aux indemnités de congés payés ;
2°) de décider que la "Société des grands magasins Galeries Lafayette" sera rétablie au rôle de l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 1981, en droits simples et pénalités, à raison de la réintégration dans sa base d'imposition d'une somme de 2.141.660 F ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n°87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 7 novembre 1989 :
- le rapport de Mme DUCAROUGE, président-rapporteur,
- et les conclusions de M. BERNAULT, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes du ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et du budget et de la "Société des grands magasins Galeries Lafayette" sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une même décision ;
Sur la requête du ministre :
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : "1°- Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1°) Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre ... - L'indemnité pour congés payés, calculée dans les conditions définies aux articles L.223-11 à L.223-13 du code du travail, revêt du point de vue fiscal le caractère d'un salaire de substitution qui constitue une charge normale de l'exercice au cours duquel le salarié prend le congé correspondant ... 5°- Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice et figurent au relevé de provisions prévu à l'article 54" ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que l'indemnité de congés payés ne peut donner lieu à constitution d'une provision ; que compte tenu de leur nature et du fait que leur exigibilité est liée au versement effectif de l'indemnité de congés payés, les charges sociales afférentes à cette dernière présentent, du point de vue fiscal, le même caractère que celle-ci et, nonobstant la circonstance que, avant l'intervention du III de l'article 7 de la loi de finances n° 86-1317 du 30 décembre 1986, aucune disposition législative ne les mentionne expressément, ne peuvent suivre un régime différent de celui de l'indemnité de congés payés proprement dite ; qu'il suit de là que le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et du budget est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a accordé à la "Société des grands magasins Galeries Lafayette" la décharge du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1981 à raison de la réintégration dans ses résultats imposables dudit exercice d'une provision pour charges sociales sur congés payés de 2.141.660 F ;
Sur la requête de la "Société des grands magasins des Galeries Lafayette" :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la "Société des grands magasins des Galeries Lafayette" procède à l'inventaire de ses stocks par rayon à des dates éloignées de plusieurs semaines, voire de plusieurs mois, de la date de clôture de ses exercices fixée au 31 décembre de chaque année ; qu'elle a constitué au titre des exercices 1979 à 1981 une provision pour pertes et charges destinée à prendre en compte les effets de la démarque inconnue, résultant, selon elle, des vols en magasin et des erreurs administratives inhérentes au système de l'inventaire permanent, subie par ses stocks entre la date de leur inven-taire physique et la date de clôture de chaque exercice ; que, par le jugement attaqué, le tribu-nal administratif de Paris a estimé que la société n'était pas en droit de déduire cette provision de ses résultats imposables ;
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : "1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... notamment : 5°) les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables ..." ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise n'est en droit de constituer une provision qu'en vue de faire face à une perte probable non encore réalisée à la clôture de l'exercice ; qu'ainsi la société requérante ne pouvait, comme elle l'a fait, constituer une provision pour constater une perte physique sur ses stocks ou des erreurs d'imputation déjà réalisées à la clôture de l'exercice ;
Considérant que la société requérante invoque sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales la réponse faite par le secrétaire d'Etat au budget le 1er août 1956 à M. de X..., sénateur, qui concerne le cas où l'inventaire est établi à une date antérieure à la clôture de l'exercice mais relativement proche de celle-ci ; qu'il résulte de l'instruction que plusieurs mois séparent parfois l'inventaire physique établi par la "Société des grands magasins Galeries Lafayette" de la date de clôture de l'exercice concerné ; que par suite, la condition de proximité des dates prévue par la réponse susmentionnée n'étant pas remplie, la société requérante n'est, en tout état de cause, pas fondée à demander le bénéfice de l'interpréta- tion de la loi fiscale qui y serait contenue ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les sommes qualifiées par la société de provisions ont été évaluées de façon forfaitaire, par application d'un taux moyen de démarque ; que la société n'a pas procédé à une détermination des taux de démarque par rayon permettant de préciser avec une approximation suffisante les quantités de marchandises en stock dans chaque rayon à la clôture de l'exercice ; qu'ainsi la société n'établit pas que la valeur de ses stocks à la clôture de chacun des exercices 1979, 1980 et 1981 aurait été inférieure à celle résultant des inventaires physiques, antérieurement effectués au titre de chacune de ces années ; qu'elle n'est par suite pas fondée à demander que les sommes corres- pondantes soient déduites des résultats imposa-bles ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la "Société des grands magasins Galeries Lafayette" n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a, par le jugement attaqué, rejeté sa demande en tant qu'elle se rapportait à la valeur des stocks à prendre en considération pour la détermination des résultats imposables des exercices 1979, 1980 et 1981 ;
Article 1er : Le bénéfice de la "Société des grands magasins Galeries Lafayette" en 1981 sera calculé, pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés, en ajoutant au montant des résultats déclarés la somme de 2.141.660 F.
Article 2 : L'impôt sur les sociétés pour l'année 1981, calculé conformément aux bases définies à l'article premier ci-dessus, est remis à la charge de la "Société des grands magasins Galeries Lafayette", en droits simples et pénalités.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 4 juillet 1988 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : La requête de la "Société des grands magasins Galeries Lafayette" est rejetée.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la "Société des grands magasins des Galeries Lafayette" et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 89PA00870;89PA00876
Date de la décision : 21/11/1989
Sens de l'arrêt : Droits maintenus
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-01-04-04,RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - DETERMINATION DU BENEFICE NET - PROVISIONS -Principes - Dépréciation des éléments d'actif - Stocks - Provision pour perte physique sur les stocks résultant de vols en magasin et d'erreurs administratives - Absence (1).

19-04-02-01-04-04 Il résulte des dispositions de l'article 39-1-5° du code général des impôts qu'une entreprise ne peut constituer une provision pour constater une perte physique sur ses stocks ou des erreurs d'imputation déjà réalisées à la clôture de l'exercice. A donc été refusée à bon droit la déduction, par une société exploitant un grand magasin qui procède à l'inventaire de ses stocks par rayon à des dates éloignées de plusieurs semaines, voire de plusieurs mois, de la date de clôture de l'exercice, d'une provision, au demeurant calculée avec une approximation insuffisante, destinée à prendre en compte les vols et les erreurs administratives d'imputation de marchandises ayant affecté ses stocks entre la date de leur inventaire et la date de clôture de l'exercice.


Références :

CGI 39, 209
CGI Livre des procédures fiscales L80 A
Loi 86-1317 du 30 décembre 1986 art. 7 Finances pour 1987

1.

Cf. Société des grands magasins Galeries Lafayette, 1991-07-26, p. 305


Composition du Tribunal
Président : M. Rivière
Rapporteur ?: Mme Ducarouge
Rapporteur public ?: M. Bernault

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1989-11-21;89pa00870 ?
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