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28/01/2025 | FRANCE | N°23NT03572

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 6ème chambre, 28 janvier 2025, 23NT03572


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 12 février 2020 par laquelle le directeur de l'agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) a refusé de renouveler son détachement prenant fin le 31 août 2020, ainsi que la décision implicite par laquelle le directeur de l'AEFE a rejeté son recours gracieux.



Par un jugement n°2003277, 2009776 du 5 octobre 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté s

es demandes.



Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 4 décem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 12 février 2020 par laquelle le directeur de l'agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) a refusé de renouveler son détachement prenant fin le 31 août 2020, ainsi que la décision implicite par laquelle le directeur de l'AEFE a rejeté son recours gracieux.

Par un jugement n°2003277, 2009776 du 5 octobre 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 décembre 2023 et un mémoire non communiqué enregistré le 23 décembre 2024, M. A..., représenté par Me Vérité, demande à la cour :

1°) l'annulation du jugement du 5 octobre 2023 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) l'annulation de la décision du 12 février 2020 par laquelle le directeur de l'AEFE a refusé de renouveler son contrat et la décision par laquelle ce même directeur a implicitement rejeté son recours gracieux formé le 17 février 2020 ;

3°) d'enjoindre au directeur de l'AEFE de lui proposer un renouvellement de contrat dans le délai de 2 mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et ce, sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé ce délai ;

4°) de mettre à la charge de l'AEFE la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal a commis une erreur de droit en qu'il ne pouvait faire application du IV de l'article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983 relatif au régime d'autorisation, en cherchant à vérifier si l'exercice de cours particuliers est compatible avec les fonctions qui lui sont confiées, alors que la dispense de cours particuliers en mathématiques dans un cadre libéral relève du V de l'article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983 ;

- le tribunal ne pouvait se référer à la décision du 25 février 2019, dès lors qu'elle a été annulée par le jugement du 11 octobre 2022 devenu définitif ;

- le jugement a statué " ultra petita ", en ce que sa participation à la soirée du 13 avril 2019 n'a pas constitué un motif au non-renouvellement de son contrat de résident ;

- les faits ayant motivé la décision du directeur de l'AEFE refusant de renouveler son détachement ne sont pas établis :

* le tribunal a omis de prendre en compte les missions liées au service d'enseignement qui comprennent les travaux de préparation et les recherches personnelles nécessaires à la réalisation des heures d'enseignement, l'aide et le suivi du travail personnel des élèves, leur évaluation, le conseil aux élèves dans le choix de leur projet d'orientation en collaboration avec les personnels d'éducation et d'orientation, les relations avec les parents d'élèves, le travail au sein d'équipes pédagogiques constituées d'enseignants ayant en charge les mêmes classes ou groupes d'élèves ou exerçant dans le même champ disciplinaire ;

* sa durée de travail devrait être portée au minimum à 32 heures hebdomadaire et non à 18 heures ;

* il n'est pas établi que la soirée du 13 avril 2019 se soit déroulée au domicile d'un élève mineur ;

- il a correctement rempli ses obligations de service, notamment l'accompagnement personnalisé et l'organisation des devoirs communs ;

- seule une insuffisance professionnelle caractérisée peut constituer une atteinte à l'intérêt du service, or il a toujours été correctement évalué ;

- il s'est contenté d'accompagner des élèves souhaitant participer à la soirée du 13 avril 2019 ;

- le non-renouvellement de son contrat de résident est entaché d'illégalité car il constitue une sanction déguisée et un détournement de procédure.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 décembre 2024, l'AEFE conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du requérant la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le décret n°2014-940 du 20 août 2014 ;

- le décret n°2002-22 du 4 janvier 2002 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pons,

- les conclusions de Mme Bailleul, rapporteure publique,

- les observations de Me Vérité pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., professeur certifié de mathématiques détaché auprès de l'agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE), a été affecté, en application des dispositions du décret du 4 janvier 2002 relatif à la situation administrative et financière des personnels des établissements français à l'étranger, au lycée ... de ..., à compter du 1er septembre 2002, par un contrat individuel d'une durée de trois ans en qualité de résident. Son détachement a été renouvelé depuis lors tous les trois ans. Le 4 novembre 2019, le proviseur de l'établissement a toutefois émis un avis défavorable à la demande de renouvellement de détachement à compter du 1er septembre 2020 présentée par l'intéressé. Par une décision du 12 février 2020, le directeur de l'agence a décidé de ne pas renouveler le contrat de M. A.... Celui-ci a formé le 17 février 2020 un recours gracieux contre cette décision, implicitement rejeté. M. A... a alors demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 12 février 2020 et la décision implicite de rejet de son recours gracieux. Par un jugement du 5 octobre 2023, dont M. A... relève appel, le tribunal a rejeté ses demandes.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si M. A... soutient que les premiers juges se sont, à tort, fondés sur les dispositions du IV de l'article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983 relatif au régime d'autorisation, un tel moyen tiré de l'erreur de droit qui aurait ainsi été commise, se rattache au bien-fondé du jugement et doit en conséquence être écarté comme sans incidence sur sa régularité. En outre, le tribunal pouvait, dans la cadre de son contrôle de la décision de non-renouvellement en litige, se référer aux motifs de la décision du 25 février 2019, quand bien même cette décision a été annulée par le jugement du 11 octobre 2022 devenu définitif. Enfin, le tribunal n'a pas statué au-delà des conclusions dont il était saisi. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularités.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article L. 452-1 du code de l'éducation : " L'Agence pour l'enseignement français à l'étranger est un établissement public national à caractère administratif placé sous tutelle du ministre chargé des affaires étrangères et du ministre chargé de la coopération. ". Aux termes de l'article L. 452-5 de ce code : " L'agence assure par ailleurs, au bénéfice de l'ensemble des établissements scolaires participant à l'enseignement français à l'étranger : (...) / 2° Le choix, l'affectation, la gestion des agents titulaires de la fonction publique placés en détachement auprès d'elle, après avis des commissions consultatives paritaires compétentes, et également l'application des régimes de rémunération de ces personnels (...) ".

