Vu l'ordonnance en date du 1er décembre 1988 par laquelle le président de la 5e sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour administrative d'appel de Paris, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d'Etat pour l'Administration générale de l'assistance publique, dont le siège est ..., par Me X..., avocat au Conseil d'Etat ; Vu cette requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 15 juillet 1987 ; l'administration générale de l'assistance publique demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement du 29 avril 1987 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé le commandement du 6 mai 1983 mettant à la charge de Madame Z... la somme de 93.865 F, montant des frais de séjour de son père, M. Y..., à l'hôpital DUPRUYTREN du 7 juin 1979 au 7 janvier 1981 ; 2°) de rejeter la demande présentée par Mme Z... devant le tribunal administratif de Paris, Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code civil, notamment ses articles 205, 206, 207 et 212 ; Vu le code de la santé publique, notamment son article L 708 ; Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88 906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience du 31 janvier 1989 : - le rapport de M. DACRE-WRIGHT, conseiller, - les observations de Me X... pour l'Assistance publique de Paris et de Me GAUZES, avocat de Mme Z..., - et les conclusions de M. ARRIGHI de CASANOVA, Commissaire du Gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête Considérant qu'aux termes de l'article L708 du code de la santé publique : "Les hôpitaux et les hospices peuvent toujours exercer leurs recours, s'il y a lieu contre les hospitalisés, contre leurs débiteurs et contre les personnes désignées par les articles 205, 206, 207 et 212 du code civil" lesquelles sont les parents et alliés des malades ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un établissement public hospitalier qui n'a obtenu le règlement des frais d'hospitalisation d'un malade ni par le malade lui-même ni par l'un de ces débiteurs, est en droit, du fait même de l'existence de la dette, d'en rechercher le paiement par les parents et alliés de l'hospitalisé sans être tenu pour autant de justifier ce recours en apportant la preuve que le malade n'avait pas les ressources suffisantes pour payer les sommes dues en raison de son hospitalisation ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur le motif tiré de ce que l'administration générale de l'assistance publique n'établissait pas qu'il lui avait été impossible de recouvrer auprès de M. Y... les frais résultant de son séjour à l'hôpital DUPRUYTREN du 7 juin 1979 au 7 janvier 1981, pour faire droit aux conclusions de sa fille, Mme Z..., dirigées contre le commandement du 6 mai 1983 lui enjoignant de régler la somme de 93 865 F, montant des frais précités ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel de Paris, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme Z... soit devant le tribunal administratif soit devant la cour ; Considérant que l'obligation faite aux personnes désignées par les articles 205, 206, 207 et 212 du code civil est de nature alimentaire et qu'aux termes du premier alinéa de l'article 208 du même code : "Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit" ; que par suite si, ainsi qu'il vient d'être dit, un établissement public hospitalier peut toujours exercer à l'encontre des débiteurs d'aliments d'un malade le recours prévu par l'article L708 du code de la santé publique, le remboursement des frais d'hospitalisation par ces débiteurs d'aliments est subordonné à l'existence de l'obligation alimentaire et limité au montant de cette obligation lorsqu'elle existe ; qu'en cas de difficulté sérieuse sur le point de savoir si ces conditions sont réunies, il n'appartient qu'à la juridiction judiciaire d'en décider ; qu'il s'ensuit que le juge administratif saisi d'une requête contestant le recours exercé par l'administration sur le fondement de l'article L708 précité doit, dans ce cas et avant de statuer sur le bien-fondé de la requête, demander à l'autorité judiciaire si et dans quelle mesure la personne concernée est tenue à l'obligation alimentaire ; Considérant en premier lieu que la production du dossier social de M. Y... est l'un des éléments pouvant permettre, le cas échéant, de déterminer s'il y a ou non, en l'espèce, obligation alimentaire ; que cette appréciation incombant, ainsi qu'il vient d'être dit, à l'autorité judiciaire, la demande de Mme Z... tendant à ce que le juge administratif ordonne cette production doit être rejetée ;
Considérant en deuxième lieu qu'il n'appartient qu'à l'administration d'exercer son recours à l'encontre des autres débiteurs d'aliments de M. Y... ou à Mme Z... d'engager, si elle s'y croit fondée, une action récursoire envers ces derniers aux fins de partage de la dette ; que, par suite, les conclusions de Mme Z... tendant à ce que administratif déclare que cette dette doit être partagée entre tous les débiteurs d'aliments de M. Y..., sont irrecevables ; Considérant en troisième lieu que, si Mme Z... soutient qu'elle a renoncé à la succession de son père et n'est pas de ce fait redevable de ses dettes, ce moyen est inopérant à l'égard du recours exercé par l'administration générale de l'assistance publique sur le fondement de l'article L708 du code de la santé publique ; Mais considérant que, si Mme Z... soutient que son père bénéficiait de plusieurs pensions de retraite et avait vendu avant son hospitalisation un immeuble lui appartenant, elle n'apporte pas à l'appui de ses allégations des précisions suffisantes pour en déduire de façon certaine qu'elle n'était tenue à aucune obligation alimentaire envers lui ; que, dans ces conditions, la question de savoir si et dans quelle mesure Mme Z... était débiteur d'aliments de son père présente une difficulté sérieuse ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu, dès lors, de surseoir à statuer jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur ce point ;
Article 1er : Le jugement du 29 avril 1987 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé le commandement du 6 mai 1983 délivré à l'encontre de Mme Z... par l'administration générale de l'administration publique, est annulé.
Article 2 : 11 est sursis à statuer sur la requête de Mme Z... dirigée contre le commandement précité jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur la question de savoir si et dans quelle mesure Mme Z... était tenue à l'obligation alimentaire envers son père M. Y... entre le 7 avril 1978 et le 7 janvier 1981 ; Mme Z... devra justifier dans le délai d'un mois, à compter de la notification de la présente décision, de sa diligence à saisir de cette question la juridiction compétente.