4. D'une part, en l'absence de texte contraire, un agent dont le détachement arrive à échéance n'a aucun droit au renouvellement de celui-ci, la décision de non-renouvellement devant seulement être justifiée par l'intérêt du service. L'administration dispose, à cet égard, d'un large pouvoir d'appréciation qu'il n'appartient au juge de l'excès de pouvoir de censurer que si l'appréciation ainsi portée par l'autorité administrative est entachée d'erreur manifeste.

5. D'autre part, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son contrat, de ne pas le renouveler ou de proposer à l'agent, sans son accord, un nouveau contrat substantiellement différent du précédent, que pour un motif tiré de l'intérêt du service. Un tel motif s'apprécie au regard des besoins du service ou de considérations tenant à la personne de l'agent. Dès lors qu'elles sont de nature à caractériser un intérêt du service justifiant le non renouvellement du contrat, la circonstance que des considérations relatives à la personne de l'agent soient par ailleurs susceptibles de justifier une sanction disciplinaire ne fait pas obstacle, par elle-même, à ce qu'une décision de non renouvellement du contrat soit légalement prise, pourvu que l'intéressé ait alors été mis à même de faire valoir ses observations.

6. Il ressort des pièces du dossier que pour refuser de renouveler le contrat individuel de résident de M. A..., en position statutaire de détachement auprès de l'AEFE, en qualité de professeur auprès du lycée ... de ..., le directeur de l'AEFE s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé dispensait des cours particuliers à des élèves du lycée ... qui, par leur nombre et leur fréquence, nuisaient à l'image de l'établissement, à l'égalité entre les élèves et étaient cause d'absentéisme.

7. En premier lieu, il n'est pas contesté qu'à la date de la décision en litige, M. A... dispensait, depuis plusieurs années, des cours particuliers de mathématiques à des élèves du lycée ..., en l'occurrence 4 à 6 heures de cours particuliers hebdomadaires à des élèves de son établissement d'exercice issus, selon ses propres déclarations, " de familles aisées ". Cette quotité horaire moyenne est significative au regard de sa durée de service hebdomadaire, même en prenant en compte ses activités accessoires liées au service d'enseignement qui comprennent, notamment, les travaux de préparation et les recherches personnelles nécessaires à la réalisation des heures d'enseignement. Il ressort également des pièces du dossier que l'AEFE avait alerté M. A..., au moins à partir du mois de février 2019, au regard de ses missions et fonctions, des problèmes déontologiques posées par l'exercice d'une telle activité et qu'elle avait demandé au requérant de suspendre son exercice, en lui indiquant que cette pratique portait atteinte à sa posture professionnelle et personnelle, au respect de sa mission et de son image d'enseignant et était de nature à " perturber la sérénité de l'établissement ". Dans ces conditions, la matérialité des faits d'exercice d'une activité portant atteinte à l'intérêt du service est suffisamment établie.

8. En second lieu, la circonstance que M. A... a toujours été évalué de manière positive est sans incidence sur la légalité de la décision contestée et il ne ressort pas des pièces du dossier que cette décision serait constitutive d'une sanction déguisée ou entachée d'un détournement de procédure.

9. Eu égard aux faits dont la matérialité est établie, à savoir les faits d'exercice répétés d'une activité annexe portant atteinte à l'intérêt du service, à la réputation de l'établissement et à l'égalité entre les élèves, de nature à porter atteinte à l'image d'un établissement français au Maroc, compte tenu de sa qualité d'enseignant, des conditions dans lesquelles M. A... a exercé ce cumul d'activités, le directeur de l'AEFE a pu légalement, sans entacher sa décision d'erreur manifeste d'appréciation et eu égard au large pouvoir d'appréciation dont il dispose pour apprécier l'opportunité de renouveler le contrat d'un enseignant détaché, se fonder sur ces seuls faits relatifs à l'intérêt du service pour décider de ne pas renouveler le contrat de l'intéressé.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction, ainsi que celles présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à l'agence pour l'enseignement français à l'étranger.

Délibéré après l'audience du 10 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Pons, premier conseiller,

- Mme Bougrine, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 janvier 2025.

Le rapporteur

F. PONS

Le président

O. GASPON

La greffière

C.VILLEROT

La République mande et ordonne et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT03572


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT03572
Date de la décision : 28/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: Mme BAILLEUL
Avocat(s) : VERITE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-28;23nt03572 ?
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